Le film, nommé aux Oscars 2012 dans la catégorie du Meilleur Film en langue étrangère, raconte une curieuse histoire de remise de prix qui met face à face un père et son fils dans un conflit larvé autour de leur même domaine de recherche : le monde et la littérature talmudiques. A travers ces deux personnages, ce sont deux visions de la recherche qui s’affrontent.
Alors qu’Eliezer Shkolnik, professeur puriste et misanthrope a toujours joué de malchance, son fils Uriel est reconnu par ses pairs. Le père, prénommé Eliezer (nom d’un rabbin du Talmud connu pour son intransigeance) a fait une découverte extraordinaire sur le Talmud de Jérusalem, mais s’est fait « doublé » par un collègue chercheur arrivé à la même conclusion, par un simple hasard, mais ayant publié avant Eliezer et ruinant donc sa découverte fruit de recoupements minutieux et d’années de travail. Depuis, Eliezer est frustré et jaloux et ne parvient pas à produire des publications marquantes. Par contre, son fils Uriel, « le lumineux », produit nombre de livres et brille dans de nombreuses et populaires conférences. Mais pour son père, il n’est pas un chercheur sérieux, spéculant plus qu’il ne prouve.
Un jour, le père reçoit un appel : l’académie a décidé de lui remettre le prix le plus prestigieux de sa discipline, le Prix d’Israël. Sauf qu’il y a eu erreur sur la personne et que c’est au fils qu’on voulait donner ce prix… Comment corriger une telle erreur sans « tuer » l’un ou l’autre ?
Le sujet est une excellente occasion pour nous dresser un portrait impitoyable du petit monde universitaire des études juives. Ceux qui connaissent ce petit monde ne peuvent que jubiler.
La mise en scène est une véritable partition musicale, précise, intelligente. Les personnages sont excellents, y compris les personnages de femmes, secondaires mais si importants, observatrices et faire valoir de ce monde si masculin. Le film nous fait rentrer dans les égos de personnes, les rapports académiques houleux, les relations père/fils, mari/épouse, mais aussi dans ce petit monde de la recherche talmudique avec ses jalousies et ses frustrations.
Tout est juste, fin, drôle. Un film à ne pas manquer qui sera spécialement apprécié des lecteurs attachés aux petites choses et aux détails, aux notes de bas de page des chercheurs… Un chef d’œuvre audacieux par l’originalité de son sujet et brillant par la minutie et l’intelligence de sa réalisation.
Yeshaya Dalsace
Fiche technique
Film réalisé par Joseph Cedar en 2011
Avec
Shlomo Bar-Aba, Lior Ashkenazi, Aliza Rosen