Voici un extrait de l’article à lire dans son intégrité en PDF
Les récents heurts avec les ultra-orthodoxes en Israël sont à comprendre dans une perspective plus large de radicalisation, révélatrice d’une véritable cassure juive interne qui pourrait bien un jour faire basculer toute la société israélienne.
Ces tensions font ressortir deux problèmes majeurs pour le judaïsme contemporain : le rapport entre la loi juive et l’Etat d’une part, et la question de la place de la femme dans la tradition juive d’autre part.
La religion et l’Etat :
Le phénomène est complexe, on ne saurait mettre tout les religieux dans le même sac, il existe au sein du monde orthodoxe des quantités de nuances pas toujours faciles à comprendre vu de l’extérieur. Mais l’influence dans la société de groupes hostiles aux idées de démocratie occidentale, de liberté d’expression, de croyance et de mœurs est de plus en plus forte.
L’Etat d’Israël est officiellement laïc mais concède des prérogatives à la religion qui minent le caractère démocratique de l’Etat. Dans le seul secteur juif de la population, il existe de fortes inégalités de traitement dès lors qu’on touche aux affaires religieuses au gré des coalitions et du poids politique d’un groupe juif ou un autre. L’inégalité face au service militaire reste la plus scandaleuse.
La loi de l’Etat a fait du rabbinat orthodoxe le référent obligatoire pour tout ce qui touche au cycle de la vie. Le résultat est une série de situations absurdes et d’injustices, notamment en matière de divorce. Ce rabbinat est aujourd’hui inféodé aux fondamentalistes qui ne cessent de monter en puissance. Les groupes fondamentalistes sont paradoxalement financés par l’Etat, que ce soit directement par des subventions ou indirectement par divers avantages et exemptions.
Mais le point le plus grave et le plus dangereux touche à l’éducation des enfants ultra-orthodoxes , enfermés dans un système sectaire, indépendant des autres écoles, dans lequel les matières générales (mathématiques, langues, Histoire…) ne sont pas ou très peu enseignées. Les études n’aboutissant pas au bac, les élèves sont privés de la possibilité de mener des études supérieures, d’acquérir une culture générale et de développer le moindre esprit critique. Compte tenu de la progression démographique des juifs ultra-orthodoxes (800.000 actuellement et la majorité des Juifs dans une quarantaine d’années), le maintient et le financement public d’un système éducatif aussi rétrograde est non seulement catastrophique pour l’avenir économique du pays, mais il prépare la mort lente de la démocratie israélienne.
Aucun autre pays occidental ne soutient, ni même tolère, un pareil réseau scolaire. Le récent prix Nobel israélien de chimie Dan Shechtman y a fait allusion en affirmant que tout parent qui prive son enfant de la possibilité d’étudier est un criminel qui devrait être puni pour cela.
Le peuple juif et l’Histoire ont pris le judaïsme de court, il n’avait pas prévu le sionisme et la création d’un Etat moderne. Jusqu’ici, les rabbins ont été incapables de proposer un modèle de judaïsme compatible avec un Etat moderne et démocratique. Un tel projet ne peut passer que par une « réforme » du judaïsme que les orthodoxes ne sauraient accepter ; ils préféreront sacrifier l’idée de l’Etat moderne et de la démocratie plutôt que de toucher à un cheveu de leur conception religieuse. La solution trouvée pour le moment est celle du « statut quo », c’est-à-dire une sorte d’équilibre fragile entre des forces antagonistes, la religion et la démocratie.
Le mouvement massorti israélien (l’un des trois grands courants du judaïsme, qui se situe entre le courant libéral et orthodoxe ) appelle depuis longtemps à la séparation de la religion et de l’Etat ; c’était également la position du philosophe Yeshayahou Leibowitz et de quelques autres intellectuels orthodoxes . Mais c’est un point de vue très minoritaire dans les rangs religieux. La plupart des rabbins n’ont pas le courage intellectuel de reconnaître que la loi juive a échoué à penser l’Etat moderne et encore moins de défendre la nécessité d’un travail de réforme juridique du judaïsme.
Les femmes et l’orthodoxie :
Dans certains quartiers orthodoxes , on menace les femmes qui ne se soumettent pas aux restrictions « religieuses », on les relègue au fond des bus, on leur demande de changer de trottoir… Ce zèle, que l’on peut qualifier de pathologique, s’ancre dans un terreau textuel bien réel et une légitimité historique de pratiques ancestrales. La racine du problème vient avant tout de la condition féminine dans le judaïsme médiéval considérant l’inégalité entre les sexes comme un axiome. Soulever cette question, c’est toucher à un tabou pour la grande masse des orthodoxes à qui l’idée même de critiquer la tradition juive est insupportable.
Dans le judaïsme orthodoxe , les femmes subissent la ségrégation presque naturellement : dans les synagogues, dans les cercles d’étude juive, dans quasiment toutes les formes de vie sociale, y compris les postes politiques de responsabilité. Rien d’étonnant dès lors à ce que l’on étende cette ségrégation aux bus et autres lieux de « promiscuité ». Le fait que chaque Juif orthodoxe commence sa journée en prononçant la bénédiction « bénit sois-Tu qui ne m’a pas fait femme » n’est pas chose innocente, cela exprime l’idée même de cette inégalité de droit entre hommes et femmes dans la religion juive. Il faut se rappeler que le droit de vote des femmes fut imposé au forceps par la composante laïque du mouvement sioniste et que les partis orthodoxes n’ont toujours pas d’élus femmes.
Les courants modernistes du judaïsme, après un long travail d’exégèse, proposent un autre modèle, mais ils sont régulièrement traînés dans la boue pour leur féminisme, leur esprit critique et leur modernisme. En Israël, ils sont réduits au silence institutionnel, ils sont condamnés à une quasi-clandestinité par un Etat paradoxalement complice du fondamentalisme et au détriment du pluralisme juif, donc des valeurs même de la démocratie !
4000 personnes sont venues manifester à Beit Shemesh (80.000 habitants) pour défendre la laïcité, la belle affaire ! En comparaison, le camp d’en face a rassemblé, il y a peu, pas moins de 100.000 manifestants à Jérusalem, tous des hommes en noir, venus défendre, après un jugement de la Cour suprême, la ségrégation scolaire envers les juifs séfarades dans une école hassidique. En 1999, ils étaient 500.000 pour attaquer cette institution qui reste l’ennemi à abattre. La balance des forces est claire et le camp « libéral » ne pèse pas bien lourd.
Ce problème de radicalité religieuse déborde dans les rangs des religieux sionistes rongés par un nationalisme qui s’est illustré par l’assassinat d’Yitzhak Rabin.
En France, même si c’est plus discret, le judaïsme institutionnel est confronté à la même montée des extrêmes et à un communautarisme galopant. Le judaïsme français a depuis des années changé de visage. Les dernières assises sur l’avenir de la communauté juive de France organisées par le CRIF ont fort bien mis le doigt sur le problème. Il ne suffit pas de blâmer les « fous de Dieu » de là-bas, il faut balayer devant sa porte et dénoncer le sexisme, l’obscurantisme et la bigoterie partout où ils se trouvent.
Le problème n’est pas la Tora, mais sa grille de lecture :
Certes, la racine du problème se trouve dans certaines sources juives, mais le Talmud étant truffé d’autocritique et de débats contradictoires, le danger provient avant tout d’une lecture radicale de ces sources, lecture sans concession, sans réinterprétation, dans un fidéisme craintif nourri d’une apologétique sans faille. Il s’agit donc d’une approche rigoriste nourrie par une vision médiévale des choses. Si l’on veut produire de l’exégèse permettant l’ouverture et l’amélioration de la condition féminine, l’expérience prouve que c’est possible dès lors que l’exégète en a la volonté, y compris dans les rangs orthodoxes . Des milliers de pages ont été déjà écrites sur tous ces sujets, montrant que le judaïsme n’a pas forcément un visage obscurantiste et n’est pas condamné au triste spectacle qu’il offre actuellement.
Yeshaya Dalsace
Janvier 2012
Cette analyse a été publiée dans Libération du 13 janvier 2012
L’intégralité de l’article est à lire en pdf
Lien vers un article qui confirme ce que le rabbin Dalsace écrit à propos du Rav Eliachiv et sa position contre toute tentative d’intégration économique. http://israelmatzav.blogspot.com/20...
La réaction du grand-rabbin Bernheim
Dans notre article, nous faisons allusion à la réaction du grand-rabbin Bernheim, la voici :
Le 2 janvier, interrogé sur l’antenne de RCJ, le grand-rabbin de France avait condamné les discriminations et les violences perpétrées par une petite minorité du monde harédi (littéralement « craignant Dieu ») en Israël, qui donne « une image désastreuse, fausse et dévoyée de l’orthodoxie juive ».
Il avait annoncé « la mise en place d’actions éducatives en termes de Torah pour les femmes avec un projet de Beth Hamidrash féminin », ainsi qu’une aide pour les femmes engagées dans une procédure de divorce religieux.
Nous saluons ces réactions qui ont le mérite de la clarté, mais réaffirmons comme nous l’avons écrit dans notre article, que le problème est un problème de base qui touche à la loi talmudique elle-même basée sur l’idée de différence de nature juridique entre hommes et femmes et que si la violence physique reste en effet le lot d’une minorité, la violence symbolique est le lot de pans entiers de la tradition.
Nous reconnaissons la difficulté d’en faire bouger les lignes, mais cela nous semble un chantier nécessaire. C’est bien le point qui différencie l’orthodoxie du mouvement massorti : oser discuter de l’ensemble du problème et ne pas en rester aux questions d’atmosphère.
Ségrégation dans les bus : analyse
Voici un article de Sonia Sarah Lipsyc sur la question de la ségrégation dans certains bus en Israël, repris ici avec son aimable autorisation.
Réactions à l’article de Yeshaya Dalsace
Il y eut beaucoup de réactions très positives. Nous en mettons une petite partie en ligne, surtout celles qui relancent le débat (en respectant l’anonymat de contacts personnels) :
Merci pour votre article remarquable et courageux. Je suis fière de faire partie de cette communauté si ouverte et réfléchie. Enfin je me reconnais dans un judaïsme qui accueille les différences sans jugement... Et qui prône avant tout l amour et le respect d autrui. Merci !!!!! M.S.
Bonjour
Je trouve votre article très pertinent.
Je pense que la professionnalisation de la fonction rabbinique et l’argent qui gravite autour de cette fonction (depuis une trentaine
d’années) a agqravé les choses : comme tout professionnel, un rabbin est tenté de défendre, sciemment ou non, son poste et sa carrière. Or, ceux qui se dresseront sur sa route ne sont pas les modérés : ceux là s’en vont lorsque les choses ne leurs conviennent pas. Ceux qui rendront la vie insupportable au rabbin , pour la moindre nuance d’interprétation d’une halakha , ce sont les fondamentalistes.
Par construction, la manière institutionnalisée de gérer la fonction rabbinique conduit donc à une surenchère halakhique qui frise le délire (et je pense l’a déjà dépassé) . Un rabbin n’a aucun intérêt à s’opposer à une surenchère orthodoxe : elle sanctifie sa fonction, lui garantit le suffrage de ceux, fanatiques, dont il ne pourra jamais se débarrasser, et, au pire, éloignera de son giron ceux des modérés qui sont en désaccord, ce qui n’est pas si douloureux pour sa carrière.
Conséquence : cela fait belle lurette que des gens qui ne sont pas capables d’un débat d’idées quelconque, croient parler de sujets passionnants en discutant uniquement de la température de l’eau qui est permise le shabbat pour préparer du thé ... Certes, on peut en parler, mais en remplaçant tout l’or par du plomb, et en confondant ces deux métaux, on se prive de la possibilité de rencontrer jamais le plus noble d’entre eux ... Le Midrash - et même la Guémara, fortement midrashique - ont été occultés par le Shoul’han Aroukh, qui n’est pas et n’a jamais été un texte fondateur du judaisme (qui a existé 5 fois plus longtemps sans shoul’han aroukh qu’avec).
Je crois aussi que les carrières scientifiques, qui étaient très prometteuses jusqu’au début des années 80, ont happé les jeunes talentueux, pour laisser à ce genre de fonctions religieuses, en général, des gens qui s’y consacraient souvent plus par absence de choix que par vocation. Ce qui conduit à des attitudes souvent primaires aux plus hauts postes du rabbinat, à une certaine cupidité - l’aubaine financière et la simplicité d’esprit de certains donateurs bigots mais tellement généreux était totalement inespérée - voire à un manque total de scrupules. Tout cela fait que la gestion de leur "pouvoir moral" est souvent très archaïque.
Shir HaShirim nous dit : "Samouni notéra ette hakeramim - Karmi shelli lo natarti" ... nous avons commis l’erreur de nous désintéresser de notre vigne ... en regardant vers la science ... et en laissant notre vigne aux ultra-orthodoxes ... La nature ayant horreur du vide, nous en sommes là, mal partis ...
Conclusion : Il est impératif que les modérés reviennent dans le giron du judaisme orthodoxe pour rendre la vie infernale à ces rabbins qui ont détourné le judaisme de son histoire et de ses valeurs. Quels que soient vos points de vue, vous devez, tout en conservant votre organisation qui est bien meilleure que celle des structures officielles, vous faire entendre beaucoup plus dans les institutions juives "officielles" en prenant part aux élections et en utilisant tous les moyens honnêtes, même les plus pesants, virulants, lourds insistants ... pour obliger les rabbins qui ne défendent que leur poche ou leur carrière à avoir un peu plus de conscience.
Petite remarque : les initiales de Samouni Notérah ett hakéramim sont Sin’ah : la haine ...
Amicalement
Jacob
Merci pour vos remarques et encouragements, de votre part cela me touche particulièrement.
Revenir au sein de l’orthodoxie ? La proposition est flatteuse venant de vous, mais on m’y ferait vite taire !
Je m’estime au sein du judaïsme halakhique, au sens large du terme, cela pourrait peut-être fonctionner dans une synagogue consistoriale indépendante en mettant beaucoup de freins à mes opinions…
Militer au consistoire , pourquoi pas ? Toutes les sensibilités juives devraient y avoir leur place.
Mais la liberté qu’offre le mouvement massorti est un bien précieux, il faudrait donc que le Consistoire admette la légitimité d’une sensibilité juive plus ouverte. Sur la question de la place de la femme, l’orthodoxie n’est pas prête pour bouger quoi que ce soit, sur l’ouverture aux conversions non plus… Un être humain n’a qu’une vie, la liberté de penser et de s’exprimer est certainement le bien le plus précieux pour une personne digne, mais cette liberté a son prix qu’il faut être prêt à payer.
Avant de parler de venir s’exprimer au sein de l’orthodoxie (qui est toujours libre d’inviter des rabbins modernes à des tables rondes ou autre, mais s’en abstient généralement), connaissez-vous un organe de média juif, presse juive, radio juive française où la tendance moderniste peut s’exprimer librement et régulièrement ? Si oui, faites le shidoukh…
Yeshaya Dalsace
Bravo pour cet article courageux et hélas trop vrai.
Je partage l’opinion du commentaire que vous avez publié en pensant qu’il serait utile que le débat s’inscrive dans les instances dites " officielles" pour qu’il ait plus de poids Amicalement. J.G
Toujours clair, argumenté et pertinent, c’est un bonheur de vous lire. La question qui se pose maintenant, c’est de quel côté va pencher la balance en Israël, démocratie ou théocratie ? Certains franchissent déjà le pas : Dismantle Israeli democracy and replace it with Jewish law, says settler leader
Plusieurs personnes ont exprimé leur réserve sur le fait de parler de ces problèmes dans Libération. Je ne suis absolument pas d’accord. Tout d’abord Libération est un journal sérieux. Cette analyse intéresse des quantités de lecteurs, juifs ou non. A notre époque l’info circule et il n’y a aucune raison de la censurer. Le fait qu’un rabbin se permette un regard critique et une analyse rapproche des quantités de gens qui en ont assez de la langue de bois communautaire. De plus, il n’existe pas d’alternative, puisqu’il n’y a pas en France de presse juive de débat où s’exprimer.
Yeshaya Dalsace
Cher Yeshaya
je viens de finir une lecture attentive de ton dernier texte, que je trouve d’un très grand intérêt .
Je partage certaines analyses très réfléchis de ton article.
Je ne partage pas d’autres...
Tu as tout à fait raison de combattre le sexisme du milieu fondamentaliste israélien ... et diasporique. Mais de grâce, un peu de compréhension pour l’esprit orthodoxe moderne qui refuse le chant féminin dans les offices, tout en acceptant le chant féminin dans la vie culturelle civile et qui établit une mehitsa raisonnable dans les synagogues, tout en refusant la séparation hommes-femmes dans la vie quotidienne.
Je te rappelle ce que tu ne dis jamais, que les maîtres à penser du courant duquel tu te réclames ont toujours accepté une mehitsa modérée, que tu refuses : Zacharia Frankel, Sabato Morai, Salomon Schechter , Louis Finkelstein, Saul Liberman...!!! Sont-ils des dangereux intégristes ? Quand j’étais élève au JTS , il y avait une mehitsa raisonnable dans l’oratoire. Personne ne trouvait rien à redire. Il n’y avait rien d’humiliant. De grâce, évitons les amalgames et condamnons ce qui est odieux, fanatique et mesquin, tout en reconnaissant qu’il est possible d’imaginer une orthodoxie saine et éclairée.
Amicalement
Merci de me lire,
Je n’attaque pas la mehitsa en tant que telle. Mais je cherche à comprendre les racines de l’extrémisme qui plongent souvent dans la modération.
Je soulève la question du sens même de ces interdictions qui dans le fond mettent en place une forme de ségrégation qui est bien réelle, même si le champ d’application reste assez symbolique. La halakha ne fait pas la différence de lieu. Ce qui se passe dans le lieu du sacré, n’est pas chose innocente, cela doit faire sens pour le reste, offrir une direction à la société.
Je suis moi-même coincé dans une bonne part de ces interdictions que je respecte (témoignage des femmes par exemple que je refuse à contre cœur pour des raisons halakhiques.
La question n’est pas si tel ou tel individu est sexiste ou non, des quantités de rabbins très honorables et d’une grande rigueur sur ces questions, y compris des hassidim parmi les plus strictes, ne sont pas forcément sexistes sur le plan personnel.
Ce qui m’intéresse, ce sont les questions de fond et ce que peut engendrer ou pas un système de pensée, des attitudes, des interdits… La question que je pose est celle du sens même de certains rites et habitudes qui ne sont pas innocents pour peu qu’on les regarde avec un brin d’objectivité. J’ai été le premier à les accepter et les trouver normaux durant des années. La question ne me traversait même pas l’esprit. Pour réfléchir à cela, j’ai essayé d’inverser les rôles, de me mettre à la place des femmes et là je trouve cela insupportable.
Le mouvement massorti en soi ne m’intéresse pas vraiment en tant que tel, c’est un cadre, les idées défendues, oui beaucoup plus. Je suis convaincu que ces questions qui ont déchiré le mouvement massorti durant des décennies et soulèvent force débats chez les orthodoxes modernes aujourd’hui, sont inéluctables.
Nous devons avoir le courage de les poser, même si cela viole nos habitudes.
Je ne parle donc pas en tant que massorti , mais d’un point de vue éthique. Affirmer dans une bénédiction qu’il est intrinsèquement moins bien d’être une femme qu’un homme, reste du point de vue éthique très difficile à défendre. Mieux vaut s’abstenir ou la changer à mon avis.
La mehitsa est une autre affaire. S’il s’agit de séparer les sexes de façon égalitaire (strictement avec une bima partagée) comme on le fait à Shira Hadasha à Jérusalem, pourquoi pas ? Mais en général, la mehitsa n’est pas cela, c’est une véritable ségrégation qui réduit la femme au rôle de spectateur de son propre judaïsme.
Tous les grands personnages du mouvement massorti cités n’échappaient pas au sexisme du moment (partout présent à leur époque dans la société), leur ouverture et leur grandeur ne leur font pas échapper à ce travers bien naturel. J’appartiens à une génération qui engrange les fruits des travaux et recherches des générations passées et j’en tiens compte. De toute façon je refuse de me focaliser sur ce mouvement et c’est l’ensemble du judaïsme qui m’intéresse.
Depuis tous ces personnages, on a repensé à toutes ces questions. Des travaux importants ont été faits sur la question féministe (pas une caricature revancharde, mais des réflexions profondes). Je pense que nous ne pouvons y échapper et que la synagogue ne doit pas être un reliquat des préjugés passés, mais aussi un modèle et un signe d’avenir.
Que les questions que tout cela soulève soient difficiles, voire impossibles pour le judaïsme classique, je le sais. Il n’empêche, elles sont là. Notre rôle est d’y réfléchir avec sérieux. C’est ce sérieux qui m’intéresse.
Yeshaya Dalsace
Réaction d’un rabbin américain
Yeshaya,
I finally had a chance to read the essay. What a marvelous piece of work ! No wonder it’s gotten a lot of attention in the community ; it deserves it. (What’s “libé ?” Whatever—a newspaper or a magazine, obviously : I hope something widely read.) The more I read and see, the more certain I am that we are headed not only for a true culture war, but actually for the kind of schism from which there will be no turning back : these people are not going to make peace, just demand more and more. And we will either give it to them or not, which decision apparently remains to be made. I know where I stand, but I wonder where everybody else does. We’ll find out soon enough ! We’ll be in Israel in the summer…if you’ll be around, let’s get together.
Amical chalom,
M. C
Lire en ce sens http://www.nytimes.com/2012/01/20/o...