Les quelque milliers de juifs de Bombay, une communauté discrète largement épargnée jusqu’à présent par les violences en Inde, acceptent difficilement l’idée qu’ils ont été frappés à leur tour.
Le couple, à la double nationalité israélienne et américaine, qui gérait le complexe de Nariman House, abritant un centre religieux juif orthodoxe du mouvement loubavitch , le rabbin Gavriel Holtzberg et son épouse Rivka, ont péri dans l’assaut, ainsi que six autres juifs, détenant tous la nationalité israélienne.
Le centre proposait hébergement, prière et restauration kasher aux routards juifs venus du monde entier ainsi qu’aux touristes.
La ministre israélienne des Affaires étrangères Tzipi Livni a vu dans le choix de cette cible "le signe que cette attaque visait les juifs et les Israéliens".
Mais beaucoup de juifs de Bombay, dont les ancêtres sont arrivés dans le sous-continent il y a un millier d’années, refusaient de croire qu’ils aient pu être une cible.
"Je suis certain à 100% que les activistes ne visaient pas les juifs indiens", a déclaré à l’AFP Solomon Sopher, le responsable de la synagogue Keneseth Eliyahou, proche du Centre juif.
"Les musulmans ne nous ont jamais fait de mal. Cet acte barbare ne vise pas les juifs, mais l’Amérique, la Grande-Bretagne et Israël", a-t-il estimé après la prière du samedi, à laquelle assistaient une quinzaine de personnes.
L’Inde est devenue une destination de plus en plus populaire pour les touristes israéliens, avec plus de 43.000 par an, dont beaucoup de jeunes comme ceux qui séjournaient à Nariman House.
En revanche, la communauté juive est en déclin, avec seulement quelque 5.000 membres, contre 30.000 en 1940. La plupart vivent dans la région de Bombay, où ils ont prospéré sous la colonisation britannique, qui leur avait accordé certains privilèges.
Il y en a également une poignée dans l’Etat du Kerala (sud-ouest), où le village d’Ernakulam compte une communauté d’une quarantaine de juifs de Malabar et plusieurs synagogues désaffectées.
La plus célèbre implantation de la communauté juive indienne se trouve dans le Kerala près de Mattancheri, qui attire chaque année des milliers de visiteurs, mais selon des informations récentes seuls 12 juifs indiens y vivraient encore.
L’érosion des communautés juives en Inde, malgré une longue tradition de tolérance de la majorité hindoue envers cette minorité, est due essentiellement à l’aliyah, l’émigration vers Israël de jeunes à la recherche de meilleures opportunités, selon la Commission américano-juive de distribution.
Mais certains juifs indiens rejettent catégoriquement toute idée d’exil même après la tragédie de Nariman House.
"Je ne pense pas en termes de juif ou non-juif", explique Alcon Silgaonkar, l’un des membres de la communauté, "je pense en tant qu’Indien".
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