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Le sacré de la vie humaine

Le sacré de la vie humaine

La Torah nous ordonne des sacrifices animaux, mais elle nous interdit des sacrifices humains, quels qu’ils soient, et quelle que soit la cause pour laquelle on voudrait croire devoir les sacrifier.

Toute vie humaine a été donnée par Dieu, et donc voulue par lui, et ne saurait donc être reprise sans s’opposer au divin lui-même, et sans profaner son Nom.

Le droit se doit de traduire dans ses attendus cette inviolabilité de la vie humaine, et de la protéger contre toute dérive politique, idéologique ou religieuse.

Le problème, c’est que certains voudraient s’arroger le droit de parler au nom de Dieu, et de décider à sa place qui a le droit de vivre et qui doit mourir.

Plutôt que de laisser le droit flotter dans le ciel de l’idéal et de l’universel qui nous dépasse tous, et transcrire ainsi pour nous un appel de la Transcendance qui nous échappe et peut ainsi nous unir dans la recherche de la justice, ils pensent pouvoir s’accaparer l’appel divin, le réduire à un contenu politique précis qui définit exactement qui sont les bons et qui sont les méchants.

Sûrs de leur bon droit et de la non-humanité des méchants, ils arment ainsi leur bras sans trembler et en viennent à tuer sans pitié et sans remords. Ce fondamentalisme là nous guette tous lorsque nous arrêtons notre jugement sur une personne ou une nation, et la réduisons ainsi à ce que nous en pensons, à l’idée que nous nous en faisons.

C’est ce fondamentalisme qui doit être combattu, en nous et hors de nous, parce qu’il défigure le visage de l’humain, profane le Nom divin, et cherche à détruire ce monde que Dieu a créé. Il n’est qu’un autre visage de l’idolâtrie, où le divin est arraisonné dans une image et une représentation que je m’en fais, réduit à ce que je pense, dis ou fais.

C’est pourquoi tout texte divin doit nous échapper et nous transcender dans son appel. Et c’est ce que nous rappelle le premier verset du livre central de la Torah : Vayiqra. En effet, le premier verset de ce livre commence ainsi : « Il appela Moïse ».

Qui est ce « Il » ? Qui appelle Moïse ? Si le texte avait voulu nous le faire savoir, il aurait dit : « Le Nom appela Moïse », par exemple. Il ne l’a pas fait.

Nous ne saurons donc jamais qui a appelé Moïse, nous ne pourrons jamais maîtriser d’une quelconque façon la source de l’appel. Elle nous dépasse infiniment, et c’est pourquoi elle nous appelle infiniment.

Cela veut dire que quoi que nous fassions, nous ne saurons jamais si nous répondons précisément à cet appel. Il doit continuer à retentir infiniment en nous, à travers notre étude quotidiennement renouvelée de cette source de vie qu’est le Torah. Alors nous agirons, car nous sommes appelés à agir et à prendre nos responsabilités face à cet appel. Mais agissant, nous tremblerons, car nous ne serons jamais sûrs que la manière dont nous répondons à cet appel est à la hauteur de cet appel. C’est pourquoi nous devrons toujours rituellement et quotidiennement demander pardon de nos actes.

Et c’est parce que cette tâche est grande et impérieuse – celle de faire surgir au creux de nos actes l’humain qui cherche à naître et que Dieu appelle de ses voeux – que nous continuerons à envoyer nos enfants à l’école, pour qu’ils y apprennent la vie, et que nous continuerons à être parents et enseignants, pour chercher à transmettre cette vie si précieuse, avec ses valeurs qui la traversent et la portent vers un appel infini.

Yedidiah Robberechts

(mars 2012)

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