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Histoire du calendrier hébraïque

Histoire du calendrier hébraïque

Par Mark Ellison -

En fait le calendrier juif est le résultat d’une longue évolution soumise à bien des influences. Même la référence à la création du monde n’a pas toujours été évidente.

En regardant de plus près le calendrier hébraïque, nous trouvons, que rares sont ses constituants qui sont vraiment d’origine juive.

Regardons d’abord le fameux cycle de 19 ans : nous avons un calendrier luni-solaire, où les mois sont lunaires, et les années solaires.

Puisque l’année solaire de 365,24219 jours n’est pas divisible facilement en mois lunaires, qui eux font chacun 29,530589 jours, il faut de temps en temps ajouter un mois de plus - c’est l’Adar Sheni. Ceci arrive, selon notre calendrier, 7 fois tous les 19 ans, et permet d’aligner les fêtes selon les bonnes saisons - Pessah’ au printemps et Succot en automne.

C’est le contraire du calendrier islamique, par exemple, qui est purement lunaire, avec pour résultat que le mois de Ramadan est décalé de plusieurs jours chaque année, et peut tomber aussi bien en hiver qu’en été.

Un cycle fixe emprunté aux grecs

Mais ce cycle de 7 mois supplémentaires tous les 19 ans n’a pas été inventé par les juifs, et était connu dans différents endroits. En effet, c’est le cycle Métonique, d’après un certain Méton, un astronome grec qui vivait en Babylonie en 432 avant notre ère (bien qu’il semble que les Chinois utilisassent déjà une version de ce cycle quelques dix-neuf siècles avant Méton). Avant l’adoption par les juifs de la découverte de Méton, c’était le Sanhédrin qui décidait d’ajouter un mois de temps en temps, quand les fêtes commençaient à être en avance sur leur bonne saison, comme le montre la lettre suivante :

"A mes frères, les exilés de la Babylonie, de la Médie et à tous les exilés d’Israël, shalom ! Nous vous faisons savoir que les pigeons sont encore trop tendres, les brebis trop jeunes la germination du blé encore trop peu avancée ; aussi nous a-t-il plu à nous et à nos collègues d’augmenter de 30 jours l’année en cours"

(in La saga des calendriers de J Lefort ed Belin)

Après la destruction du second temple, et la dispersion de juifs dans le monde, il fallut bien trouver un système plus fiable et efficace, mais c’est seulement au 4ème siècle de l’ère chrétien que le patriarche Hillel II édicte les règles complexes de calcul des longueurs des mois et des années paires. Ces règles, que nous appliquons aujourd’hui, n’ont trouvé d’acceptation parmi l’ensemble des juifs que quelques siècles plus tard. Pendant encore longtemps, plusieurs systèmes de calendrier perdurent et se côtoient. (voir les découvertes de la Gueniza du Caire)

Des mois babyloniens

Ce qui est vrai pour le cycle calendaire, l’est également pour les noms des mois. Les noms que nous connaissons si bien aujourd’hui (Nissan  , Iyar…) sont d’origine chaldéenne, de Babylonie.

Dans la Tora, les mois sont généralement anonymes - le mois de Tishri   est simplement "le septième mois".

A l’époque des rois, il s’appelait "Etanim" ; le nom Tishri   vient du chaldéen "tasritu" - ce n’est pas un nom d’origine hébraïque.

Décompte des années

Pour revenir à la méthode juive de décompte des années, c’est aussi un emprunt à la société environnante. En effet, dans la Bible, et même après, les années sont désignées selon de début du règne d’un personnage important, soit juif (grand prêtre ou roi) ou non. Le Talmud  , et la littérature médiévale, utilisent surtout de datation depuis le début de l’époque Séleucide soit 312 avant l’ère chrétien, mais ne font pas référence à un calendrier basé sur la création du monde (sinon une fois dans Avoda Zara 9b).

C’est vrai qu’un midrash   (Seder Olam) utilise le terme "ère de la création", et donne une chronologie d’Adam jusqu’à l’époque romaine, mais ses calculs sont erronés, et n’ont jamais été acceptés tels quels, ni utilisés pour le calendrier juif. Nous ne connaissons même pas de quand date le Seder Olam - selon la tradition, il est écrit par le rabbin   Yose ben Halafta, Tana   qui vivait au milieu du 2ème siècle EC, mais il est probablement bien plus tardif.

En fait, il semble que ce furent les querelles internes de l’église chrétienne qui ont conduit les juifs à compter depuis la création du monde. dans l’empire romain, les années étaient généralement comptées selon l’ère diocletiènne, c’est à dire depuis l’accesion de l’empereur romain Dioclétian.

C’est en 531 (ou 247 anno diocletiani) que Dionysius Exiguus (ou "Denys le Petit") propose un changement. Il fait remarquer que Dioclétian était un persécuteur notoire des chrétiens, et qu’il serait plus convenable de compter les années à partir de la naissance de Jésus.

Il procède alors au décompte des années, depuis la création, selon la bible et d’autres sources, pour arriver à la date de naissance de Jésus. Denys était un moine, et mathématicien accompli, qui vivait à Rome. A son époque il était célèbre pour sa méthode de calcul de la date de la pâque chrétienne, qui est très complexe depuis que les évêques de Nicée décidèrent en 325 que pâques ne doit jamais tomber le même jour que Pessah.

La proposition de Denys mit quelques siècles à se faire accepter ; malgré une percée en Angleterre au 7ème siècle, il faut attendre le 9ème siècle avant que l’utilisation de son calendrier ne soit répandue en Europe (comme la notion de "zéro" était inconnu en Europe avant le onzième siècle, les années de l’ère chrétien commencent avec -1 ; d’où la controverse sur le début du millénaire).

Les rabbins   médiévaux étaient consternés que les juifs soient obligés d’utiliser la naissance de Jésus pour leur vie quotidienne, et se mirent donc à trouver une alternative acceptable - la date de la création du monde. Après quelques discussions et de nombreux calculs, ils décidèrent que cette date est le 7 octobre 3761 avant notre ère.

Parmi les premières utilisations avérée de "l’ère de la création", on trouve déjà au neuvième siècle une epithathe sur un tombeau en Italie de sud.

Si c’est en partie à cause des chrétiens que les juifs ont adopté leur calendrier, celui-ci n’en a pas moins un aspect unique au monde : il est le seul qui ne prenne pas comme origine un évènement humain (naissance d’un prophète où accession d’un roi) mais plutôt un instant universel - celui où Dieu s’est manifesté pour la première fois, celui du début de toute chose. (Au niveau symbolique bien évidemment, car en réalité le monde et l’humanité elle-même sont bien plus anciennes et le décompte juif de 6000 ans env. n’a aucun sens scientifique ou historique).

Cette petite chronique du calendrier - comme tant d’autres - nous rappelle que le destin du peuple juif ne saurait être hors du monde, ni hors du temps. Pour les juifs, l’histoire ne commence pas avec l’histoire des juifs, mais avec le début du monde. Mais cette histoire est aussi indissociable de celle des peuples parmi lesquels les juifs ont vécu.

Conférence sur les mois du calendrier juif

Tamar Schwartz, remarquable pédagogue nous fait le plaisir de commenter le calendrier et la signification des noms des mois sur Akadem... A écouter absolument. http://www.akadem.org/sommaire/seri...

Messages

Histoire du calendrier hébraïque

Permettez moi ici de coller une réaction du rav chaya de leava à votre article sur le calendrier

"J’ai lu l’article cité dans le lien internet du site massorti  .com. Ma conclusion est que l’auteur de cet article ne sait pas de quoi il parle, preuve en est que dans cet article il est écrit : "Le talmud   et la littérature médiévale (…) ne font jamais référence à un calendrier basé sur la création du monde".
Cela est faux. Dans le talmud   (de tous les avis, le talmud   a été achevé au 5e siècle de l’ère chrétienne) traité Avoda Zara page 9 verso, il est écrit : " Après 4231 années depuis la création du monde, si quelqu’un te dit : Achète un champ qui vaut 1000 deniers pour la somme de 1 denier, ne l’achète pas". Les rabbins   du talmud   faisaient bien référence à la création du monde. En ce qui concerne la littérature médiévale, il y a des dizaines de références au calendrier débutant à la création du monde. Entres autres, le Sefer hayachar de Rabbénou Tam, partie ’hidouchim chap.765, Tossefot Rid traité Avoda Zara page10 recto, Baal hamaor traité Avoda Zara page2 verso, etc. En fait, j’ai compris d’où venait l’erreur. Ce site est un site réformateur, preuve en est qu’à la droite de l’article on voit la photo d’une ‘femme rabbin  ’, et d’un rabbin   qui ne sait pas porter les tefilin   (il les porte sur le front, ce qui est interdit et n’a aucune valeur). On peut aussi lire dans ce site qu’on peut utiliser un préservatif masculin si on a déjà procréé. Or tous le monde sait bien que le sperme ne peut pas pénétrer dans le corps de la femme avec un préservatif masculin. Cela est donc du zéra lévatala (sperme émis en vain). Dans le Choulkhan Aroukh, tome Even Aezer chap.22 alinéa 1, il est écrit que c’est le péché le plus grave de la Torah. Donc ce site n’a rien de juif, si ce n’est l’étiquette."

Voilà , en tant que juif pratiquant ne me considérant pas comme orthodoxe  , médecin, rationaliste, et non extremiste , permettez moi de vous dire que je pense sincèrement que vous vous trompez lourdement avec votre mouvement "massorti  " , il suffit de naviguer sur votre site pour constater que tout le judaisme y est remis en question.
Vous ne manquez pas d’audace de remettre en cause des enseignements clairs et nets de tanaim, amoraim , commentés et clarifiés par des centaines de rabbins   au cours des siècles , qui ont fait ce travail avant que vous n’arriviez sur terre et qui ne vous ont pas attendu pour expliquer ces textes dans les moindres détails avec une précision exceptionnelle.
C’est donc je crois une erreur monumentale que vous commettes, votre mouvement qui se veut "centriste" n’est rien d’autre qu’une tentative avortée de faire dire à la torah ce que vous voulez, et en vous démarquant du mouvement libéral vous semez le doute quant à vos positions réelles.
Votre prose qui je dois le reconnaitre, est bien rodée, et vos connaissances théoriques semblent solides, cependant votre argumentation sur la "ré-interprétation des textes , ou mises à jour" de certains interdits de la torah est tout simplement pathétique et vous contredisez l’ensemble des grands décisionnaires d’aujourd’hui ayant eux même reçus la torah de leurs maitres qui eux mêmes l’ont recu de leur maitre et ainsi jusque moche , aucun décisionnaire crédible ne vous soutient, vous contredisez le choulhan aroukh, vous autorisez les interdits etc...
Bref si vous aviez vécu il y’a 2000 ans, votre tache aurait été plus facile puisque le christianisme naissait, avec comme base des reflexions communes aux votres avant que Jesus ne soit ré-interprété par les apotres pour en faire une religion autre ce que lui ne voulait pas.

Bref, ne jouez pas encore une fois la carte des "agressés" si vous choisissez de répondre à mon argumentation, vous avez largement usé ce joker en tentant de stigmatiser tous les gens qui vous interpelle sur les scandaleux articles et billets que vous mettez en ligne, et cela entache votre crédibilité .
Vous ne tiendrez pas une seule seconde en face d’un grand rav de notre génération (richon letsion et autres) et vos reflexions pourraient être réfutées par des milliers d’arguments.

Comme d’habitude dans ce genre de mouvements , il n’y aura que les juifs qui n’ont pas eu la chance d’avoir une éducation toraique complète qui avaleront vos digressions et vous surfez dangereusement sur la vague de la philosophie ( que la torah encourage mais que vous semblez confondre avec une interpretation libre de textes qui ne vous ont pas attendu pour etre expliqués au grand jour !) vous réclamant de Manitou, qui sur pourtant bien des points ne partage absolument pas vos interprétations, et vous targuez du fait que ses élèves ont pris des chemins différents. Pour etre plus clair pour les internautes, les élèves de manitou ont épousé les courants religieux sionistes orthopraxes en grande majorité , se soumettant au choulhan aroukh, et aux responsas des grands rabbins   d’ISRAEL en vigueur, certains, très peu se sont égarés !
Vos talents d’auteurs convaincront donc ces gens là et ceux qui veulent un judaisme semi-libéral avec bonne conscience ! c’est déjà cela.

Un peu d’humilité par rapport à nos commentateurs ancestraux ne vous ferait pas de mal.

Réponse au forum

Cher Monsieur le médecin,

Permettez d’abord une remarque sur la forme. Comme beaucoup trop de réactions de ce type de la part du public orthodoxe  , le ton est celui du mépris et de la condescendance. Je ne joue pas « la carte des agressés », je fais une remarque sur un texte écrit en toutes lettres.

Pourquoi avoir besoin de dénigrer au lieu de répondre ou faire des remarques pertinentes ? Pourquoi susciter des sentiments négatifs et de l’agressivité au lieu de faire avancer un débat ? Ce mépris vis-à-vis du monde extérieur au cercle fermé du judaïsme orthodoxe   est décevant. Même quand une remarque est juste, (celle sur le Talmud   Avoda zara) le ton et l’arrogance gâchent tout. C’est bien dommage. Ce n’est pas la première fois que je constate cela et je me permets donc de le souligner.

Sur le fond, la remarque sur la question de la citation talmudique et certaines faiblesses de cet article sont justes. Nous y reviendrons.

Cependant, pour le reste, c’est la parfaite illustration de ce ton prétentieux et méprisant qui rend certains (j’insiste sur « certains » et ne tombe pas dans l’amalgame et le cliché) milieux orthodoxes   imbuvables aux personnes aspirants à un certain niveau de débat et d’étude, une certaine exigence d’honnêteté intellectuelle.

2Réponse à Ron Chaya2

Je reprends d’abord les propos du rabbin   Ron Chaya : « En fait, j’ai compris d’où venait l’erreur. Ce site est un site réformateur, preuve en est qu’à la droite de l’article on voit la photo d’une ‘femme rabbin  ’, et d’un rabbin   qui ne sait pas porter les tefilin   (il les porte sur le front, ce qui est interdit et n’a aucune valeur). »

Réponse : Ce cite s’affiche clairement comme celui du mouvement Massorti   dont il donne l’historique et qui est connu par ailleurs. C’est un courant moderniste mais profondément différent du courant réformateur. Les confondre, montre un certain amalgame et donc un manque de rigueur historique et théologique. Pas besoin de la photo d’une femme rabbin   pour le comprendre et le savoir. Une photo ne veut rien dire… Un juif devrait se défier des images. De même pour les Tefilines   de mon ami Rivon Krygier qui, il est vrai a le front un peu trop dégarni… Il sait très bien mettre des tefilines   et c’est absolument ridicule de juger de cela sur une minuscule photo prise de biais… Jugement des autres, superficialité du jugement, se fier à une image, un peu court… Polémique et mépris. Din sans Hessed. Que dire si à l’inverse on reprenait l’argumentaire aussi délétère à prpops de tout site orthodoxe   ? « « En fait, j’ai compris d’où venait l’erreur. Ce site est un site fondamentaliste, preuve en est qu’à la droite de l’article on voit une photo de rabbin   barbu avec un chapeau… » Si on en était tombé là, ce serait vraiment lamentable.

Coller l’étiquette « réformateur » pour sous entendre le manque de connaissance et l’inexactitude, c’est un peu court encore. Il existe de très grands savants du judaïsme dans tous les milieux (y compris totalement athée et même non juifs). Les étiquettes ne veulent rien dire. Les croyances et les pratiques, les habits ou encore le sexe de ces savants n’ont aucune importance et aucune incidence sur leur connaissance. Si une erreur se glisse dans un discours, on la corrige. Si une opinion erronée s’exprime, on en débat et on propose autre chose. Mais affirmer que l’information est fausse du fait même des étiquettes colées aux gens, c’est vraiment une cuistrerie. Si je veux connaître l’histoire du calendrier juif (histoire extrêmement complexe), je vais lire des travaux savants et universitaires sur la question en me fichant pas mal de l’étiquette et du sexe de celui qui écrit, s’il est de bonne foi bien entendu et compétent.

2Le préservatif2

Sur la question du préservatif (aucune relation entre les deux sujets), Ron Chaya dit : « On peut aussi lire dans ce site qu’on peut utiliser un préservatif masculin si on a déjà procréé. » C’est faut, les choses ne sont pas exprimées en ces termes (mais pour s’en rendre compte, il faudrait lire le texte sans le survoler). Il y a une incitation à utiliser un préservatif dans les cas à risque, nuance. C’est le bon sens même et c’est très défendable du point de vue de la Halakha  . Puisque vous êtes médecin, cela devrait aller de soi. Ron Chaya rejoint peut-être les opinions du Pape sur la question du préservatif, c’est son droit respectable, pas le rabbin   Dorff   d’où vient l’article sur la contraception. Dorff   connaît parfaitement le concept de Zera levatala et en tient compte (ici petit résumé de tout un livre). C’est vraiment prendre les autres pour des imbéciles que de préjuger de leur ignorance de principes aussi basiques. Je suis personnellement de l’avis de Dorff  , il me semble évident et le bon sens même, dans le contexte actuel, que les gens qui ont des rapports sexuels doivent se protéger. On peut bien sûr leur recommander l’abstinence, mais c’est un peu facile et ne pas regarder en face un réel problème. La question du zera levatala et le fait que des mouvements piétistes et kabalistes comme c’était le cas de Jossef Caro   en on fait une si grave faute, mériterait de toute façon un vrai développement et une analyse que nous ne pouvons faire ici. (voir Atlan : « Les étincelles du hasard » qui dit des choses très pertinentes sur la question).

2Imprimatur de Ron Chaya2

Ron Chaya en quelques lignes en arrive à une conclusion bien catégorique : « Donc ce site n’a rien de juif, si ce n’est l’étiquette. ». Nouvelle cuistrerie et jugement à l’emporte-pièce. Pour quelqu’un qui prouve la véracité de la Tora et quasiment l’existence de Dieu en une conférence assez loufoque, rien d’étonnant. Il n’y a rien à répondre. Si Ron Chaya ne considère pas le reste du monde juif (quel que soit le courant), comme juif, c’est son problème. Le reste du monde juif se passe très bien de son imprimatur. Ron Chaya, ni aucun rabbin   n’a le monopole de la définition qui est d’ailleurs assez complexe à donner au regard des bouleversements théologiques et sociaux que traverse le monde juif.

2Réponse au médecin anonyme2

Vos remarques personnelles, à vous le médecin rationnel et anonyme, ont le tort de faire deux raccourcis : l’un que rien ne serait plus discutable dans le judaïsme ; l’autre que toute discussion relève du christianisme.

Sur le christianisme, c’est la panacée que l’on sort régulièrement contre la moindre innovation ou le premier adversaire venu. C’est tout simplement de la mauvaise foi ou une ignorance totale de l’histoire, je ne vois vraiment pas ce que le christianisme vient faire là-dedans ! Pour relativiser un peu l’histoire des anathèmes au sein du judaïsme, je vous invite à consulter ceux qui ont été lancés contre Maimonide  , ou Ramhal, ou le hassidisme   et bien d’autres, devenus totalement légitimes avec le recul du temps… Quand on lit l’avalanche de diatribes et d’accusations mensongères lancées contre ces personnes ou écoles de bonne foi, on ne peut que rester de marbre face à l’accusation de christianisation que vous avez lancée ou de non-judaïsme d’un Ron Chaya.
La vraie question consiste à savoir si le judaïsme est encore un système spirituel capable de discussion ouverte. Les tenants du modernisme, quels que soient leur approche et leur courant, en sont convaincus. Les intégristes en sont offusqués. Le vrai problème doit être traité à ce niveau. Mais c’est un débat de fond et nous un jugement sur photos.

2Judaïsme figé ?2

Je ne peux le développer ici, dans cette brève réponse, mais je peux juste vous affirmez que d’un point de vue moderniste, si le judaïsme n’est plus capable de faire face aux défis de la modernité, refuse toute discussion de fond et remise en cause possible, c’est qu’il est rentré dans une phase mortifère qui ne le mènera nulle part. Se soulève ici la question de la fidélité exigeant le renouvellement interne et qui ne doit pas être confondue avec le fidéisme.

Je suis convaincu personnellement que si le judaïsme devait s’enfermer dans une vision passéiste, radicale et intégriste et ne voyait d’autres possibilités pour sa survie que celle –ci, c’en serait fini d’une des plus grandes religions du monde. Cela ne veut pas dire qu’il faut remettre en cause tout et n’importe quoi. Il y a un juste milieu entre le développement anarchique du cancer et la sclérose. Il y a la croissance normale et naturelle.

2Les vrais juifs et les faux2

Vous dites également : « Comme d’habitude dans ce genre de mouvements, il n’y aura que les juifs qui n’ont pas eu la chance d’avoir une éducation toraique complète qui avaleront vos digressions ». Premièrement le mot de « digressions » est une nouvelle fois méprisant. Mais surtout c’est faire croire que les savants sont ailleurs, que les mouvements modernistes sont peuplés d’ignorants… Quand j’étais à la yeshiva, c’est ce que je ne cessais d’entendre. Comme je suis amateur de bibliothèques bien fournies, je suis allé consulté, non plus celle de la Yeshiva (bien évidemment soumise à la censure) mais celle de l’université. J’ai voulu juger par moi-même et déteste le système d’étiquettes et de bons et mauvais points distribués par les censeurs. Surprise, les plus grands savants du judaïsme et les livres les plus passionnants se trouvent à l’université ! Une avalanche de connaissance et de recherches ! D’immenses talmudistes, ayant parfois fréquenté par le passé des milieux radicaux, connaissant parfaitement les sources les plus diverses du judaïsme… Votre « comme d’habitude » me rappelle dans votre domaine professionnel le grand argument « le poumon ! Le poumon vous dis –je ! », cher à notre ami Molière, qu’il reste toujours bon de relire. Lors de mes études au séminaire rabbinique Massorti  , j’ai eu l’honneur et la chance d’étudier avec pas moins de cinq professeurs récompensés par le très prestigieux Prix d’Israël (espèce de Nobel israélien) y compris en Talmud  . Comme gens mal éduqués ont fait mieux. Je connais par contre assez bien le milieu ultra-orthodoxe   et son système éducatif que subit une part de ma famille, le moins qu’on puisse dire c’est qu’il manque sérieusement de culture générale et d’esprit critique !

Si « avoir une éducation toraique complète » consiste à l’endoctrinement, l’enfermement sectaire et l’ignorance… Je préfère choisir d’autres références éducatives. Si par contre, vous entendez par là, s’intéresser à tout ce qui est juif, tout ce qui est spirituel, tout ce qui est Tora… Nous sommes alors complètement d’accord.

Vous accusez ce site de « stigmatiser tous les gens qui vous interpellent sur les scandaleux articles et billets que vous mettez en ligne » : je voudrais savoir qui a été stigmatisé ? Je voudrais savoir quel article vous semble scandaleux ? C’est l’inverse, on laisse s’exprimer, on reconnaît nos erreurs si nécessaire, on répond point à point… y compris pour les forums qui nous attaquent comme celui –ci. Je signale que le site de Ron Chaya, lui, n’est pas très friand de contradictions aux thèses pour le moins fantaisistes sur la science et l’histoire qui y sont développées.

Si un article était scandaleux, il serait retiré immédiatement. Où est le scandale ? Le scandale est-il de parler librement de certains sujets ? De ne pas faire de censure ?

Vous amenez enfin le grand rabbinat d’Israël en dernier point d’argumentation, je suis désolé, mais le grand rabbinat d’Israël est une institution des plus critiquable. Comme tous les « grands rabbinats ». Certains des grands rabbins   ont été remarquables, d’autres lamentables. Pour moi c’est une référence comme une autre, rien de plus, je dois en tenir compte, mais sûrement pas y faire allégeance.

Voilà pour la forme, la question de la source talmudique est en dessous (suite…)

Yeshaya Dalsace

Réponse au forum suite

Tout cela pour faire une remarque sur la question de l’ancienneté de la coutume de dater les années à partir de la création du monde !

Que de détours pour pas grand-chose !

2Le Talmud   Avoda Zara2

C’est tout à fait vrai, que cette idée apparaît dans le Talmud   et certains points de cet article sont à revoir. Je tiens à rendre hommage à Ron Chaya sur le fond de sa remarque. Mais elle ne change pas fondamentalement le problème. D’abord parce que cette idée de calendrier à partir de la Création reste néanmoins très tardive et n’a jamais été exprimée avant. Il semble bien que cette idée était relativement nouvelle, en tout cas on a aucune preuve de son ancienneté.

Quant à la citation elle-même du Talmud   Avoda Zara (cette idée n’apparaît pas ailleurs dans les sources talmudiques et midrashiques, sauf erreur de ma part, alors que la question du temps reste un sujet abondamment traité), sa grande ancienneté prête à caution. Il faut savoir que le texte du Talmud   a été remanié abondamment. Que la version que nous avons, celle de l’édition Vilno, reste truffée d’erreurs et de remaniements de copistes. Nous n’avons, hélas et du fait des persécutions chrétiennes, aucun manuscrit très ancien (le seul complet est celui de Munich). Il est tout à fait possible que cela soit un ajout de copiste. Pour le savoir, il faudrait aller vérifier une édition critique (ce que je n’ai pas sous la main). Je sais que l’expression apparaît dans plusieurs manuscrits d’Avoda Zara que j’ai pu consulter, mais cela ne suffit pas à prouver son ancienneté au-delà de l’âge de ces manuscrits.
Ron Chaya ignore je crois totalement le domaine de la recherche talmudique, il aurait sans doute quelques surprises s’il s’y penchait sérieusement, au lieu de chercher à expliquer l’âge des dinosaures.

Le grand texte qui se préoccupe de tout cela est le Seder Olam, midrash   important attribué à un Tana  , Rabbi Yossé, mais qui semble plus tardif aux savants qui le considèrent comme plus récent que l’époque talmudique.

On peut donc en effet faire remonter cette idée jusqu’à l’époque talmudique. Donc à l’empire romain. Mais le peu d’usage qui en est fait, montre que cela n’était pas très courant. La même page de Talmud   se réfère d’ailleurs à la destruction du Temple comme système de référence pour compter les années. Par contre, les occurrences sont très nombreuses dans la littérature rabbinique plus tardive, montrant par là que l’idée s’était répandue et est devenue peu à peu la norme.
On sait par ailleurs que la question du calendrier et du calcul du temps a été sujet à de nombreuses polémiques dans l’histoire juive (voir la littérature de Kumran sur le sujet et notamment celle du livre des Jubilés, voir également les polémiques internes au Talmud  , parfois violentes). Certains juifs utilisaient même un système totalement solaire !

2Chronologie biblique2

La Bible elle-même ne donne aucune chronologie très fiable et emploie souvent un décompte des années tout à fait symbolique (l’âge des premiers hommes ou encore le chiffre 40 qui représente un cycle rond par exemple). De toute façon, il est évident à un esprit quelque peu au fait de l’histoire que la chronologie biblique reste totalement mythologique pour les années anciennes et n’a rien d’historique avant le livre des Rois. Dans la Bible on prend toujours comme référence, quand référence il y a, l’année du règne du roi du moment, jamais celle de la création du monde. La méthode était courante à l’époque, mais il faut savoir qu’il y avait une différence entre le système babylonien et celui des Égyptiens sur la question, les uns comptant à partir du début du règne, les autres une année après la prise de fonction. Quel système avaient adopté les hébreux ? Nul ne le sait. De quoi rendre les savants fous ! (les rabbins   n’en parlons pas)… C’est pourquoi on pourrait écrire un livre entier sur la question du temps juif et de son calcul à travers les âges du judaïsme. C’est pourquoi également il reste extrêmement difficile de calculer une date biblique avec précision (si tenté que les renseignements que nous avons en main sont justes historiquement parlant –symboliquement c’est une autre affaire, mais il ne s’agit plus de précision).

Il faudra perfectionner cet article sur le calendrier, mais le sujet est un véritable casse-tête. Il n’empêche qu’il apporte un enseignement de base tout à fait valable consistant à montrer l’emprunt extérieur fait par les hébreux qui ne s’en cachaient pas d’ailleurs. Le nom des mois est emprunté aux Babyloniens, tout comme la forme des lettres hébraïques sur lesquels nous aimons tant à faire de l’exégèse…

2Respect des sages  2

Je tiens enfin à préciser que j’ai le plus grand respect et sentiment d’humilité face aux différentes autorités rabbiniques du passé comme du présent, (respect que j’ai constaté chez tous les rabbins   Massorti   que je connais). Ce respect et ce sentiment d’humilité ne veulent pas dire que je suis 100 % d’accord avec eux. Cela me semble honnêtement impossible.

On peut avoir humilité et respect sans dire amen   à tout !

J’ai par exemple une grande admiration pour la psika d’Ovadia Yossef  , (le mentor du parti ultra religieux Shass) tout en rejetant totalement certaines de ses idées, notamment théologiques et particulièrement sa façon de s’exprimer en public (pas piqué des vers !).

Le Shoulkhan Aroukh   ne manque pas de pages qu’il ne vaudrait mieux pas trop divulguer au grand public… certaines de ses opinions sont totalement dépassées. Il en est de même dans le Talmud   (punitions corporelles, esclavage, statut de la femme, croyance dans les démons, considérations sur la nature ou certains miracles…).

Je ne vois absolument pas le problème qu’il y a à affirmer ce genre de choses, c’est l’inverse qui est problématique ! Des pans entiers du système sont indéfendables et inacceptables pour un juif contemporain même ultra orthodoxe  . Cela ne veut pas dire que ce n’est pas une source de sagesse à remettre dans son contexte ou un mauvais sujet d’étude, bien au contraire. Qui aujourd’hui, même à Bnei Brak, souhaite vivre selon la règle talmudique stricto sensu ?

Pourquoi ne doit-on pas poser un regard critique sur nos propres sources ? Pourquoi faire fi de la connaissance contemporaine ?
Cela n’a rien à voir avec l’orgueil ou l’ignorance, bien au contraire. Dans le fond c’est ce qui a toujours été fait, d’une façon ou d’une autre, par toute la tradition orale qui n’a cessé de remettre en cause et de rediscuter les textes qu’elle avait en main.

Un judaïsme figé dans le temps et sans esprit critique (dans le respect et l’humilité) perdrait tout intérêt. Pire encore, il représenterait une caricature et un modèle abominable pour tout esprit censé, exactement comme peut l’être l’Iran des islamistes. Cela n’empêche hélas nullement des millions de personnes musulmanes d’être séduites par ce modèle… C’est vrai également dans le judaïsme. L’intégrisme fait fantasmer certains, on ne peut le nier. L’intégrisme est un mal à supporter par tous, pour certains, il est séduisant et représente l’authenticité... La psychologie humaine est ainsi faite.

En tant que médecin, vous contenteriez-vous des diagnostics et remèdes de Maimonide   qui fut un très grand praticien ? Certainement pas ! Cela veut-il dire que vous lui manquez de respect ? Encore moins ! Si lui-même vivait à notre époque, il serait ravi de pouvoir profiter de toutes les avancées scientifiques dans tous les domaines de la médecine, comme de la recherche spéculative et historique… il ne se contenterait certainement pas des moyens qu’il avait à son époque, c’est bien là sa grandeur !

Massorti   est là pour proposer un judaïsme d’ouverture, non pas un judaïsme de demi-mesures, mais un judaïsme tout à fait entier et authentique capable de regarder vers l’avenir.

Bien évidemment, il ne peut être que décrié et honni, sous tous les prétextes possibles, par l’intégrisme juif (que Dieu préserve Israël de cette maladie-là).

Merci en tout cas de la remarque qui me permet de corriger cet article et très honoré de l’honneur d’avoir la visite d’un lecteur aussi remarquable que rabbi Chaya.

Yeshaya Dalsace (webmaster)

Réponse au forum suite

Je ne connais pas l’auteur de l’article sur le calendrier mais il m’a énormément intéressé (pas comme à d’autre…).

Il semble que les juifs dataient à l’époque en fonction de l’année du début du règne du roi (et en lui administrant la fin de sa première année à roch   hachana cf traité roch   hachana 1.1)

Cependant, rien ne nous laisse penser qu’ils ne connaissaient pas la date de la création du monde, il ne l’utilisaient pas j’imagine par simplicité (4231 ans !!) c’est plus moderne de parler en année du roi (surtout si on a voté pour lui ou qu’il y en a deux !)

Le problème commence quand il n’y a plus de roi, comment compter ? Peut-on compter en fonction de l’année de la sortie d’Egypte quand nous sommes en galout ? non. Il nous reste deux options : soi s’aligner au goyim   et pourquoi pas ? (Sauf si Hitler est au pouvoir ou lenin ou encore nabukodonozor) quand les nations vont choisir de dater en fonction de Jésus (l’ascension selon les uns la naissance selon les autres…) les juifs voudrons se démarquer et vont adopter un calendrier décomptant depuis la création du monde. Type d datation que nous retrouvons qu’une seule fois dans le talmud   (d’ailleurs la seule date inscrite en temps T dans tout le talmud  , soulignons-le !)

Cependant je voudrais faire quelque remarque, si ça peut intéresser quelqu’un.

l’auteur écrit : « Un cycle fixe emprunté aux grecs Mais ce cycle de 7 mois supplémentaires tous les 19 ans n’a pas été inventé par les juifs, et était connu dans différents endroits. »l’idée du mois supplémentaire est pratiquement noir sur blanc dans la tora elle est présenté par le verset « chamor ete hodech aaviv » qui signifie que le sanhédrin doit toujours aligner le mois de Nissan   au printemps en dédoublant si besoin un mois le precedant. (Cf talmud   roch   hachana)

il ecrit encore : Un cycle fixe emprunté aux grecs Avant l’adoption par les juifs de la découverte de Méton, c’était le Sanhédrin qui décidait d’ajouter un mois de temps en temps, quand les fêtes commençaient à être en avance sur leur bonne saison.
De quelle découverte s’agit-il ? le cycle de 7 ans sur dix-neuf provient d’un calcul assez simple qu’un bon élève de troisième peu faire s’il a les données suivantes :
l’année solaire =365,24219 jours
l’année lunaires=29,530589 jours *12 mois = 354,367068
L’ecart créé est donc 10,875122 (10 Jours 21 Heures et quelque seconde) le reste c’est un jeu d’enfant…(au maximum une équation de second degré que l’on peut trouver aussi bien en tâtonnant adMéton-le)

Sa découverte est donc plutôt de la longueur du cycle lunaire et solaire. Hors il semble que les sages   avait une connaissance de la révolution de la lune « parfaite » en voici la preuve :

Le talmud   roch   hachana (32a) nous dit : que la révolution lunaire dure 29,5+2/3 d’heure (20min) + 73 parti d’heure (1heure =1080 partis)
Calculons :
2/3 d’heure =720/1080
ajoutons les 73 partis =793/1080.
Transformons en h’ : 793 / 1080 = 0,734259… Puis Divisons en 24 pour obtenir un rapport en jour = 0,0305941…
ajoutons les 29,5 jours du départ et le chiffre magique apparaît : 29,5305941
le talmud   ramene cette donnée au nom d’un amora qui dit l’avoir reçu de la maison de son grand-père
Cette donné n’était pas aussi précise dans le monde scientifique il y a juste 50 ans, et ce n’est pas par leur sagesse que nos sages   ont connu cet élément, il l’avait reçu du Sinaï en « Tora orale »
Méton, lui par son immense sagesse (adMétons-le) s’est approché de ce nombre lui permettant de proposer une solution 7/19.
Mais dire que les juifs, lui ont empruntaient ça, ça Métonnerait.

Il ecrit encore : « Si c’est en partie à cause des chrétiens que les juifs ont adopté leur calendrier, celui-ci n’en a pas moins un aspect unique au monde : il est le seul qui ne prenne pas comme origine un évènement humain (naissance d’un prophète où accession d’un roi) mais plutôt un instant universel - celui où Dieu s’est manifesté pour la première fois, celui du début de toute chose. »

Enfin toute personne sensé sait que le monde à quelque 5 milliard d’années (le peintre de la grotte de Lasceau… 15 millions d’annee deja) Comment dans un site intellectuel comme celui-ci on a laissé passer de telle supercherie, Mr Dalsace !?

Harry

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