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Mort des premiers nés

Mort des premiers nés

Séparer le religieux du politique.

En Exode 12, 12, il est écrit : « Je passerai dans la terre d’Egypte pendant cette nuit, je frapperai tous les premiers-nés dans la terre d’Egypte, de l’homme au bétail, et contre tous les dieux d’Egypte, je ferai des jugements, Je suis la Transcendance ».

C’est là le sommet des dix plaies qui ont frappé l’Egypte, ce point de retournement où l’entêtement de Pharaon va se voir fléchi et où l’Egypte va enfin accepter de faire naître le peuple d’Israël en le laissant sortir d’elle. C’est le début du printemps hébreu. Mais quel prix ! Pourquoi fallait-il donc que Dieu s’en prenne aux premiers-nés – tous les premiers-nés – pour parvenir à un tel résultat ! Si le Dieu biblique était un dieu-magicien comme nous l’imaginons trop souvent, il aurait pu faire un tour de passe-passe pacifique, qui n’aurait fait aucune victime, pour arriver au même résultat ! Mais tel n’est pas le Dieu biblique.

A-t-il donc besoin du sang de victimes innocentes ? Cela contredirait tout le message éthique de la Bible.

La Bible n’est peut-être pas tellement un livre destiné à nous donner réponse à tout, mais plutôt à nous apprendre à poser de justes questions, y compris à Dieu, lorsque son comportement semble injustifiable face à son propre message.

Tel est sans doute un des messages du chapitre 18 de la Genèse, lorsqu’Abraham n’hésite pas à remettre Dieu en question face à sa propre exigence de justice.

Alors, pourquoi les premiers-nés ? Notre verset semble lier de manière étrange la mort des premiers-nés avec le jugement fait contre les dieux égyptiens. Quel lien peut-il y avoir entre la mort des premiers-nés et la capacité de Dieu à juger – c’est-à-dire à critiquer, à remettre en question – le pouvoir des dieux égyptiens, et ainsi à passer au cœur de l’Egypte et à remettre en mouvement une situation qui semblait jusqu’ici complètement bloquée ?

Ce lien, c’est la tradition qui nous le donne, en nous faisant savoir qu’avant la révélation du Sinaï, c’étaient les premiers-nés qui exerçaient la fonction de prêtres. Peu importe si cela est vrai historiquement ou non en Egypte. L’important, c’est le sens que la tradition juive permet de voir dans cet acte. Cela signifie en clair que l’inflexibilité de Pharaon ne relevait pas tellement d’un endurcissement politique, mais que le véritable lieu de résistance de l’Egypte face à l’appel de la Transcendance, là où tout bloquait, c’était le religieux, dont les premiers-nés constituaient les représentants par excellence, les prêtres - les représentants du divin sur terre.

La sortie d’Egypte n’est donc pas avant tout une révolution politique, mais une révolution religieuse : il s’agit pour la Transcendance de remettre en question un modèle où le politique et le religieux vont main dans la main. Méfiez-vous des religieux, c’est eux qui bloquent tout, lorsqu’ils se coltinent avec la politique ! Un tel modèle est en effet incapable de s’ouvrir sur la Transcendance : il ne peut que la capter et la figer dans un système idéologique de représentations politico-religieuses toutes-puissantes qui sacralisent le pouvoir politique et religieux, et lui permettent de se placer au-delà de toute critique et de toute remise en question.

C’est une religion qui se croit investie d’un pouvoir politique immédiat – un prêtre qui voudrait se faire roi, une théocratie. Et qu’est Pharaon sinon un dieu-prêtre qui est aussi roi ? Il est terrifiant de voir que le printemps arabe – y compris en Egypte ! – ne soit capable aujourd’hui encore que de reconduire un tel modèle.

La sortie d’Egypte signifie pour Israël qu’il renonce pour toujours à un tel modèle, et se constitue autour de la visée de création d’un autre modèle, où le religieux sera séparé du politique, afin qu’ils puissent témoigner ensemble d’un appel éthique – la Torah – qui les dépasse tous deux et leur permet de se critiquer l’un l’autre, car elle n’appartient à personne, sinon à la Transcendance qui passe dans l’histoire sans s’y résoudre.

Yedidiah

Messages

Mort des premiers nés

Tellement évident..
Malheureusement, la culture politique de la majorité de nos contemporains s’arrête à l’opium du peuple qu’est la religion.

Contrairement à ce que nous laissent croire qq irresponsables, le Judaïsme est laïc par définition : (séparation des pouvoirs)
Moché et Aaron : le politique et le religieux : et c’est le politique qui est chargé de consacrer les prêtres (paracha   tetsavéh)
Le pirké Avot est extrêmemnt clair sur la séparation des pouvoirs : il y a trois couronnes, celle de la royauté, celle de la prêtrise et celle de la Torah.

Enfin, la royauté et la prêtrise authentiques sont héréditaires (R.Munk Kol ha Torah)
Mais doivent obligatoirement se sourcer directement dans la Torah : d’où la nécessité d’une autre séparation : les profits et la Torah : nous avons assisté à des dérives insupportables et intolérables lorsque le clergé gère les finances.

Bonne chance

Mort des premiers nés

Je pense que le judaïsme peut être vécu de façon laïque, même quand on est pratiquant. Par exemple, un professeur juif pratiquant enseignant dans le public peut, lorsqu’il se trouve dans l’établissement, enlever son couvre-chef et (s’il les porte dehors) cacher ses tsitsit  , afin de pouvoir exercer un métier qui lui permet de gagner sa vie. Il pourra être amené à dire des choses qui vont à l’encontre de l’enseignement du judaïsme afin de respecter le programme officiel de sa matière.

Par contre, dire que le judaïsme est laïc par définition me semble exagéré dans le sens où c’est une religion qui demande à ses fidèles de se comporter d’une certaine manière et de suivre la Loi tout le temps et partout, et pas seulement dans l’espace privé. Il n’y a pas de distinction espace public/espace privé. Par exemple, un Juif doit dire une bénédiction lorsqu’il consomme un produit, quel que soit l’endroit et le cadre dans lequel il se trouve. Et ce même professeur ne pourra en aucun cas violer le chabbath ou yom tov pour aller enseigner dans son collège.

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