Tous les Israéliens (et les Juifs) devraient-ils être porteurs d’une carte de Donneur d’organes, document que l’on peut se procurer en Israël auprès de l’organisation « Edi » et en France auprès des Hopitaux Publics ?
La problématique :
D’un côté la valeur de la vie humaine exige de tout faire pour sauver une vie : " Celui qui sauve une vie sauve un monde " (Michna , Sanhédrin 4:5)
De l’autre côté, on ne doit jamais privilégier une vie face à une autre. (Ohalot 7:6), il faut donc clairement définir le moment de la mort du donneur.
Le judaïsme exige le respect du corps d’une personne décédée.
Responsum :
Un don d’organe consécutif à un décès, entre dans la catégorie qu’il est convenu d’appeler « pikuah nefesh » (sauver une vie, primauté de la vie) [*Il doit donc être encouragé, sous réserve qu’il ait été établi, sans l’ombre d’un doute, que le donneur est mort halakhiquement. Il est par conséquent, recommandé de porter sur soi une carte de Donneur d’Organes pour éviter tout problème légal ou halakhique lors du décès.*]
1) Le principe de Pikuah nefesh (sauver une vie) prime sur le Shabbat, sur Yom Kippour et sur toutes les mitzvot de la Torah à part l’idolâtrie, les relations sexuelles interdites et le meurtre.
Lorsque les médecins effectuèrent les premières transplantations de cœur dans les années 1960, tous les receveurs moururent dans les quelques jours ou les semaines qui suivirent. Les autorités halakhiques s’y opposèrent donc, puisque les transplantations tuaient les receveurs au lieu de leur sauver la vie.
Mais en 1980 on découvrit le Cyclosporin A, médicament anti-rejet et depuis lors il y eut une augmentation spectaculaire des taux de réussite. Après un an, le taux de survie oscille actuellement entre 63% et 83% pour les transplantations de foie (aux USA), 88% pour les greffes de reins, 80% pour les transplantations cardiaques. Les transplantations sont donc à l’évidence une forme de pikuah nefesh, qui a la préséance sur la plupart des interdictions de la Torah.
2) Certaines autorités religieuses prétendent que les transplantations constituent un « nivoul hamet » une désacralisation du défunt, qui est interdite par le Talmud . Mais le Rabbin Unterman a démontré qu’il n’y avait pas de désacralisation si la personne, avant son décès, avait donné son accord pour un prélèvement en vue d’une transplantation. De toute façon « pikuah nefesh » a la préséance sur « nivoul hamet ».
3) D’après le Talmud , il ne faut tirer aucun profit (hana’ah) des morts, ce qui peut sembler exclure les transplantations, mais le Rabbin Tuvia Friedman a fait remarquer que d’après Rabbi Yohanan (Pesahim 25a) on peut tout utiliser comme remède, sauf l’idolâtrie, etc… même ce qui est « assour be-hana’ah » De plus, le Rabbin Unterman suggère pour ce qui est de la greffe de cornée, que cela ne revient pas à tirer profit d’un défunt puisque après la greffe, l’organe revit.
4) Il est interdit de retarder les funérailles d’un proche (Deutéronome 21 :23 et Mishna Sanhedrin 6 :5) Il semblerait donc qu’il soit interdit de retarder l’enterrement d’un organe. Mais là-encore, on peut répondre que la transplantation redonne vie à l’organe et qu’il n’y a plus de délai dans l’enterrement.
5) Penchons-nous maintenant sur certaines greffes particulières :
a) Les reins :
Il est évident qu’une personne souffrant d’une défaillance des reins est en danger de mort par conséquent, une greffe de rein venant d’un donneur défunt est « pikuah nefesh ». La question du donneur vivant offrant l’un de ses reins est une question en soi qu’il faut examiner pour elle-même.
b) Cœur et foie :
Ce sont les transplantations les plus problématiques.
D’un côté d’après le Talmud et les Rabbins décisionnaires, (poskims) le décès est déterminé par l’arrêt de la respiration et du cœur. D’un autre côté, ces organes ne peuvent être utilisés que si le cœur continue à battre. Autrement dit, prélever un cœur alors qu’il continue à battre peut tuer d’un point de vue purement halakhique ! Au début des années 1970, certaines autorités halakhiques suggérèrent de redéfinir la mort par la mort cérébrale même si le cœur continuait à battre. Mais la plupart des autorités s’y opposèrent car cela ne convient pas à la définition halakhique traditionnelle. En 1986 il y eut un changement de position des Rabbins décisionnaires, en raison de la découverte du Cyclosporin A et du perfectionnement de nouvelles machines capable de mesurer « brain stem death » (n-d-t : la mort du tronc cérébral ou mort encéphalique par absence d’irrigation du cerveau, à différencier de la mort cérébrale). Le tronc cérébral commande la respiration donc, sa mort indique que le patient est mort halakhiquement même si des machines le gardent en vie.
Le Rabbinat en Chef d’Israël publia alors cinq conditions pour cessation naturelle de la respiration : 1) connaissance claire de la cause des blessures, 2) cessation totale de toute respiration naturelle, 3) preuve clinique que le tronc cérébral est bien mort, 4) preuve objective comme par le test BAER que le tronc cérébral est bien mort, 5) preuve que n° 2 et n° 3 continuent pendant au moins 12 heures sous traitement total et normal. Ces critères sont utilisés depuis Août 1987 pour les transplantations des Hopitaux Hadasssh et Ein Karem en Israël.
c) Les greffes de peau et banques de peau sont autorisées par la plupart des autorités religieuses.
d) Greffes de Cornée :
Les Rabbins Unterman et Touvia Friedman ont décidé que la cécité est « pikuah nefesh » car un aveugle peut tomber dans un escalier ou se faire écraser. Nous sommes d’accord donc des cornées peuvent être greffées ou conservées dans des banques.
6) Certaines autorités religieuses n’autorisent les transplantations que si le patient qui va en profiter, se trouve à proximité, se basant pour cela sur le Rabbin Yehezkel Landau qui autorisait les autopsies au 18ème siècle si le patient était « devant nous ». Mais les temps ont changé et la peau ou la cornée peuvent être stockées alors que d’autres organes peuvent être transportés par avion n’importe où dans le monde, de sorte que le patient est toujours « devant nous ».
7) Il est recommandé d’être porteur d’une carte de donneur d’organes pour éviter tout problème légal ou halakhique, d’autant plus qu’il y a une terrible pénurie d’organes.
[*En conclusion, c’est une mitzva de prévoir de donner ses organes après son décès car « qui sauve une vie sauve l’humanité » (Michna Sanhedrin 4 :6).*]
Rabbin David Golinkin
Possek Massorti israélien
En France
Selon la loi Caillavet (loi de bioéthique de juillet 1994), on considère en France qu’il y a un « consentement présumé ou implicite » du donneur, sauf opposition explicite.
« Toute personne est considérée comme consentante au don d’éléments de son corps après sa mort, en vue de greffe, si elle n’a pas manifesté son opposition de son vivant. Si, en cas de décès, le médecin ne connaît pas la décision du défunt, il devra s’efforcer de recueillir le témoignage de sa volonté auprès de sa famille. »
L’organe sera donc prélevé sans accord. Il existe dans le judaïsme un tel concept, celui de l’emprunt d’un objet, sans permission, en vue de faire une mitsva en considérant que le propriétaire serait d’accord d’aider à une mitsva " ניחה ליה ". On peut l’appliquer dans les cas de greffe en partant du principe que "l’emprunt" ne lèse pas le donneur qui n’a plus besoin de ses organes, alors que le besoin est grand pour le greffé et la mitsva essentielle.
Résurrection d’un corps mutilé ?
La croyance en la résurrection doit-être elle-même comprise. On peut la définir de différente façon, spirituelle, métaphorique ou littérale et réellement corporelle. Pour notre question de greffe, seule l’interprétation littérale pose question. Nos sages y ont cependant répondu en affirmant que même un corps mutilé ou brûlé ressuscitera comme les autres.
" Quoique rien n’empêche le Saint béni soit-Il de rassembler toutes les parties disséminées d’un corps (de même, en cas d’incinération), de sorte que tous les martyrs ayant péri par le feu puissent être également destinés à la résurrection, tout ce qui dans la Tora est destiné à fortifier la croyance en la résurrection des morts ne doit pas être ébranlé. " (Ramban Chaâr ha-Guemoul)
On peut même dire que pour une greffe, la partie du corps donnée, loin d’être avilie est ennoblie par la fonction vitale qu’elle va remplir.
Mort cérébrale
Dans le judaïsme, il semble qu’il n’existait pas de définition rigoureuse de l’instant de la mort, stricto sensu, il y a plus de deux siècles, avant que le Hatam Sofer (Techouva 338, chalah, aval kol che-ahar che-moutal) n’établisse trois critères :
1. Moutal ke-èvèn domèm (le corps est inerte comme une pierre)
2. Ein bo choum defika (le cœur ne bat plus, le pouls est nul)
3. Betela ha-nechima (la respiration est arrêtée).
La position des décisionnaires Auerbach et Elyachiv est que les trois critères conditionnent l’établissement clinique de la mort : si bien que tant que le cœur bat, on ne peut extraire le cœur du corps, même si la respiration naturelle est arrêtée et maintenue artificiellement (par une machine).
À l’opposé, le rabbin Saul Israeli (mort en 95) et le rabbin Schapira ont estimé que seul le troisième critère évoqué est vraiment critique, comme dernier stade, tandis que les deux premiers ne sont que des signes d’attestation. Ce qui a entraîné le grand rabbinat à autoriser la greffe du cœur.
On sait qu’en fait le battement du cœur est ordonné par le cerveau, lui-même alimenté par le sang chargé d’oxygène venant des poumons en respiration. Il existe donc une corrélation, circulation, pour que le système fonctionne. Selon donc Auerbach et Eliachiv, tant que la partie fondamentale du cerveau donne ordre au cœur de battre (même en état de coma dépassé, de lésion irréversible), l’individu ne peut être considéré comme mort et l’on ne peut écourter sa vie même d’un seul instant pour faire vivre une autre personne.
Toutefois, dernièrement, le rabbin Auerbach aurait admis que s’il était avéré que la respiration artificielle peut faire fonctionner le cœur sans passer par le cerveau, le battement cardiaque ne devrait plus servir de critère de vie.
Tandis que les orthodoxes modernes, les Massorti et maintenant le rav Ovadia Yossef , la mort du tronc cérébral sert de critère définitif. Ce qui autorise des greffes dans des conditions médicales optimales puisque le cœur bat encore. C’est ce qu’a validé la Knèssèt.
Le corps médical occidental quant à lui opère des greffes du cœur, à partir du seul critère de la mort du cerveau. Mais, on ne distingue pas moins de trente degrés (protocoles) de mort clinique du cerveau !
Selon un document publicitaire édité par l’Établissement français des greffes (5, rue Lacuée, Paris 75012), à la question « Quand peut-on donner ses organes ? », il y est répondu :
Uniquement en cas de mort encéphalique (aussi appelée mort cérébrale). C’est le décès provoqué par l’arrêt définitif du fonctionnement du cerveau qui est entièrement et irrémédiablement détruit. La mort encéphalique est très rare (environ 2000 décès sur 500.000, 0,4% chaque année en France). Dans ce cas, l’activité cardiaque et la respiration sont maintenues artificiellement. Ce maintien artificiel ne peut durer que quelques heures seulement.
Juifs ou non ?
La question de l’identité du bénéficiaire (comme celui du donneur lorsqu’un juif en profite) ne doit pas être soulevée. L’obligation pour les juifs de sauver une vie s’applique à tous, et celui qui hésiterait serait blâmable et profanerait gravement le nom de Dieu.
Conclusion
La définition de la mort clinique est cérébrale. Elle reste cependant complexe. Le corps médical français rejoint la position de la Halakha . Il n’y aurait donc pas de raison majeure de s’opposer à une greffe dans la situation française. C’est au contraire un acte noble et donc une forme de Mitsva que d’accepter de donner ses organes et ceux de nos proches en cas de décès accidentel le permettant, car comme le dit la mishna (san 4.6) "Qui sauve une vie sauve le monde". (Puissions nous être épargnés d’une telle situation...)
Ajout au résumé du Responsum du rabbin Golinkin, par Yeshaya Dalsace et Rivon Krygier.
Lecture complémentaire
Le sujet est bien évidemment très complexe. Voici de la littérature supplémentaire.
La Teshouva en hébreu du rav Golinkin dans laquelle il développe plusieurs arguments et donne de nombreuses références.
Voici maintenant deux responsa en anglais, celle du rabbin Prouser et celle du rabbin Roth. Ces deux responsa émanent du CJLS .
Le responsum du rabbin Prouser porte sur le don d’organes après un décès dans le cadre du judaïsme américain.
Aux USA, le consentement doit être obtenu par une carte de donneur dûment remplie par le donneur (de son vivant) et non par sa famille. C’est pourquoi le rabbin Prouser incite à remplir une carte de donneur, ce qui n’est pas nécessaire dans le cadre de la législation française.
Le responsum du rabbin Roth porte plus particulièrement sur le don volontaire d’organes (rein, moelle osseuse, sang,...) entre personnes vivantes.
Pour accéder au responsum du rabbin Roth (en anglais), il faut ouvrir le lien suivant. Ce document très complet ne fait pas moins de 125 pages ! Le rabbin Joël Roth est une des sommités halakhique du mouvement Massorti américain.
Messages
[|Don d’organe|]
J’ai lu avec intérêt la responsa du Rabbin Golinkin (ou du moins son résumé). Je souhaiterai faire certaines remarques dont la première me semble urgente.
Psak non applicable en France
Ce Psak , s’il est vrai, n’a été formulé par son auteur que vis-à-vis de personne habitant en Israël, et, si et seulement s’il est possible de s’assurer que le prélèvement se ferait selon les critères énoncés dans la responsa comme dans les hopitaux Haddasa et Ein Karem (il n’y a pas que deux hopitaux en Israel !) (hors à ma connaissance cette carte de donneur ne donne pas la possibilité d’énumérer de conditions precises (sauf définir quel organe la personne accepte de ceder.!! ) donc même en israel je ne vois pas la possibilité de porter une telle carte selon le devellopement de la responsa ?)
De plus, en France (et partout ailleurs) il faut tenir compte d’un autre paramètre ; le receveur est sûrement non-juif auquel cas la règle de Pikouah Nefech n’est plus applicable ! (en fait pour une greffe de reins on ne connaît le receveur qu’après la greffe, une condition qui permet l’augmentation des donneurs pour des raisons contextuelles précises)
Live let live and live with.
La tora interdit le suicide certes, mais dans un cas ou le donneur va, selon les statistiques médicales, mourir dans l’heure qui suit. N’est il pas bon de prévaloir des année de vie de celui qui recevrai l’organe au quelques heures d’un donneur déjà en état comateux.
Une mère ne peut-elle pas préférer donner sa vie (ces quelques derniers instants) pour sa fille qui ne fait que ses premiers pas, et même si la mère est inconsciente pour nous l’affirmer, ne pouvons nous pas le deviner ?
Probleme au niveau du receveur.
probleme supplementaire
Il est n’est pas superflu de mentionner qu’il existe un problème sérieux au niveau du receveur en fonction de la technique de la greffe. Au u.s.a. on utilise fréquemment une technique « by pass » ou le système cardio-vasculaire du patient est maintenu momentanement uniquement par des machines, durant la transplantation (l’échange de cœur) le chirurgien libère le malade de son cœur défectueux et par cela prépare la place pour le nouveau cœur. Le problème est de savoir s’il est permis d’ôter le cœur défectueux (mais opérationnel à l’instant) n’est-ce pas lui retirer la vie ?
Je me demande…
Dans le cas ou il est permis de faire une greffe d’organe, un docteur juif doit-il avoir la permission du donneur ou de n’importe quel membre de sa famille ou même si le potentiel donneur refusait de son vivant le prélèvement (si un receveur juif est présent) . Le corps d’un homme lui appartient-il après sa mort ? même dans le cas ou ce docteur opère dans un hôpital ou la réglementation ne permet pas de prélèvement sans l’accord préalable du donneur, doit-il tenir en compte ce règlement ou doit-on appliquer la règle de « pikouah nefech dohé hakol »
Remarque générale.
Il me semble que cette responsa fait l’économie de beaucoup de détails important ! (Même son résumé, intéressant au niveau de l’apport considerable de connaissance, reste très théorique. Sur le terrain, il y a de nombreux paramètres qui ne sont connus que dans le domaine hospitalier (et qui évolue…) qui rentrent en ligne de compte. Ils ont été, purement et simplement, omis !?
Je trouve la conclusion (n’ayant lu qu’un résumé, bien entendu) assez attive…
pas vous ?
Dr Gadget
Merci de vos questions pertinentes.
Il est vrai que ce Responsum n’est qu’un résumé. Le sujet est de toute façon complexe et demande une bonne connaissance de chaque cas clinique.
Voir la littérature plus complète en anglais et hébreu en pdf et le complément apporté à l’article.
Beaucoup de gens croient que le judaïsme est contre la greffe, c’est faux. Il existe de fortes réticences psychologiques nourries de superstitions (« vais-je ressusciter sans reins… ? ») qu’il faut combattre.
Or le problème est crucial : entre 80 et 100 personnes meurent chaque année en Israël, à cause du manque de greffons de reins. ().
La question de l’identité de la personne ne devrait pas rentrer en ligne de compte. La vie d’un être humain est une valeur en soi, qu’importent son identité et sa religion. Il est même totalement indécent de regarder l’identité du receveur de la greffe avant d’autoriser celle-ci. Il est d’ailleurs courant en Israël que les dons d’organes transcendent le conflit. C’est bien là, la force de la médecine et il serait éthiquement scandaleux d’établir des critères de cet ordre. Je vous signale que c’est également le cas pour la transgression du shabbat pour sauver une vie. Ce point de vue n’est peut-être pas partagé par certains rabbins , de même que le Vaad ha-Islam n’autorise pas le don d’organes de musulmans à des juifs. Pour nous un tel point de vue discriminatoire, accordant plus d’importance aux organes d’un certain mort qu’à la vie d’un vivant d’une autre religion, est absolument inacceptable et représente une profanation du Nom divin (Hilloul Hashem) et va donc à l’encontre des bases même de la pensée religieuse et des valeurs les plus basiques du judaïsme.
La définition de la mort, longtemps d’après le cœur, se fait d’après l’encéphalogramme de nos jours.
En Israël, cela peut se faire dans tout hôpital. La définition clinique de la mort reste je crois la même. Même si certains hôpitaux sont sous la surveillance plus directe de comités d’éthique rabbiniques.
En France, pour un juif, il n’y a pas de raison de s’opposer à une greffe d’organe. Bien au contraire c’est un geste louable et plein de sens.
Yeshaya Dalsace
Voici un triste cas qui vient illustrer le débat.
Le petit Motl Brody, 12 ans, dont les parents juifs orthodoxes refusaient de débrancher le soutien artificiel à la vie alors qu’il était considéré en état de mort cérébrale, est décédé samedi, avant que la justice ne se prononce, a indiqué l’avocat de la famille.
"Motl Brody est décédé samedi peu après minuit, et dimanche l’hôpital a retiré sa requête dans ce procès. L’audience de mercredi n’a pas eu lieu", a indiqué à l’AFP Jeffrey Zuckerman, l’avocat de la famille Motl, alors qu’une audience en justice mercredi devait déterminer si l’enfant serait débranché.
Le petit garçon, dans le coma depuis le mois de juin après l’opération d’une tumeur cancéreuse au cerveau à l’hopital des enfants de Washington, avait été déclaré en état de mort cérébrale par le Children Hospital le 4 novembre.
Mais la famille très pratiquante considérait qu’il était encore vivant car, selon leur religion, la mort est déterminée par un arrêt du coeur et des poumons et non par l’absence d’activité cérébrale.
Devant un tribunal local de Washington, l’hôpital avait demandé il y a deux semaines à être autorisé, malgré l’opposition des parents, à débrancher la ventilation de l’enfant et cesser l’administration de médicaments pour soutenir son coeur.
La famille Motl, qui avait sept enfants, vit à Brooklyn (New York) et applique les prescriptions religieuses juives "halakha " qui "définissent la mort comme une cessation irréversible des fonctions circulatoires et respiratoires".
Notre point de vue
Ce triste cas illustre bien le débat sur la définition de la mort clinique. Pour les parents qui suivent les décisions les plus littérales, c’est à dire, celle classique de la respiration et pulsion cardiaque (même maintenue artificiellement) l’enfant était vivant. Nous n’aurions pas tranché en ce sens. Tout comme le rabbinat israélien. pour nous la mort cérébrale est la mort effective.
On voit par cet exemple que l’on peut comprendre la halakha différemment et que les conséquences de l’interprétation sont très fortes.
Il y a donc débat et le point de vue des parents est respectable, mais irréaliste à nôtre avis.
Yeshaya Dalsace
Bonsoir Dr Gadget,
Pourriez-vous s’il vous plaît indiquer vos sources halakhiques selon lesquelles le Pikoua’h nefesh ne s’applique qu’à un Juif ? C’est bien la première fois que j’entends cela...
Merci
Cher Gershom
Voici la source halahique : (et personnes n’a jamais discuté sur cela à ma connaissance !) qui permet de transgresser un interdit de la Tora pour sauver un juif mais pas pour sauver un non-juif.
Choulhan Arouh’ orah Haim (hilkot shabbath) Siman 329 Alinéa 2. (et personne n’en discute)
Cela est tire du Talmud yoma 84b en bas de page (et personne n’en discute…)
Vous trouverai la-bas les deux halahot simultanément.
La seule fois on trouve une permission, et cela est très très discuté, c’est si un docteur juif refuse de traiter un non juif car il doit transgresser shabbat par exemple et cela causerai des ennuis à la communauté, il y a un avis qui permet en stipulant que l’acte à une valeur de « melakha cheena tseriha légoufa… »
Que D. nous préserve d’être dans de telles conditions…
Dr Gadget.
pikuah nefech chel goï... Quelle époque, où une telle question se pose...
Reprenons votre exemple du hilloul chabbat le-hashtalat nokhri. Ce n’est pas le lieu ici d’en retracer l’historique et l’inventaire juridique. Je relèverai simplement le fait que deux types de considérations halakhiques peuvent entrer en ligne de compte dans la levée de l’interdit. La première obéit à la logique utilitariste et pragmatique consistant à dire que la non-assistance à personne en danger, rendue publique, aurait des conséquences désastreuses : représailles, etc. Et donc que par horaat chaa (mesure temporaire), michoum éva (en raison de la menace), ’afin de sauver la vie des juifs… et afin qu’ils puissent malgré la rupture du chabbat, observer à l’avenir "hallel alav chabat ahat kede che-yichmor chabbatot harbé" (Mekhilta de-rabbi Yichmael, Ki tissa), on se résout à permettre l’intervention...
C’est la logique de nombreux décisionnaires contemporains… La seconde considération obéit à la logique qui fut celle du Meiri , Ovadia mi-Bartenoura, etc. en son temps, estimant que les nokhrim que nous connaissons ne sont plus réductibles aux catégories de ovdé avoda zara ! De la sorte, c’est le principe que chaque être humain est créé à l’image de Dieu qui reprend la préséance. De considérer ensuite sur la base de cette dignité acceptée que toute vie humaine a préséance sur l’observance du chabbat, et que cela correspond à un idéal messianique de sanctification du nom de Dieu, de paix universelle, un "michoum darké chalom" au sens large.
Le Maharatz Hayot (Zvi Hirsh Hayes, Tiferet Israël dans Atèrèt Tsvi) a conclu à partir du Meiri (qui ne le dit qu’implicitement, Beit ha-bahira, Yoma 84b, pikouah nefech) qu’il convient de lever les interdits du chabbat pour sauver la vie de musulmans et chrétiens. Ce n’est pas moins halakhique.
A mon humble avis, cela l’est même infiniment plus. Mais cela passe par une réévaluation "ontologique" du statut du nokhri, ce qui nécessite une prise en compte des paramètres sociaux, un examen des réalités et une mise en perspective des règles précédentes et prévalentes, et une certaine vision universaliste des temps ultimes... Voir ce qu’écrit le rav David Haïm ha-Levi, jadis grand rabbin de Tel-Aviv dans son Darké chalom be-yahassim bein yehoudim..., Thoumin 9) qui justifie la levée de nombreux interdits relatifs aux non-juifs sur la base de cette réévaluation.
Rivon Krygier (rabbin massorti Paris)
Cher M. Le docteur Gadget, (???)
Permettez-moi d’exprimer d’abord mon étonnement qu’un médecin (si vous l’êtes) se pose ce genre de questions !
Le texte que vous citez du Shoulkhan Aroukh ne dit pas cela, il se préoccupe d’une question de proportions et de probabilité qu’il faut comprendre dans le contexte de la discussion talmudique (traité Yoma).
Depuis toujours, les juifs sont continuellement venus en aide des non-juifs et ont transgressé la Tora pour cela (sous divers prétextes juridiques : eiva, darkey shalom, kidoush hashem…). J’appartiens moi-même à une unité de Tsahal qui a été envoyée à plusieurs reprises, y compris le shabbat, dans des pays étrangers frappés par des tremblements de terre. Il n’a jamais été question de venir sauver des juifs, mais bien de porter secours à des populations dans la détresse, pour la plus grande gloire d’Israël.
Aucun rabbin sérieux ne s’y est opposé.
Dans le même ordre d’idée, tout le système médical israélien, civil et militaire, ne renonce à aucun effort pour prodiguer, le shabbat, des soins à qui que ce soit, y compris les prisonniers de guerre pourtant ennemis déclarés. Ce n’est cependant pas les juifs pratiquants qui manquent dans ce domaine médical.
Le texte talmudique, repris bien évidemment par les différents commentateurs, dont le Shoulkhan Aroukh , expose un débat sur la valeur de la transgression. Ce débat mériterait d’être expliqué dans un cadre plus large. Néanmoins, de facto, Halakha lemaassé, le point de vue unanime implique la transgression de la Tora pour sauver une vie humaine, quelle qu’elle soit.
Si ce n’était pas le cas, si effectivement les juifs pratiquants refusaient de transgresser shabbat pour sauver la vie des non-juifs, ou de juifs non pratiquants, le judaïsme serait alors une monstruosité et une religion à combattre, par les juifs eux-mêmes. Un judaïsme qui prônerait un tel point de vue ne mériterait en rien notre estime et notre respect. Il y aurait l’obligation morale élémentaire de combattre la Tora comme système inhumain et obéissant à une divinité cruelle, injuste et sanguinaire. Ce serait le pire des Hilloul Hashem. La transformation du Dieu infini en Moloch.
Le grand malheur de cette génération est la confusion entre certains débats théoriques cherchant à pousser le plus loin possible un raisonnement, parfois jusqu’à l’absurde, tel qu’il en existe dans le Talmud , avec une volonté divine clairement exprimée. Cet intégrisme discrédite profondément le judaïsme. Il en est de même pour une lecture littéraliste du Shoulkhan Aroukh en pensant que cette œuvre serait indépassable, même si elle reste de référence.
Nous touchons ici à un problème majeur de l’orthodoxie stricte, sa difficulté à remettre un texte dans son contexte historique ou à en dépasser la lettre, en tout cas au niveau basique. Les grands décisionnaires savent en général prendre une certaine distance.
Sans rentrer dans les détails techniques de la discussion nous rappelons seulement un principe élémentaire : « Ne pas faire à l’autre ce que l’on ne veut pas qu’on vous fasse » (définition de la Tora par Hillel).
Comment pourrait-on admettre, selon ce principe de base l’idée même de soins unilatéraux ou de dons d’organes dans un seul sens ! Il va de soi que nous avons affaire ici à un principe de base de solidarité humaine, tel qu’il est exprimée dans le serment d’hippocrate tout comme dans celui de Maimonide . Si ce principe est compatible avec le respect de Shabbat, c’est mieux, sinon Shabbat ne saurait être l’autel du sacrifice de notre humanité et avec elle de l’idée même de Dieu d’Israël.
Yeshaya Dalsace
J’ajoute pour le lecteur averti la référence du rabbin Feinstein (OH 4 - 79) autorisant toute transgression du shabbat (y compris de la Tora) même dans le cas d’un doute (donc n’importe quel soin). Il se repose sur le principe d’eiva qui ne nous satisfait pas ontologiquement, mais autorise clairement la transgression.
Yeshaya Dalsace
Cher M.
Merci de votre analyse…
J’y réponds brièvement…
Vous ecrivez :
Permettez-moi d’exprimer d’abord mon étonnement qu’un médecin. (Médecin ?! Docteur, nuance !) (Si vous l’êtes) se pose ce genre de questions !
En fait, je suppose que parce que vous ne l’êtes pas (vous) que vous ne vous posé ce type de questions. Si vous étiez un médecin unique dans votre immeuble et que l’on faisait appel a votre gentillesse pour venir transfuser du sang un shabbat sur deux vous poseriez beaucoup de questions !
Mais comme je l’ai écris au rabbin Krieger, vous avez sorti ma source de son contexte, car je l’utilisais pour mettre en valeur l’idée qu’en France le pask du Rabbin Golinkin n’est pas valable (d’ailleurs, je ne serai pas étonné qu’il en pense de même !)
Vous ecrivez : le choulkhan aroukh se préoccupe d’une question de proportions et de probabilité qu’il faut comprendre dans le contexte de la discussion talmudique (traité Yoma).
La on ne s’est pas compris : il y a dix personnes un juif et neuf non’ on peut transgresser. S’il y a que dix non-juif, il est clair qu’on ne peut transgresser.
Vous avez toutefois raison qu’il y a un paramètre de eva et représailles qui est hors contexte du shoulhan arouh et qui est applicable dans certain cas (pas dans celui des prelevement d’organe comme je l’ai écris au rabbin Krieger) je l’ai moi-même mention !!!
Par contre pour darkei chalom et kidouch hachem (sans danger aucun…) je doute fort que cela soit permis (si vous pensez que c’est pour la gloire d’Israël que l’on a permis à votre unité d’aller secourir des pays étrangés, excusez-moi, mais je pense que vous vous mettez le doigt dans l’œil, et que vous ne comprenez rien à la stratégie politique (c’est malheureux mais c’est comme ça). Si des rabbins sérieux l’ont permis c’est aussi sur le compte de représailles au sens large du terme.
(Aucun rabbin sérieux ne s’y est opposé. Ça c’est pas votre style de donner des notes aux gens à travers leur façon de pensée !!)
Quant au système médical israélien, il est à 93% laïc, et de toute les manières le paramètre de eva et représailles au sens international, reste valable.
…le point de vue unanime implique la transgression de la Tora pour sauver une vie humaine, quelle qu’elle soit…
Petite rectification pas bien méchante :
…le point de vue unanime implique que la Tora exige de l’homme de sauver une vie humaine, quelle qu’elle soit…il n’y a pas de transgression permise (outera/dehouia, pour le lecteur initié)
le judaïsme serait alors une monstruosité et une religion à combattre, par les juifs eux-mêmes.
: « Ne pas faire à l’autre ce que l’on ne veut pas qu’on vous fasse » (définition de la Tora par Hillel). (vraiment faible comme remarque !!!)
Enfin…
Rechit goyim amalek veaharito adé oved !
Timhé et zehere amalek mitahat hashamaim !
Mahachefa lo tehayé !
Si vous croyez en Dieu croyance au sens de fidélité (pas au sens "je crois que sarko va passer !!") vous comprendrez facilement qu’il n’y a pas lieu de monstruausité, car de toute les manières l’homme ne reçoit en temps T que ce que Dieu veut qu’il reçoive.
Mais si vous trouvez ça monstrueux, alors il y a beaucoup d’autre chose dans le monde qui vous pousserez a ne plus croir en Dieu ??
Le Tsunami par exemple, ainsi que toutes les catastrophes naturelles !
Avez vous une réponse à cette dernière question ? ça m’intéresse…
Il en est de même pour une lecture littéraliste du Shoulkhan Aroukh en pensant que cette œuvre serait indépassable, même si elle reste de référence.
Le Rav Karo n’a rien inventé il a codifié et organisé il n’y a donc rien à dépasser…(cf ma réaction au Rabbin krieger)
solidarité humaine : beau discours… pourtant vous n’avez pas encore votre carte de permission de prélèvement je suppose (j’en ai vraiment pas la preuve mais vous comprenez ce que j’insinue…)
J’ajoute pour le lecteur averti la référence du rabbin Feinstein (OH 4 - 79) autorisant toute transgression du shabbat (y compris de la Tora) même dans le cas d’un doute (donc n’importe quel soin).
Donc n’importe quel soin !! dans le cas d’un doute de danger de mort ou de la perte d’un membre du corps si je ne m’abuse pas !!
Dr Gadget.
(P.-S. Ne prenez pas au sérieux tout les piques que j’envoie c’est juste pour la touche d’humour que j’espère vous savez apprécier)
Cher M. le Rabbin .
Il est vrai qu’il serait inapproprié de retracer l’inventaire du problème et de ses solutions. Cependant je souhaite répondre à votre réaction (qui montre du respect même envers les gens qui ne pensent pas comme vous, tout à votre honneur).
Vous donnez deux considérations pour lever l’interdit. Je réponds donc par ordre (sans les mélanger !).
Première considération.
L’idée de « oraat chaa »
Vous avez bien raison, cependant, comme vous le soulignez vous-même cela n’est permis que « par crainte de représailles ’afin de sauver la vie des juifs… et afin qu’ils puissent malgré la rupture du shabbat, observer à l’avenir "hallel alav chabat ahat kede che-yichmor chabbatot harbé" » hors le contexte de ma première réaction était sur la responsa du Rabbin Golinkin permettant le port d’une carte de permission de prélèvements d’organes en utilisant l’idée de « pikoua’h nefech ». Sur cela nous avons objecté qu’en France c’est idée n’était pas valable puisqu’il s’agissait de Goyim .
Dans ce contexte ou la majorité des français n’autorise pas de prélèvements, je ne pense pas qu’il y a lieu de craindre des représailles…
Seconde considération.
les nokhrim que nous connaissons ne sont plus réductibles aux catégories de ovdé avoda zara.
Pourquoi ? les idolâtres eux sont-ils ne sont pas créés à l’image de Dieu !!
La raison pour laquelle on transgresse chabbath dans un cas de pikouah’ nefech est entre autre sur la base de la Mekhilta que vous avez brièvement mentionné. Cette dernière nous donne une information assez claire quant « au but de la manœuvre » je cite : « kede che-yichmor chabbatot harbé » ceci n’est valable que pour un juif.
Nombreux sont les décisionnaires, à toute les époques (y compris à l’époque de la guemara qui utilise le terme kouti au lieu de nohri et la censure talmudique n’est pas un secret pour vous m. le Rabbin ) qui par crainte de représailles ou de eva sont forcés, à juste titre de permettre de façon générale de transgresser shabbat pour sauver …un juifs.
Dernières remarques (the last but not the list)
Vous parlez de : réévaluation "ontologique" du statut du nokhri qui nécessite une prise en compte des paramètres sociaux…
Avant de réévaluer, il faut pouvoir evaluer les interdit et l’environnement social dans lequel ils ont été instauré. Je doute que nous ayons les moyens d’apprecier les condition originels serieusement pour pouvoir les réévaluer.
Le talmud meguila 2a nous enseigne un Bet Din ne peut abolir les institutions d’un Bet Din, le précédent, si et seulement s ‘il est plus nombreux et plus intelligent.
1. Pourquoi le second Bet Din veut-il abolir l’institution du premier ? Pas pour rien !! Mais parce qu’il considère à juste titre (pas comme ces obscurantistes qui pensent que le monde n’évolue pas et ne doit pas changer) , qu’il y a des raisons valables en temps T, qui n’existaient pas à l’époque ou l’institution a été mise en vigueur. Et pourtant, le talmud nous enseigne que le second Bet Din n’est qualifié pour le faire que s ‘il est plus nombreux et plus intelligent.
2. Pourquoi cette règle existe t-elle ? pourquoi les anciens ne donnèrent pas le droit (ou plutôt le retirèrent) au nouvelle génération d’abolir, s’il y a lieu, des institution dépaçées (périmées) ? pourquoi les nouvelles génération de bet din (sauf les karaïm bien sur) acceptere cette regle étrange ? cela me prendrai du temps de vous l’expliquer mais je me ferai unplaisir de le faire si cela vous interresse… ?
J’ai eu plaisir à vous lire, j’en espère autant pour vous !
Affaire à suivre.
Dr Gadget.
Cher Docteur,
Vous soulevez plusieurs problèmes techniques qu’il est fastidieux de traiter dans un forum.
Il y a avant tout la question du rapport au texte. Comment interpréter un texte, s’en nourrir et s’en inspirer, sans pour autant être enfermé dans sa lettre. La question que vous soulevez du Beit Din qui peut annuler ne me semble pas approprié ici. Il n’y a rien à annuler, il y a à interpréter. Ce que font tous les décisionnaires sur la question, à commencer par Feinstein , cité plus haut.
Si vous êtes un homme de la Halakha , vous êtes censé accepter comme légitime l’autorisation (le devoir) de transgresser le shabbat, donnée à plusieurs reprises par de nombreux rabbins . Je ne vois pas trop l’intérêt de revenir sur toutes ces discussions.
Comme toutes les grandes questions posées au judaïsme, elles doivent se prendre à un double niveau. Il y a l’aspect technique de la discussion, dans lequel on doit se battre avec une série de sources textuelles afin d’arriver à un certain endroit. Il y a enfin l’aspect philosophique et éthique du problème, le niveau de la métahalakha. La question demeure de savoir quel niveau à la priorité, lequel est soumis à l’autre ? On pourrait en discuter longtemps. Mais pour ma part, il me semble évident, tout comme à Hillel et de nombreux autres, que l’aspect philosophique l’emporte et que la casuistique doit être au service de la philosophie et de l’éthique et non le contraire. C’est pourquoi mon argument invoquant les paroles d’Hillel ramène le débat à son point fondamental. L’aspect technique de la casuistique est beaucoup moins intéressant, même s’il demeure important dans la continuité jurisprudentielle du judaïsme. Il comporte surtout le risque de transformer un système juridique quel qu’il soit, le judaïsme en l’occurrence, en un système Kafkaïen de la pire espèce.
Sur la question de la grandeur du tribunal et de son intelligence. À plusieurs reprises dans l’histoire juive, on lui a opposé un autre principe « chaque tribunal vaut pour sa génération » et on s’est permis plusieurs changements. De toute façon, il est évident que nous avons aujourd’hui des données et des points de vue sur toutes sortes de problèmes, à commencer par celui que vous soulevez, qui rend notre « intelligence », notre sagesse « hokhma » d’une autre nature ou d’un autre niveau que celle de nos anciens. Cela ne veut pas dire que nous soyons plus intelligents. Nous nous plaçons dans une autre perspective.
On ne peut vivre enfermé dans des conceptions qui ne correspondent plus à notre réalité sous le seul prétexte que nous sommes inférieures en nombre et en intelligence… Cette position est totalement mortifère.
Le rapport aux païens entretenu par les sages du talmud , n’a strictement rien à voir à mon rapport au reste de l’humanité pour laquelle je n’éprouve aucune hostilité. C’est un fait incontournable.
Un tsunami est le fait de la nature. Il n’a aucun sens, sinon la nécessité des plaques tectoniques de se heurter entre elles. Je n’ai strictement aucun enseignement moral à en tirer, sinon la solidarité humaine après la catastrophe. Il ne change absolument rien dans mon rapport au divin. Le discours théologique juif se veut par contre un rapport direct au divin et une mise en sens de celui –ci. C’est donc au nom du divin lui-même que certains discours sont inacceptables. En tant que juif, jetai la responsabilité d’un discours, je ne peux par contre rien face aux catastrophes naturelles.
Être juif suppose non pas une fidélité textuelle absolue, nous ne sommes pas des perroquets, ni des automates. Cela suppose un dialogue fructueux et créatif avec le divin au travers du texte.
C’est pourquoi, au-delà même du jeu de ping-pong des citations talmudiques, compte avant tout le principe éthique que nous défendons.
On peut démontrer beaucoup de choses à coups de citations, voire même une chose et son contraire… La qualité d’un Possek ne tient pas à la seule virtuosité talmudique, mais bien à sa capacité de faire avancer le droit dans une direction qui donne sens et serve le but ultime de tout cela : le service de Dieu, en l’occurrence « ne pas faire aux autres, ce que nous ne voulons pas subir ». Ce n’est pas « facile », c’est l’essence même de la Tora. Hillel n’a pas parlé en vain.
Si un médecin juif est trop souvent dérangé le shabbat, soit il change de métier, soit il change de quartier… Il peut toujours se consoler en se disant que chaque transgression lui est contée comme mitsva !
Je pense très sérieusement qu’il y a une obligation à donner son corps dans le triste cas où le problème se présenterait. J’ai personnellement signé une carte de donneur en Israël, en France je n’en ai pas besoin, mais ma famille connaît mes positions et les partage.
Je finis en reprenant les termes d’un article sur Lévi-Strauss sur ce même site.
2Regard sur l’Autre2
À l’heure où nous fêtons les cent ans de Claude Lévi-Strauss, il est bon de lui rendre hommage. A priori le judaïsme ne l’occupe guère. Cependant, Lévi-Strauss nous a appris à regarder les « sauvages » avec un regard neuf, un regard de respect.
Un des problèmes du Judaïsme classique est son manque de considération, voire son rejet brutal et méprisant, des cultures dites « païennes », celles qui n’entreraient pas dans la catégorie des « fils de Noé ». Certains textes de la tradition considèrent que le païen, regardé comme immoral, ne mérite pas le respect absolu dû à la personne humaine. Il y a bien entendu dans ces textes une dimension polémique à remettre dans son contexte historique face à l’impérialisme pagano-romain. Mais il y a aussi une question sur l’humanisme de l’autre qui hante la pensée juive.
Lévi-Strauss nous apprend à considérer avec un regard nouveau les cultures « autres », à les considérer, à les comprendre et les estimer pour la richesse qu’elles représentent.
Un juif contemporain, fort des travaux de Lévi-Strauss et de l’anthropologie moderne, ne peut plus accepter de suivre à la lettre certains textes du Talmud polémiques envers le « païen ». Nous savons aujourd’hui que celui-ci n’est pas moins moral que nous et que son système de croyance, pour étrange qu’il soit, ne manque pas de sens et mérite la considération.
Le Rabbin Meiri (13ème siècle) considérait que les non juifs qui l’entouraient étaient « civilisés » dans la mesure où ils avaient adopté le christianisme et en cela méritaient un respect total. Lévi-Strauss nous apprend que le problème n’est pas forcément chez le « païen » mais dans le regard que nous portons sur lui.
Plus besoin d’attendre que le « païen » entre dans le « chemin de la vérité », c’est-à-dire une forme de monothéisme moral, pour mériter notre considération. Le « sauvage » n’en est plus un. La catégorie du « ‘akoum », chère au Talmud , doit être repensée et ne saurait s’appliquer pour nous qu’à des civilisations fondamentalement mauvaises et à leurs seuls adeptes militants, le nazisme en demeurant la plus terrible incarnation.
Les textes du talmud restent pertinents sur ces questions par les pistes de réflexion qu’ils soulèvent, mais le champ de leur interprétation s’est considérablement élargi. Notre regard n’est plus le même.
Yeshaya Dalsace
Cher rabbin .
Je vous remercie pour vos réponses, j’ai l’impression que le débat progresse (lentement mais sûrement)
(J’ai souvent eu l’impression que vous glissiez de la plate-forme du débat dans cette réponse à mon mail ou vous disiez que je présenté le courant orthodoxe , oui je le representé mais j’amené à mon gout, des idées appuyant ma conception des choses. C’est domage que vous n’avez pas trouvé important de vous en occupé !)
Vous écrivez : Il y a avant tout, la question du rapport au texte. Comment interpréter un texte, s’en nourrir et s’en inspirer, sans pour autant être enfermé dans sa lettre.
Nous sommes tous d’accord sur le principe ! mais comment s’en inspirer, la est le probleme si vous acceptez la pluralité juridique en temps T, alors vous perdez toutes valeurs de transmission orale et par déclaration de « Tora shébéal pé ».
Hors je croyais que le courant massorti suivait la tora orale (pas comme les Karaïm) ?
Vous écrivez : Mais pour ma part, il me semble évident, tout comme à Hillel et de nombreux autres, que l’aspect philosophique l’emporte et que la casuistique doit être au service de la philosophie et de l’éthique et non le contraire.
Quel rapport à Hillel la dedans ? Vous confondez législation (shamaï) et éducation (Hillel) . De plus dans tout le talmud (si cela a une valeur pour vous, je n’en suis plus sur, veuillez m’informer svp) qui est bien fourni de divergence entre bet-shamaï et bet-Hillel, on ne trouve jamais à la source de leur débat une divergence de priorité éthique ou casuistique. C’est toujours dans la casuistique que tout ce joue, dans un premier temps. En suite tout le monde sera d’accord pour adapter et conjuguer cette Halaha en fonction du moment.
Vous écrivez : Il y a l’aspect technique de la discussion, dans lequel on doit se battre avec une série de sources textuelles afin d’arriver à un certain endroit. Il y a enfin l’aspect philosophique et éthique du problème, le niveau de la métahalakha. La question demeure de savoir quel niveau à la priorité, lequel est soumis à l’autre ? On pourrait en discuter longtemps.
Je crois que c’est la le point crucial du débat… c’est sur cela que nous devrions nous foccusser. Voici mon avis sur le problème je serai ravi de connaître le votre.
Ethique et philosophie sont aux cœurs de toute les cultures. Elles prennent une forme et une aspect différents, en fonction « du besoin » de cette société.
La Tora et la halaha est sensé être le point de départ de la vie de chaque juif. Car en fait, cette Tora n’est autre que la volonté divine !
D’elle découle une philosophie et une éthique « extra temporel » (adaptable à toutes les époques). Cela ne convient pas toujours à une personne vouant se mélanger au monde extérieur, c’est vrai (on ne peut pas manger au resto ensemble…) cela vient du décalage entre l’ethique absolue (mamlekhet koanim végoy kadosh, ce n’est pas une médaille qui nous est offerte mais un contrat de responsabilité) et l ‘éthique relative créée par un besoin de nature physique ou intellectuel Qui existe chez tout homme depuis la faute d’Adam harichon.
Au fait, si c’est l’aspect ethique qui prévaut pourquoi Golinkin ecrit des pages et des pages, il y a un chemin plus court. Pourquoi ramener les paroles du rambam alors qu’ils ne correspondent pas à notre génération ?
Vous ecrivez : À plusieurs reprises dans l’histoire juive, on lui a opposé un autre principe « chaque tribunal vaut pour sa génération » et on s’est permis plusieurs changements.
1. Vous sortez du contexte ! (iftah bedoro kechmouel bedoro !!)
2. On ne s’est jamais permis de changement sur cette base la ! (Attention ! Ne me dites pas que vous (massorti ) oui ! Sinon vous n’êtes plus dans le débat !)
Vous ecrivez : De toute façon, il est évident que nous avons aujourd’hui des données et des points de vue sur toutes sortes de problèmes, à commencer par celui que vous soulevez, qui rend notre « intelligence », notre sagesse « hokhma » d’une autre nature ou d’un autre niveau que celle de nos anciens .
D’une autre nature, certes, d’un autre niveau ? On voit que vous ne suivez pas des cours de talmud dans un cercle de haut niveau. (Vraiment désolé mais je ne sais pas comment le dire moins brutalement !)
vous ecrivez : Le rapport aux païens entretenu par les sages du talmud , n’a strictement rien à voir à mon rapport au reste de l’humanité pour laquelle je n’éprouve aucune hostilité. C’est un fait incontournable.
1. Vous éprouvez de l’hostilité envers les païens ? (plus qu’envers les arabes par exemple ? ou les bouddhistes ?
Les païns, dans ce passage du talmud , fait référence à tout non-juifs, comme vous le voyez dans les richonim appliquant cette guemara à leur époque.
Comment le talmud met donc « dans le même sac » un païen adulte et un païen qui vient de naître. De plus vous omettez (volontairement ?) la source de cette halaha qui est « transgresse un shabbat afin que tu en préserve plusieurs »
De plus les coutim étaient en très grande majorité asservis par les juifs.
Vous écrivez Un tsunami est le fait de la nature. Il n’a aucun sens, sinon la nécessité des plaques tectoniques de se heurter entre elles.
Par dela de la nature, le tsunami ou les attentat ont-il « un accord divin » de s’exécuter ou non ?
Si oui alors (selon vous) il y a monstruosité divine !!!??
Si non , faite le moi séavoir et on en discutera.
Vous écrivez Être juif suppose non pas une fidélité textuelle absolue, nous ne sommes pas des perroquets
Vous jouez sur les mots ?
Quel rapport avec des perroquets ?
Et ce je vous disez…
« Le code de la route, et le code civile ne suppose pas une fidélité textuelle absolue, nous ne sommes pas des perroquets… »
« Un juif contemporain, fort des travaux de Lévi-Strauss et de l’anthropologie moderne, ne peut plus accepter de suivre à la lettre certains textes du Talmud polémiques envers le « païen ». Nous savons aujourd’hui que celui-ci n’est pas moins moral que nous et que son système de croyance, pour étrange qu’il soit, ne manque pas de sens et mérite la considération. »
On voit que vous n’avez pas étudiez le talmud sérieusement…si vous l’aviez fait vous sauriez qu’il est impossible de comprendre de cette manière le texte, faites-le maintenant…
De tout temps le judaïsme à posé des barrières entre juif et non-juif (le soreg qui était la limite du terrain permis d’entrée au non juif, c’est d’ailleurs pour cela qu’il y ont fait 13 brèches.)
On n’a pas le droit de prêter avec intérêt à un juifs, à un goy on a le droit (lanohri tachih, laahikha lo tachikh)
Quand nos sages ont interdit de boire des boissons alcoolisées avec des non-juif, il ne s’agissait pas de nazi, de peur que l’on vienne à se marier avec eux !!
Je crois que vous regarder la religion comme une culture, et vous la trouvez dépassé. Vous oubliez, dans votre raisonnement, le but ultime de la Tora, et du monde tel qu’il transpire de la Tora même. Vous oubliez la notion de Néchama qui n’existe que chez le juif et pas chez le goy vous oubliez que casser cette séparation c’est mettre en danger vos enfants !!!
Votre approche manque de consistance. Vous ne pouvez espérer appréhender un message divin si vous lui enlever sa nature sainte et divine si vous la laissé à l’analyse de gens qui ne s’en préoccupe pas et pour qui n’importe que message éthique existant encore... (et ce n’est pas votre cas a mon avis...)
Shabbat, pas d’importance, taharat hamichpaha, dépassé, tefillin, laisse tomber...
C’est l’impression générale de ma lecture. Corrigez-moi !
Dr Gadget.
Cher M.,
Le mouvement Massorti est basée sur la loi orale, vous n’avez qu’à lire quelques textes pour le comprendre. Je ne vois vraiment pas ce que cela a avoir avec la notion du temps.
Hillel représente bien la législation (hilkhata kehillel). Les débats talmudiques, sous leurs aspects formels, sont toujours sous-tendus par des conceptions philosophiques et éthiques. Plusieurs écoles rabbiniques se plaisent à le faire ressortir, celle de Brisk notamment, mais également, plus accessible en français, les lectures de Lévinas (qui doit à la première).
Vos jugements à l’emporte-pièce sur mon niveau de Talmud ne m’intéressent absolument pas.
Dans l’ensemble, vous envoyez ce « débat » dans tous les sens.
« Shabbat, pas d’importance, taharat hamichpaha, dépassé, tefillin, laisse tomber… »
Totalement faux, donc un tissu d’idée reçues, d’affirmation de soi, de généralités… aucun intérêt à débattre dans ces conditions.
Sur la question du style d’une Teshouva , tout possek développe un argumentaire technique, parfois très long et fastidieux, mais toujours sous tendu par une métahalakha, un but idéologique ou philosophique d’arriver quelque part. c’était déjà le cas des discussions talmudiques, c’est également le cas des grands posskim actuels comme Moshe Feinstein ou Ovadia Yossef .
En cela Golinkin ne change en rien.
Tout cela pour une question de don d’organes ? Est-ce si gênant ? Pourquoi un juif instruit voit-il d’un si mauvais œil l’idée de sauver un être humain ?
Yeshaya Dalsace
Cher M Dalsace.
Cela fait longtemps que je lis avec curiosité les interactions des internautes sur votre website. Mon niveau de pratique est inexistant (et j’en suis bien triste) Ma seule famille qui côtoie de temps à autre la synagogue à Paris, est une de mes tantes à rue Copernic.
Cependant, je m’intéresse beaucoup à la religion et aux différents courants qui la composent. C’est peut-être simplement par curiosité intellectuelle ou bien en quête subconsciente d’un sens profond de la vie.
Dernièrement, ont fait surface, trois internautes qui ont particulièrement éveillé mon attention. Daniel (dommage qu’il à l’air de s’être retiré du débat) , Tournesol, et à ne pas manquer… Gadget (qui, à mon avis, n’est pas du tout docteur, et qui peut-être ne fait qu’un avec Tournesol (le professeur !))
Ces trois internautes, certainement ultra-orthodoxes , ont présenté avec lucidité l’idée de base de l’orthodoxie . Gadget a posé des questions subtiles sur le courant massorti qui font preuve de clairvoyance et d’intelligibilité. Il n’a pratiquement jamais reçu de réponses valables. Vous devriez relire vos réponses pour vous en rendre compte. Comme il le dit, vous glissez de la plate-forme du débat et c’est visible même pour un inexpert comme moi.
Il est claire que son niveau d’expression reste basic, mais cela met en exergue la clarté de son raisonnement (il aurait fait un excellent avocat, s’il ne l’est pas...) et nous informe de la qualité de ses connaissances, qu’y d’ailleurs, me dépasse totalement. Ses tournures de phrases, souvent incorrectes, lui donnent une forme de suggestibilité, de laquelle vous ne faite pas cas.
Vos réponses bien fournies, riches d’idées et toujours agréable à lire, n’apaisent pas le lecteur en quête de vérité. Elles ne font qu’affirmer avec véhémence la position du courant conservatif, sans pour autant le valider. Gadget met le doigt sur des failles dans votre raisonnement, et lu par une tierce personnes, on lui donnerait raison. (souvent la longueur de vos réponses affecte l’attention du lecteur)
M Krieger, que j’ai eu l’occasion d’entendre plusieurs fois, entre autre en table ronde sur la conversion (sujet brûlant...), à voulu s’introduire dans la discussion mais à bien fait de s’y résigner.
Je ne sais pas combien votre site est populaire dans le milieu conservatif français, mais vous devriez envisager d’effacer de telles réactions, elles ne vous sont que nuisibles.
Je ne m’empêcherai pas de mentionner que votre site est très agréable avec plein d’articles enrichissants et tout cela sous la direction du Rabbin Dalsaces.
Bravo et merci.
Kévin,
Faculté de droit.
Paris.
Cher M.
Merci de vos compliments,
Si vous ne connaissez pas bien le judaïsme, il ne tient qu’à vous de l’étudier et de le fréquenter. Il ne faut pas laisser le feu s’éteindre.
Sur le fond des réponses.
Vous devez comprendre d’abord que nous n’avons pas le temps, ni le rabbin Krygier, ni moi-même, de rentrer dans des discussions techniques trop poussées dans un forum (c’est la même chose sur tous les sites). De toute façon, cela demanderait de très longs développements qui ne sont pas la place d’un forum, mais éventuellement d’un long article. De plus, à quoi bon ?
Comme vous je doute quelque peu que Gadget soit effectivement docteur, mais qu’importe (sinon pour ses éventuels patients).
2Pourquoi je laisse ce genre de forum s’exprimer ?2
Premièrement je suis pour la liberté de parole, tant qu’elle n’est pas trop injurieuse. C’est ici limite mais tolérable.
Deuxièmement, cela permet de découvrir différentes opinions.
2Deux judaïsmes2
Sur le fond de mes réponses. Vous avez raison que je m’exprime par des généralités de principe face à des points de citations précis. Mais c’est tout à fait volontaire, car le problème soulevé mériterait un livre entier (le rapport des juifs aux autres et l’évolution des différentes positions sur cette question à travers l’histoire). Cela a déjà été le sujet de « exclusion et tolérance » de Jacob Kats (traduit en français), mais d’autres ouvrages également en anglais et hébreu.
Je trouve au contraire que se dégagent deux visions emblématiques et inconciliables. La nôtre qui s’attache à chercher une solution éthique, mais ne manque pas de traiter le détail des problèmes soulevés sans pour autant être piégé par la casuistique. J’ai par exemple déjà répondu par la référence à la teshouva de Moshe Feinstein (ultra orthodoxe ) qui se réfère au shabbat, mais pourrait très bien s’appliquer aux dons d’organes, toujours sur le principe de la eiva (provoquer l’hostilité de l’autre). Mon interlocuteur passe dessus rapidement, il veut absolument traiter le problème au seul niveau des références talmudiques qu’il ramène.
L’autre conception, la sienne, qui ne représente fort heureusement pas tout le monde orthodoxe , de laquelle se dégagent quelques traits assez désagréables. Premièrement un profond mépris pour tout ce qui n’est pas moi. J’ai forcément raison, mes maîtres sont les meilleurs par définition, l’opinion de l’autre ne peut être que mauvaise. La même personne n’aurait jamais critiqué de la même façon la teshouva de Moshe Feinstein ou d’un autre orthodoxe arrivant à la même conclusion. Deux poids deux mesures !
Une vision totalement caricaturale de l’interlocuteur d’en face que l’on aime à dénigrer en faisant croire que c’est un ignorant (par définition encore), un impie (il ne ferait aucune mitsva de base et inciterait les autres à ne pas le faire), etc… Un tissu de mensonges et de haine larvée en fausse volonté de dialogue.
2
Danger du fondamentalisme2
Je n’ai pas traduit exprès les citations en hébreu, mais tout cela sent quelque peu le racisme. Il se dégage une vision très malsaine de l’humanité : il y a les juifs et il y a les autres… et ils ne méritent pas le même traitement. Le tout soigneusement enrobé de citations sorties de leur contexte. Le problème est que le contexte existe et que certains principes ou raisonnements talmudiques tout à fait réels sont indéfendables pour quelqu’un qui adhère à une vision humaniste des choses. Nous défendons très clairement une telle vision et pensons que ces textes du Talmud doivent être lus dans leur contexte historique.
Comme mon interlocuteur n’est pas prêt à le faire… que pour lui, des phrases talmudiques d’une rare violence (il ne les a pas toutes citées, je pourrais lui en souffler quelques autres) semblent l’expression directe du verbe divin… il est évident que nous ne nous plaçons pas du tout sur le même plan.
Je trouve les propos exprimés ici, et ailleurs (voir dans le même style http://www.massorti.com/La-masturba...) extrêmement révélateur d’une dérive profonde d’une partie du monde juif orthodoxe actuel. Replié sur lui-même, manichéen, méprisant envers les autres, détaché de tout idéal humaniste, de toutes distances par rapport à ses propres sources textuelles, traitant la tradition juive comme une espèce de banque de données qu’il faudrait appliquer sans même se poser la question vers quoi cela nous mène… On voit quelqu’un qui connaît parfaitement les textes (certains en tout cas car le judaïsme c’est aussi autre chose), mais que l’esprit des textes ne traverse pas (à mon humble avis et pour reprendre une histoire rabbinique célèbre).
On met ici le doigt sur le plus grave défaut qui guette l’orthodoxie dogmatique : l’enfermement dans un dogmatisme et la réduction de la Tora à une sorte de prescription technique, de formule « magique » voire « scientifique », un univers kafkaïen dont les vrais enjeux éthiques auraient été éludés. La loi comme sujet d’idolâtrie… Je suis un peu sévère, mais c’est hélas ce qui ressort fortement de plusieurs interventions dans les différents forums. C’est également ce qui se dégage de différentes discussions que j’ai pu avoir dans ce monde-là que je connais assez bien. Ce n’est pas de l’ignorance, mais de la perversion du savoir. C’est bien pourquoi je ne suis pas orthodoxe .
Ce qui est également très révélateur, c’est de ne pas supporter qu’une autre possibilité de judaïsme puisse exister. Que des gens sérieux, pratiquants, conservant le shabbat, la nidda et les tefilines , donc apparemment orthodoxes , se permettent d’aborder certains problèmes avec un état d’esprit moderne.
2Ne pas se laisser piéger2
En ce sens, je ne crois pas du tout que ce forum desserve le mouvement Massorti , il montre très bien au contraire, d’un côté un souci éthique évident amenant des arguments solides, et de l’autre côté des personnes cherchant à mettre des bâtons dans les roues, par principe, tout cela pour prouver que les juifs ne de devraient pas donner leurs organes à des non-juifs !
C’est au contraire crucial de ne pas se laisser entraîner dans un tel débat technique qui voudrait que l’on revienne en arrière, vers une société qui ferait des différences d’exigence éthique entre religions et groupes humains. Il est très clair que le mouvement Massorti , comme une bonne part du monde orthodoxe (qu’il pose la question au rabbin Bernheim), s’y oppose fermement et considère qu’un homme est un homme, que sa vie représente une sacralité absolue et que les grands principes de solidarité humaine et de valeurs éthiques sont forcément réciproques, même si certains ont pensé ou pensent encore le contraire.
Il semble en effet que nous ne partagions pas les mêmes valeurs et c’est tout à l’honneur de notre position, non de la sienne.
Maintenant, chacun est libre de se laisser séduire par une casuistique malsaine et cherchant à ramener l’humanité à une jungle haineuse. Les musulmans ont leurs fondamentalistes, nous avons les nôtres, c’est la même maladie et à terme la même catastrophe. Je suis très fier de ne pas en faire partie et n’ai aucun complexe à refuser de me laisser piéger par un discours et des arguments qui sous prétexte de débat technique facilement décryptable, tend à faire de la Tora une monstruosité.
Que ces gens-là ne reconnaissent pas les autres et les considèrent comme illégitimes est plutôt rassurant pour nous que le contraire, car leur plaire serait très mauvais signe.
Quant à une réponse tout à fait précise sur un des points soulevés (à partir d’un célèbre texte talmudique de Yoma) : un éboulement aurait lieu dans un endroit où je sais pertinemment qu’aucun juif n’habite, je transgresserais le shabbat pour dégager les victimes sans aucune hésitation. Honte à celui qui ne ferait pas de même et bien triste son judaïsme, nous n’aurions assurément pas le même.
Yeshaya Dalsace
Cher Kévin
Bien que votre réaction ne me soit pas adressée, je ne peux m’empêcher d’y répondre.
Merci pour les compliments (sauf la proposition d’effacer mes messages du forum !! une quête de vérité ne permet pas une telle démarche !! mais souvent la découverte de la vérité est obligeante, plus encore dérangeant)
Ne généralisez pas votre appréciation à l’ensemble des internautes, elle dépend, je suppose de votre « background » (études de droit). Un étudiant en biologie (s’il en a…(à part moi…)) aura une vision très différente.
si vous voulez faire évoluer le débat ne vous gênez pas, je suppose que le Rabbin Dalsace en sera ravi…(bien que vous avez été assez brutale avec lui (et vous en vous en rendriez compte en vous relisant…)
Vous écrivez : Ces trois internautes, certainement ultra-orthodoxes , ont présenté avec lucidité l’idée de base de l’orthodoxie .
Ça sert à rien de classifier les gens par le courant qu’ils représentent. Je me contre-fiche des courants du judaïsme ce qui m’intéresse c’est de trouver le vrai sens de la vie quelqu’il soit et d’y adhérer coûte que coûte (on ne vit qu’une fois (en tout cas pas beaucoup plus !!)
Vous écrivez : Je ne sais pas combien votre site est populaire dans le milieu conservatif français, mais vous devriez envisager d’effacer de telles réactions, elles ne vous sont que nuisibles.
Vu le peu de réaction, il ne semble pas trop fréquenté. Mais si il permet à quelques juifs ici et la de se ressourcer… pourquoi pas ? Nous ne sommes pas à la recherche de la publicité !
Rien n’est nuisible à quelqu’un qui accepte le pluralisme absolu comme m. le Rabbin Dalsace, tout le monde a le droit au respect (sauf au terroriste fondamentalistes, et je ne vois pas pourquoi sont-il pires que les abatteurs d’animaux l’homme n’est-il pas une forme d’animale surdouée ? surtout que ces terroristes agisse pour une cause qui à l’heure yeux (s’ils en ont) est de nature spirituelle) et donc, le fait de démontrer une vérité n’affirme en aucun cas son exclusivité (attention une vérité peut en cacher une autre)
Il serait intéressant que vous montriez du doigt (de la souris) au moins dans le futur les défaillances dans les réponses du Rabbin .
Bien à vous
et a plus...
Dr Gadget
Cher M Dalsace
Milles excuses…
J’ai mis du temps à comprendre d’ou venait ce changement de tempérament. Mais je crois avoir trouver !!
Vous avez écrit :Shabbat, pas d’importance, taharat hamichpaha, dépassé, tefillin, laisse tomber… Totalement faux, donc un tissu d’idée reçues, d’affirmation de soi, de généralités… aucun intérêt à débattre dans ces conditions.
Je suppose que vous vous referiez à ce que j’avais écrit :
Vous ne pouvez espérer appréhender un message divin si vous lui enlever sa nature sainte et divine si vous la laissé à l’analyse de gens qui ne s’en préoccupe pas et pour qui n’importe que message éthique existant encore… (et ce n’est pas votre cas a mon avis…)
Shabbat, pas d’importance, taharat hamichpaha, dépassé, tefillin, laisse tomber…
Hors cela ne se rapporter pas à vous (enfin M le rabbin …tephillin, même votre filles met les teffilin ! shabbath ! vous pensez pas que je pense ça de vous ??) cela se rapporter bien evidement à Lévi-Strauss (que Dieu garde son âmes) et je ne pense pas me tromper !!
Désolée…
Petite remarque
La halakha n’est pas comme kehillel mais comme bet-hillel (et ce n’est pas un jeu de mots) hillel lui meme, est connu comme un maitre, educateur plus que legislqteur.
Quelque remarque sur votre réponse à Kevin.
[|Deux judaïsmes|]
…L’autre conception, la sienne, qui ne représente fort heureusement pas tout le monde orthodoxe , de laquelle se dégagent quelques traits assez désagréables. Premièrement un profond mépris pour tout ce qui n’est pas moi. J’ai forcément raison, mes maîtres sont les meilleurs par définition, l’opinion de l’autre ne peut être que mauvaise. La même personne n’aurait jamais critiqué de la même façon la teshouva de Moshe Feinstein ou d’un autre orthodoxe arrivant à la même conclusion. Deux poids deux mesures !
ça c’est pas gentils , je ne vois pas en quoi j’ai méprisé M Dalsace ? je n’ai pas forcement raison mais je défend mon opinion, n’est-ce pas légitime ? vous ne le faites pas ?
l’opinion de l’autre ne peut être que mauvaise… j’ai défendu mon opinion j’ai le droit de demander à mon interlocuteur de défendre le sien et j’ai aussi le droit d’exprimer les raisons de mon insatisfaction à son raisonnement (c’est la règle n°1 d’un débat)
La même personne n’aurait jamais critiqué de la même façon la teshouva de Moshe Feinstein ou d’un autre orthodoxe arrivant à la même conclusion. Deux poids deux mesures !
Pourquoi parler sans savoir ? c’est pas gentils !!Vous ecrivez :
Une vision totalement caricaturale de l’interlocuteur d’en face que l’on aime à dénigrer, en faisant croire que c’est un ignorant (par définition encore),
Vraiement désolé, je ne vois pas pourquoi vous dites cela…
un impie (il ne ferait aucune mitsva de base et inciterait les autres à ne pas le faire), etc… Un tissu de mensonges et de haine larvée en fausse volonté de dialogue.
J’imagine que l’erreur fut pardonnée…
Rav fainstein aussi grand soit-il n’est as mon maitre ou plutot je n’ai pas le bonheur d’être son eleve. Mais j’ai lu enormement de ses responsa et de ses pirouchim sur la guémara. Je peux apprecier son « genie » et ce n’est pas premier venu qui pourra revendiquer egalité ! c’est tout.
Cepandant, Je commence à connaître Golinkin (à travers des mails en hebreux) C’est une bien gentils personnes dont le niveau ne dépasse pas n’importe quel talmid hakham serieux. Ce n’est pas parcqu’il a des idées farfelus qu’il gagnera mon estime.
Son type de responsa est fondé sur la collecte, il annalyse et disloque le probleme et receuille des responsa pour chaqu’un des élément necessaire à sa conclusion.
Une de ses erreurs, c’est de toujours être à la recherche de la permissivité, il ne tient Jamais compte (au bout du compte) des responsa qui invalide la conclusion qu’il recherche…
Allez… ouvrez les yeux… demander au Rabbin Krieger si c’est pas vrai…
Dommage que vous ne prenez pas la peine de répondre à mon tsunami .
Vous pouvez effacer se msg dès que vous l’aurez lu…
Amicalement
Dr Gadget.
Cher Kévin.
Je m’empresse d’envoyer ma réaction…j’imagine quel sera lu par le Webmaster…
Je vais faire de mon mieux pour te montrer quelques failles dans la dernière réaction de M Dalsace. (j’ai d’autre remarque plus personnelle que je lui adresserai personnellement)
Il écrit :
[|Danger du fondamentalisme|]
Je n’ai pas traduit exprès les citations en hébreu, mais tout cela sent quelque peu le racisme. Il se dégage une vision très malsaine de l’humanité : il y a les juifs et il y a les autres… et ils ne méritent pas le même traitement.
Voici quelques remarques :
1. Tu dois savoir, autant inexpert que tu sois, que Dieu à donné la Tora aux juifs, pas aux non-juifs. Est-ce-la du favoritisme ? (Il y a les juifs et il y a les autres…) (je n’ai rien enrobé de citations et rien sorti du contexte). Je passe les nombreux versets qualifiants les enfants d’Israël de fils aînés de Dieu, de peuple choisi etc.
2. Et puis s’il juge la monstruosité de ma lecture (et cela n’implique que moi) je voudrai lui demander est-ce que la circoncision n’est pas une obligation divine monstrueuse ?
3. En parlant de monstruosité, je mentionnerai que le tsunami ainsi que toutes les catastrophes naturelles ou même sans arriver aux horreurs massives, les maladies les souffrances et les maux de tête n’arrivent que si Dieu le veut, sinon (si on accepte pas cette donnée) on nie l’omnipotence de Dieu !
Il écrit encore…
Ce qui est également très révélateur, c’est de ne pas supporter qu’une autre possibilité de judaïsme puisse exister.
Ça c’est un piège sémantique. En fait, c’est vrai que le juif orthodoxe ne supporte pas (au sens intellectuelle du terme, bien entendu) une autre possibilité de judaïsme autant que le juifs massorti ne supporte pas la possibilité d’un judaïsme unique qu’il soit orthodoxe ou réformé.
J’avais déjà fait allusion à cela, mais sans commentaire.
Je ne reviendrai que sur certains points fondamentaux.
Apprendre de Lévi Strauss ou de tout homme : Le monde dans lequel nous vivons est constitué d’un tissu culturel aux mailles très diverses. La connaissance évolue et nous la récoltons d’où qu’elle vienne. Le fait qu’une découverte ou qu’une idée nouvelle provienne d’un endroit ou d’un autre, d’un juif ou non, d’un homme pratiquant ou pas, reste totalement anecdotique et n’a même aucune importance, le monde moderne ne s’intéresse pas à cela mais aux résultats de la recherche. On peut être un juif pratiquant et affirmer des bêtises énormes, répéter sans réfléchir des textes ou des notions devenue totalement incohérentes, on peut être un juif non pratiquant et dire des choses essentielles ou avoir un comportement moral exemplaire. Le fait est que le monde dans lequel nous vivons n’est pas le même que celui dans lequel vivaient nos ancêtres. Je peux en tenir compte, ou ne pas en tenir compte. C’est mon choix. Les courants modernes du judaïsme (moderne orthodoxe , Massorti , libéraux) en tiennent compte à différents degrés et ne rejettent pas les résultats de l’histoire et de la pensée moderne.
Le monde dans lequel je vis ne peut pas se contenter de modes de fonctionnement philosophiques et éthiques du passé, même si on continue à y puiser une inspiration. Il est évident que la perspective a changé. Le propre du fondamentalisme est le refus de ce changement de perspective. C’est pourquoi un moderne et un fondamentaliste ne peuvent pas se comprendre. Il ne faut pas en avoir peur c’est comme cela, nous ne vivons pas dans le même monde, semble-t-il.
Sur la question du tsunami : la question de savoir si les forces de la nature sont autonomes ou sous l’action et l’influence directe d’une volonté extérieure (Dieu) représente une vieille question philosophique. Certains textes pensent que rien ne se passe, pas la moindre vague, sans que Dieu l’ordonne. Le problème devient alors la justification morale de l’action divine… c’est même très problématique. D’autres textes considèrent que Dieu n’est pas une sorte de marionnettiste qui tire les ficelles du monde, la nature divine serait toute autre. La tendance de la théologie contemporaine va en ce sens. Mais ce n’est pas nouveau et déjà en son temps ( 12e siècle) Maimonide s’exprimait ainsi à propos des maladies et des différents phénomènes naturels, « c’est absolument la même chose qui arrive dans l’ensemble de l’univers : la chose qui fait naître ce qui naît et en prolonge l’existence pendant un certain temps est la cause qui amène dans l’univers des choses nuisibles… » (Guide 1.72). En d’autres termes, dès lors que les continents existent, leur dérive provoque régulièrement des Tsunamis. Dieu est la cause de l’existence, donc de la nécessité du Tsunami ou de certaines maladies, du vieillissement, etc… mais tous ces phénomènes ne sont que le résultat nécessaire de l’existence. Il n’y a strictement aucun enseignement moral à en tirer. Dieu n’a pas voulu le tsunami. Il est la cause de l’existence d’un monde dans lequel il y a la possibilité du tsunami, ce n’est pas du tout la même chose. Bien entendu, après la shoah, le judaïsme se trouve confronté à un degré supérieur de difficulté théologique. Le tsunami devient le fait du cœur de l’homme sur lequel Dieu ne semble pas agir très efficacement, « Il voile sa face ». Pour Hans Jonas, Dieu n’en a tout simplement pas la possibilité, il est un « creux » du monde.
Au sein du judaïsme, certains veulent conserver une théologie dans laquelle rien n’échappe à la volonté directe de Dieu, le tsunami est une punition directe et intentionnelle, la Shoa également. C’est notamment le cas du rabbin Ovadia Yossef qui est un grand possek, mais un piètre philosophe et ne peut s’empêcher de déclarer régulièrement des choses assez difficiles à entendre. Libre à eux de penser comme cela. Pour des gens comme moi c’est une théologie qui ne tient pas la route.
Sur la question du rapport aux autres, il existe une grande différence entre une spécificité culturelle et spirituelle que représente le judaïsme de façon tout à fait légitime, et l’indifférence face à la vie en danger d’un autre être humain que je pourrais sauver. La question de l’universalisme dans le judaïsme préoccupe les textes juifs depuis toujours. (Elle préoccupait également les stoïciens grecs). C’est pourquoi différents textes du Talmud et du Midrash cherchent à expliquer comment Dieu a été « contraint » de ne pas se révéler à l’univers entier, mais de choisir un peuple particulier afin que celui –ci enseigne l’univers entier (c’est fondamental !). On peut transformer la Tora en un système refermé sur lui-même et indifférent au devenir universel et aux grandes questions qui agitent notre monde. Ce n’est pas notre position dans le mouvement Massorti . Nous ne croyons pas trahir en quoi que ce soit l’esprit de la tradition juive en cela.
La question de l’omnipotence de Dieu demeure une grande interrogation pour la théologie et la philosophie juive contemporaines. Ce n’est pas dans ce forum que nous allons la régler. Peut-être en effet Dieu n’est-il pas omnipotent ! Pourquoi pas après tout ? S’il est omnipotent, peut-être est-il profondément injuste ou que sa justice nous échappe tellement, qu’elle perd tout sens à nos yeux et que donc mieux vaut ne pas s’en occuper… Peut-être que Dieu n’existe pas et n’est qu’une idée ? On pourrait continuer comme cela à l’infini. Je n’ai nullement la prétention d’avoir des réponses définitives.
Une chose me semble claire, des réponses toutes faites et dogmatiques, se contentant d’avancer des citations bibliques ou talmudiques sorties de leur contexte ne peuvent satisfaire la soif de vérité et de bien d’un esprit quelque peu éclairé.
Bien à vous
Yeshaya Dalsace