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Commentaires sur la parasha Yitro

Commentaires sur la parasha Yitro

Le don de la Tora au Sinaï

Doublons !

La Torah, et même l’ensemble de la Bible, est parcourue par un certain nombre de répétitions. Notre parasha  , de ce point de vue, est typique de ce phénomène. En effet, trois textes, trois parties du narratif, se retrouvent à d’autres endroits de la Torah.

Ainsi l’établissement d’un système judiciaire pyramidal, pour soulager le travail de Moïse, est répété tout au début du livre du Deutéronome. Le départ de Yitro, beau-père de Moïse, est de nouveau décrit dans la parasha   Béhaalotkha (Nombres, 10, 29-32). Quand aux dix commandements, il est bien connu qu’une deuxième version se trouve dans Vaéth’anane (Deutéronome, 5, 6-18). De plus, lorsque l’on examine ces "doublons", on s’aperçoit que des différences, parfois significatives, existent dans le contenu de ces récits ou de ces textes. Ainsi, dans notre parasha  , c’est Yitro qui suggère à son gendre Moïse de mettre en place une hiérarchie judiciaire.

La critique biblique s’appuie en grande partie sur ces répétitions pour construire ce que l’on appelle "la théorie des sources", chaque "doublon" correspondant à une tradition différente de la civilisation hébraïque ; ces traditions auraient été à un moment donné réunies ensemble pour former la Torah. Plusieurs aspects de cette critique scientifique, qui s’appuie sur la science littéraire moderne, sont intéressants pour le lecteur traditionnel et permettent parfois de mettre l’accent sur des particularités du texte qui nous auraient échappées. Cependant elle me semble pêcher par un défaut de taille : elle fait l’impasse totale sur l’unité du texte. On a parfois l’impression que certaines contradictions textuelles sont tellement "énormes" que l’on comprend mal comment le rédacteur final qui aurait compilé les différentes sources n’aurait pas été tenté d’y mettre une certaine harmonie.

Les maîtres de la tradition n’ont pas attendu la critique biblique pour souligner l’existence de ces "doublons" et de leurs contradictions. Chacun d’entre nous, lorsqu’il va prier le vendredi soir à la synagogue, participe en fait de cette question. Le premier couplet du cantique "Lekha dodi" vient en effet à la fois poser le problème et lui proposer une solution : "Shamor vézakhor bédibour éh’ad" – "Garde ! et Souviens-toi ! ont été prononcés en une seule parole". Il s’agit ici d’un constat de la différence entre la version du commandement du shabat dans la parasha   de cette semaine (zakhor – souviens-toi) et la version de la parasha   Vaéth’anane (shamor – garde). Dans le langage divin, les deux mots ont été prononcés en une seule parole, car Dieu a la capacité d’unir des valeurs différentes. Mais la Torah parle le langage des hommes, pour reprendre l’expression de Rabbi Ishmaël, et notre langage comme notre compréhension limitée nous obligent à exprimer cette idée double par deux phrases distinctes. En chantant "Lekha dodi", nous acceptons donc de recevoir le shabat dans sa totalité : aussi bien son universalité telle qu’elle s’exprime dans le commandement que nous lisons cette semaine et qui le lie à la création du monde, que son particularisme du livre du Deutéronome, qui relie le commandement du shabat à la sortie d’Egypte. De manière plus globale, il nous semble que le commandement implicite du Lekha Dodi exige de nous une acceptation plus complexe du message de la Torah, une demande de refuser la lecture superficielle, univoque et simpliste. Ce message se relie, finalement, avec l’idée que sans Torah orale, sans commentaires et sans le foisonnement des opinions contradictoires, il n’y a pas de véritable Judaïsme, mais une sorte de religiosité du texte qui perd toute sa profondeur.

Terminons sur un autre exemple de cette "redondance différenciée" du texte des dix commandements. Une autre différence entre notre parasha   et celle de vaéth’anane se trouve dans le commandement concernant le respect dû aux parents. Dans le texte de cette semaine, à propos de la récompense promise si nous respectons ce commandement, nous lisons : "afin que tes jours se prolongent sur la terre que l’Eternel ton Dieu te donne". Dans la deuxième version, nous trouvons : "afin que tes jours se prolongent et afin que le bien soit pour toi sur la terre …". Le commentateur Hizkouni, s’appuyant sur un passage du Talmud  , constate qu’en ajoutant le "bien" aux promesses de récompense, la Torah complète l’alphabet hébraïque décliné dans les dix commandements, puisque seule la lettre "tet" manquait jusqu’alors à l’appel, et qu’elle se trouve dans le mot "bien". Comme si la Torah avait voulu attirer notre attention sur le lien existant entre le respect des parents et le bien qu’ils nous apportent à travers la transmission de notre identité juive, symbolisée ici par l’alphabet enfin complété. Mais seule une lecture authentique et plurielle de la Torah, dans l’acceptation de ses contradictions volontaires, peut nous amener à ce type de réflexion.

Rabbin   Alain Michel – Rabbin   Massorti   à Jérusalem et historien

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Liberté nouvelle

La liberté n’est pas un fait : elle est un faire qui doit sans cesse se conquérir sur les conditions de sa réalisation.

Après de multiples péripéties, le peuple d’Israël arrive enfin face au Sinaï.

Tout se met en place pour le grand événement : la Révélation du Sinaï. La montagne tremble, le peuple aussi, il y a des tonnerres, des voix, des nuées… Et puis une voix qui se fait entendre et qui énonce la première des dix Paroles : « Je suis la Transcendance ton Dieu qui t’ai fait sortir de la terre d’Egypte, de la maison des esclaves » (Exodes 20,2). C’est tout. Pas un mot de plus. Le mot suivant nous introduit déjà dans la deuxième parole. Quoi de neuf dans cette première parole ? Apparemment, rien. Nous savions déjà tout cela depuis belle lurette. Alors pourquoi le répéter ?

Et puis surtout, on aurait encore pu être plus court, en disant : « Je suis la Transcendance ton Dieu qui t’ai fait sortir de la terre d’Egypte ».

Pourquoi ajouter : « de la maison des esclaves » ? On le savait bien aussi cela.

Ou peut-être pas assez ? Car je puis avoir l’impression d’être sorti d’Egypte, sans être vraiment sorti de la maison des esclaves...

Et c’est ce que maints épisodes vont nous rappeler par la suite, lorsque le peuple veut plusieurs fois retourner en Egypte. Il ne suffit pas de se glorifier d’un passé remarquable, où Dieu nous a permis de sortir d’Egypte. Encore faut-il que l’Egypte soit sortie de nous et que nous ne reproduisions pas plus avant, autrement, le statut d’esclave qui était le nôtre… Nous serions alors passé du statut d’esclaves de Pharaon, au statut d’esclave de Dieu, et nous nous glorifierons de notre morale d’esclave, de la force de notre servilité et de notre persévérance : obéir pour la simple satisfaction d’obéir, sans penser plus avant, sans chercher par là à sortir de la maison des esclaves.

C’est pourquoi cette phrase ouvre les dix paroles, et constitue comme l’introduction à tous les commandements qui vont suivre : il faut savoir que si nous avons reçu la Torah au Sinaï, ce n’est pas pour redevenir des esclaves sous un autre maître, plus grand et plus glorieux.

C’est au contraire pour nous libérer de l’esclavage en nous enseignant les lois de la libération. Car la liberté n’est pas un fait : elle est un faire qui doit sans cesse se conquérir sur les conditions de sa réalisation. Il n’y a pas de liberté en dehors d’un processus constant de libération, et donc en dehors d’une discipline qui soutient et alimente ce processus de libération. Mais cette discipline n’est pas un but en elle-même : elle vise à porter la liberté de chacun en rappelant sans arrêt à chacun les exigences qu’il lui incombe d’endosser personnellement s’il veut personnellement émerger à son propre acte, à sa propre liberté, à sa propre humanité.

Il devient dès lors facile de faire la différence entre le vrai culte prôné par la Torah, et l’idolâtrie : si les actes que vous accomplissez, vous construisent et vous libèrent, c’est que vous êtes dans la ligne du Sinaï ; sinon, il est temps de commencer à réfléchir et à se poser des questions, c’est-à-dire à étudier.

Yedidiah Robberechts

Un royaume de prêtres

Lorsque le peuple arrive au Sinaï, Moïse fait l’objet d’une première révélation de la part de la Transcendance : « Ainsi diras-tu à la maison de Jacob et parleras-tu aux fils d’Israël : vous avez vu ce que j’ai fait à l’Egypte ; je vous ai porté sur les ailes de l’aigle et je vous ai emmené vers moi. Maintenant, si vous écoutez ma voix et que vous gardez mon alliance, vous serez pour moi un trésor parmi tous les peuples, car toute la terre m’appartient - vous serez pour moi un royaume de prêtres et une nation sainte » (Exode 19,3-6). Moïse s’empresse de transmettre ce message au peuple d’Israël, et sa réponse semble enthousiaste : « Tout le peuple répondit ensemble et dit : « Tout ce que la Transcendance a dit, nous le ferons » (Exode 19,8). On a difficile à en croire nos oreilles : tout le peuple accepte unanimement sans la moindre hésitation ou le moindre doute de prendre sur lui la parole de la Transcendance ! On croit rêver… Moïse rapporte les paroles du peuple à la Transcendance.

Et là, surprise : « La Transcendance dit à Moïse : Voici, je vais venir vers toi dans l’épaisseur de la nuée afin que le peuple entende lorsque je parle avec toi et qu’en toi aussi ils croient pour toujours » (Exode 19,9). Comme si le peuple n’avait pas écouté Moïse et qu’il ne l’avait pas cru ! Et qu’il fallait rien moins que la révélation du Sinaï (les dix paroles et les jugements) pour que le peuple croie enfin Moïse et daigne l’écouter et le respecter ! Mais on vient de nous dire que ce que Moïse leur avait transmis, le peuple l’avait accepté…

Non. Nous avons mal lu, comme l’enseignait Léon Ashkénazi. Le peuple a répondu : « Tout ce que la Transcendance nous a dit, nous le ferons ». Mais uniquement ce que la Transcendance nous a réellement dit – et que nous avons reçu par tradition de nos pères -, et non pas ce que toi, Moïse, tu es en train d’inventer de ton propre chef : tu es sans doute resté trop longtemps sur la montagne, et cela t’a tourné la tête ! Le peuple s’est donc révolté contre Moïse en arguant qu’il savait très bien ce que la Transcendance voulait de lui et qu’il n’avait pas besoin de Moïse pour lui inventer une nouvelle religion.

Pourquoi cette réaction ? Parce que le message que Moïse a transmis au peuple de la part de la Transcendance est tout simplement révolutionnaire : vous serez désormais un royaume de prêtre et une nation sainte. Cela n’a jamais été dit ni proposé auparavant. Toutes les fois que Dieu s’est révélé aux patriarches, il n’a pas été une seule fois question de prêtrise. L’alliance avec les patriarches a toujours tourné autour de la promesse d’une descendance qui deviendrait un peuple, qui hériterait de la terre de Canaan et qui serait bénédiction pour les autres peuples. Mais jamais il n’a été dit que le peuple d’Israël devrait devenir le prêtre de l’humanité !

Cette spécification de la mission du peuple sur sa terre – devenir bénédiction pour tous - par l’intermédiaire de la prêtrise est une nouveauté que Moïse doit enseigner au peuple. Mais le peuple résiste d’abord : il veut une Torah qui lui convienne, qui soit compatible avec sa mémoire – ce que les patriarches lui ont transmis comme promesse divine – et avec ses aspirations, et donc pas ce que Moïse lui propose. Et on peut le comprendre. Car on peut par son exemple devenir source de bénédiction pour tous. On peut montrer en habitant sur sa terre, comment on peut construire une politique digne de ce nom qui réponde à un appel éthique et qui témoigne donc devant tous les peuples qu’il est possible d’inventer une politique qui ne se réduise pas au cynisme et à la violence – sous couvert de droit et de légitimité…

Mais il y a un pas entre cela et devenir un royaume de prêtres, et donc de fonctionner en tant que peuple comme prêtre de l’humanité ! Le prêtre, c’est le médiateur entre la Transcendance dans son appel éthique, et les hommes dans leur vivre-ensemble. Il est donc responsable de tous à travers la médiation qu’il effectue. Mais qui serait assez fou pour prendre sur lui une telle charge et une telle responsabilité : prendre sur soi le destin même du monde et en devenir redevable ? C’est à cette folie que la Révélation du Sinaï nous invite pourtant à participer.

Yedidiah Robberechts

Le Je libérateur

Après de multiples péripéties, le peuple d’Israël arrive enfin face au Sinaï. Tout se met en place pour le grand événement : la Révélation du Sinaï. La montagne tremble, le peuple aussi, il y a des tonnerres, des voix, des nuées… Et puis une voix qui se fait entendre et qui énonce la première des dix Paroles : « Je suis la Transcendance ton Dieu qui t’ai fait sortir de la terre d’Egypte, de la maison des esclaves » (Exodes 20,2). C’est tout. Pas un mot de plus. Le mot suivant nous introduit déjà dans la deuxième parole (« Tu n’auras pas d’autres dieux devant mes faces », Exode 20,3). Quoi de neuf dans cette première parole ? Apparemment, rien, nous savions déjà tout cela depuis belle lurette, cela a été raconté en long et en large durant les chapitres qui précèdent… La révélation ne serait-elle que répétition de l’évidence ?

Première remarque : c’est « Anokhi » qui m’a fait sortir d’Egypte. Cet « Anokhi », Moi, s’affirme au présent comme une présence qui me fait face aujourd’hui en m’affirmant qu’il m’a fait sortir d’Egypte : « Moi, la Transcendance ton Dieu, c’est moi qui t’ai fait sortir d’Egypte, de la maison des esclaves ». Ce qui est nouveau ici, et se renouvelle chaque jour où je lis ce texte, c’est ce Moi qui me fait face à l’instant présent pour par sa présence affirmer qu’il m’a fait sortir d’Egypte, qu’il m’a libéré. Ce texte, même s’il fait référence à l’histoire – la sortie d’Egypte – n’est donc plus seulement historique : il agit la présence d’une interpellation où le Je divin se pose face à moi pour me faire émerger à mon « tu » ; et il le fait aujourd’hui en me disant combien il s’est investi pour moi en me libérant de l’esclavage auquel j’étais soumis. Je ne puis donc pas lire ce texte sans m’entendre interpeler par un tu qui me cherche et qui s’est investi pour moi dans l’histoire, et sans me découvrir comme étant personnellement sorti d’Egypte grâce à ce tu. N’est-ce pas déjà une révélation ?

Deuxième remarque : on aurait encore pu être plus court, en disant : « Je suis la Transcendance ton Dieu qui t’ai fait sortir de la terre d’Egypte ». Pourquoi ajouter : « de la maison des esclaves » ? On le savait bien aussi cela. Ou peut-être pas assez ? Car je puis avoir l’impression d’être sorti d’Egypte, sans être vraiment sorti de la maison des esclaves... Et c’est ce que maints épisodes vont nous rappeler par la suite, lorsque le peuple veut plusieurs fois retourner en Egypte. Il ne suffit pas de se glorifier d’un passé remarquable, où Dieu nous a permis de sortir d’Egypte. Encore faut-il que l’Egypte soit sortie de nous et que nous ne reproduisions pas plus avant, autrement, le statut d’esclave qui était le nôtre… Nous serions alors passé du statut d’esclaves de Pharaon, au statut d’esclave de Dieu, et nous nous glorifierons de notre morale d’esclave, de la force de notre servilité et de notre persévérance : obéir pour la simple satisfaction d’obéir, sans penser plus avant, sans chercher par là à sortir de la maison des esclaves.

D’où ce commentaire que l’on trouve dans le Talmud   : « Anokhi est le notarikon (anagramme) de Ana Nafchi Ktivat Yehavit - moi, ma personne, je l’ai donnée dans l’écrit » (TB Chabat 105a). Le Moi divin n’est donc pas celui qui s’impose comme un maître dans la toute-puissance de sa présence et de son pouvoir, mais comme un amant qui donne sa personne dans la lettre qu’il écrit à celle qu’il attend (Rosenzweig). Il est ce Moi qui énonce son désir – et ses exigences – parce qu’il veut faire alliance avec le « tu » qui lui fait face et que son Moi dépend désormais de cette alliance, parce qu’il s’y énonce…

C’est pourquoi cette phrase ouvre les dix paroles, et constitue comme l’introduction à tous les commandements qui vont suivre : il faut savoir que si nous avons reçu la Torah au Sinaï, ce n’est pas pour redevenir des esclaves sous un autre maître, plus grand et plus glorieux, mais tout aussi terrifiant et arbitraire. C’est au contraire pour nous libérer de l’esclavage et de sa soumission aveugle en nous enseignant les lois de la libération – qui sont aussi celles de l’amour qui nous exige à notre responsabilité. Car la liberté n’est pas un fait : elle est un faire qui doit sans cesse se conquérir sur les conditions de sa réalisation, parce qu’il émerge à partir d’une interpellation qui lui vient de l’extérieur, du Moi qui lui fait face. Il n’y a pas de liberté en dehors d’un processus constant de libération, et donc en dehors d’une discipline qui soutient et alimente ce processus de libération : sans les mitsvot – et la halakhah qui cherche à la traduire dans le quotidien de nos gestes – la liberté n’est que présomption et fantasme...

Mais cette discipline n’est pas un but en elle-même : elle vise à porter la liberté de chacun en rappelant sans arrêt à chacun les exigences qu’il lui incombe d’endosser personnellement s’il veut émerger à son propre acte, à sa propre liberté, à sa propre humanité. Et cela elle le fait, parce qu’il y a un Moi qui en appelle au tu que je suis, et qui attend que ce tu deviennes véritablement un je, face à lui. La mitsvah est le lieu d’attente du divin face à l’humain, le lieu d’un amour qui nous rend responsables de nos actes et de l’histoire, car responsables du désir de libération de Dieu lui–même, et donc de Dieu lui-même…

Il devient dès lors facile de faire la différence entre le vrai culte prôné par la Torah, et l’idolâtrie : si les actes que vous accomplissez, vous construisent et vous libèrent – parce qu’ils construisent le lieu d’une rencontre -, c’est que vous êtes dans la ligne du Sinaï ; sinon, il est temps de commencer à réfléchir et à se poser des questions, c’est-à-dire à étudier.

Yedidiah Robberechts

Le début des 10 commandements :

Une excellente étude de Rivon Krygier : Anokhi HaChèm (« Je suis l’Éternel ton Dieu ») est-il le premier des dix commandements ? A lire en format Pdf

Anokhi Krygier

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