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Trop de Juifs ont le Nobel !

Trop de Juifs ont le Nobel !

Le pourcentage de Juifs recevant chaque année le Nobel est énorme vu le petit nombre de Juifs dans le monde, la jalousie attend donc au coin du bois...

En 2011, pas moins de six prix Nobel sont attribués à des Juifs (dont un israélien). Chaque année, le jeu consiste du côté juif à regarder qui est "de chez nous" et qui ne l’est pas...

Le fort pourcentage de Juifs primés (près de 20% alors que les Juifs ne sont que 14 millions dans le monde) s’explique bien sûr par des raisons sociologiques et historiques qui font que les Juifs ont toujours investi à fond l’éducation et le savoir, et que le judaïsme se prête à l’audace intellectuelle. Loin de "l’opium du peuple", le judaïsme favorise en principe la réflexion, l’innovation et la recherche. Rien de bien étonnant que cela favorise l’esprit d’initiative et les brillantes carrières universitaires.

Les facteurs historiques font également que les Juifs ont pu profiter durant le 20e siècle, des vertus des grandes institutions universitaires d’Europe et d’Amérique dans lesquelles ils se sont largement impliqués. Dans cette logique, l’Etat d’Israël créa très vite un pôle universitaire de premier rang.

Du côté juif, il existe un sentiment de fierté légitime, mais qui ne doit pas déboucher sur du chauvinisme ou des théories stupides. Mais du côté des antisémites, ces succès juifs suscitent bien évidemment la rancœur.

Voici l’analyse de Michael De Saint Cheron sur une réaction d’universitaire qui voient dans ce succès juif "un complot"... (Rien de nouveau sous le soleil).

Yeshaya Dalsace

Un nouveau revisionisme : le prix Nobel et les juifs

par Michael De Saint Cheron (écrivain)

Dans une lettre ouverte datée du 31 mars, signée par deux scientifiques, Jan C Biro, professeur honoraire à l’Institut Karolinska de Stockholm, et Kevin B. MacDonald, professeur de psychologie à l’Université d’Etat de Californie, un comité agissant sous le nom de "Revision Comity of the Nobel Foundation", dénonce : "The Jewish bias of the Nobel Prize", le "parti pris juif" du prix Nobel. Sauf que le comité Nobel d’aujourd’hui n’est en rien celui d’il y a vingt ans, n’est en rien celui d’il y a quarante ans et moins encore celui qui l’attribua à Einstein et à Bergson avant le Seconde guerre mondiale, il y plus de quatre-vingts ans…

Les deux auteurs déclarent que ce parti pris est une violation de la volonté d’Alfred Nobel aussi bien que de la législation suédoise. On voudrait bien savoir en quoi ? Ils nous l’expliquent longuement et avec force détails et de nombreux tableaux de pourcentage à l’appui dans leur pamphlet de treize pages.

En ouverture, ils déclarent qu’aucun d’eux, bien sûr, n’est antisémite mais qu’il est toutefois nécessaire d’analyser et de corriger "The Jewish bias of the Nobel Prize". Pour ce faire, ils terminent leur lettre ouverte par un appel à leurs collègues juifs "hautement respectables" pour qu’ils les rejoignent dans cette sorte de croisade d’un nouveau genre pour sauver le prix Nobel du pouvoir de ce parti pris juif.

Leur longue analyse rappelle pour commencer le règlement établi par Alfred Nobel stipulant que les prix doivent être distribués sans considération de la nationalité des lauréats, aux plus méritants. On en eût douté !

Après ces prémisses, nous entrons dans le vif du débat. La Fondation Nobel a ignoré ce principe fondateur. En effet de 1901 à 2010 (soit en 110 ans), selon leur calcul, 543 prix Nobel ont été attribués à 817 lauréats et 23 organisations.

181 récipiendaires, soit 21,5 %, étaient juifs alors qu’au plus 659 étaient des lauréats non-juifs (ou "gentils  ", selon la terminologie retenue par les auteurs).

Ces derniers entrent ensuite dans de savants et pernicieux calculs par rapport à la population mondiale. Etant donné que les juifs ne représentent jamais que 0,2 % de l’humanité, les 659 lauréats non-juifs ou "gentils  " correspondent à 6,6 % des lauréats, alors que les 181 lauréats juifs correspondent à 905 % des lauréats en valeur globale. En somme, écrivent les signataires, il y aurait 137 fois plus de juifs que de non-juifs récompensés au niveau mondial par le Nobel (mais simplement 26,3 fois plus pour ce qui est des Etats-Unis).

On ne voit pas à quoi conduisent de pareils calculs, si ce n’est à une sorte de haine qui ne dit son nom, sous les apparences d’analyse objective, puisque statistique, mais les statistiques ont servi à comptabiliser aussi l’extermination d’êtres humains. Un dernier mot sur ces statistiques. La proportion de lauréats juifs aurait plus que doublée (2,3) après la Seconde guerre mondiale. Est-ce la faute à Hitler ? Ainsi, l’augmentation de Nobel entre juifs et non-juifs serait, depuis soixante ans, de 8,8 fois supérieur au bénéfice des premiers.

Cette lettre ouverte sous prétexte de relever des pourcentages et des taux de sur-représentation des uns par rapport aux autres, ne propose rien d’autre qu’une immonde surenchère des juifs par rapport aux non-juifs, comme il y eut l’abominable surenchère des victimes des génocides, comme si les victimes ou au contraire les possédés de tous les racismes et antisémitismes et de toute obédience, n’en avaient jamais fini avec les surenchères qui fomentent ou attisent les haines.

Outre le mythe du complot qui se fraye un chemin à travers tout le discours de Jan C Biro, une autre question se lève : mais que fait-il de ces juifs non-juifs, convertis, athées, voire anti-sionistes, ou pire antisémites ? Y a-t-il pensé à ces représentants malgré eux d’un peuple, d’une communauté ou pire d’une religion, qu’ils rejettent, qu’ils ne reconnaissent en rien comme étant les leurs ? C’est eux justement qu’ils voudraient bien récupérer.

Imaginons un Jean-Marie Lustiger prix Nobel ! Il serait donc par la force des choses comptabilisé à la fois, selon la logique de l’analyse, comme juif et comme non-juif, puisque converti au christianisme. Cette logique apparente est donc un leurre qui déborde de haine et de jalousie envers les juifs.

Dans l’introduction à cette étude hautement diabolique, M. Biro reconnaît que les juifs en tant qu’entité, ont de tout temps étudié, surtout à des époques ou les petits enfants de Pologne, de Russie, ou du Kansas, courraient aux champs quand un instituteur apparaissait dans leur village. Il tire cela d’une anecdote de George H. W. Bush sur les mères juives des ghettos, mettant du miel, le premier jour d’école (le heder, en yiddish), sur les lettres hébraïques, afin que leurs tout jeunes garçons prennent plaisir à l’étude. Bush oubliait de dire que le lendemain pourtant, ces mêmes garçons, du haut de leurs trois ou quatre ans, devaient continuer à apprendre sur de vieux volumes usés et jaunis, sans plus une goutte de miel.

A la fin de son étude, M. Biro enfonce pour ainsi dire les clous sur la croix, en affirmant ceci : "The J-bias as a violation of Nobel’s will" ("le parti pris juif comme une violation du prix Nobel")…

Il reconnaît pourtant que ce ne sont plus les juifs directement qui seraient les appariteurs de ce "complot" implicite, mais les "gentils  ", les non-juifs eux-mêmes… Les non-juifs seraient ainsi les instruments à leur corps défendant, ou à leur insu, des juifs, ne voulant pas voir que cela dure depuis 3 000 ans. "Le comportement fortement compétitif des juifs n’est pas spécifique au prix Nobel ni à la période post-Seconde guerre mondiale." Les non-juifs comprennent mal ce phénomène, explique-t-il, c’est pourquoi il lui appartient de leur faire voir en face la réalité sur ce peuple.

Cette "nation" en effet, écrit-il encore, ne vit pas sur une seule terre mais dans tous les pays du monde. On reconnaît ici l’idée du complot de l’Internationale juive, qui sévit partout dans le monde à partir des positions importantes qu’ils occupent.

En définitive, ce Pr. Biro veut avec toute sa force de conviction prouver aux juifs "non-juifs" ou anti-juifs, que ce "J-bia " leur nuit à eux aussi et qu’il est urgent de le dénoncer pour mieux le combattre.

Longtemps, la haine du juif, depuis les années quatre-vingt, tournait autour du révisionnisme concernant la Shoah et autour du sionisme. Aujourd’hui, à visage découvert et fiers de la spécificité du débat qu’ils mettent sur la place publique et d’abord au devant de la communauté scientifique mondiale, M. Biro et le co-signataire de sa lettre ouverte, Kewin B. MacDonald, s’en prennent à l’excellence juive : plus de révisionnisme post-Auschwitz, plus d’anti-sionisme primaire mais un révisionnisme sournois, odieux, qui dénoncent ce "J-bias" au sein du comité du prix le plus couru du monde, le Nobel…

Ce discours sans être totalement neuf, laisse pourtant pressentir avec plus de force qu’auparavant un nouvel ordre mondial rêvé par des millions de gens, où c’est finalement l’excellence juive qu’il faut sinon étouffer, du moins ramener à l’échelle des autres peuples pour la rendre invisible et inodore – voire indolore, à ceux auxquels elle provoque un irrépressible prurit.

Nous sommes ici dans l’insondable de la détestation de l’autre, que dénoncèrent tant Jankélévitch et Levinas – et qui est invulnérable.

Point de vue publié dans Le Monde du 07.04.11 (donc bien avant nos 6 prix de l’automne 2011 qui doivent faire rager les auteurs de la lettre ouverte).

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