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L’ordre des versets

L’ordre des versets

Parashat Beshalach -

Le texte de la Torah, du point de vue de la tradition juive, forme un tout à l’ordre précisément agencé. C’est pourquoi les commentateurs sont souvent à l’affût des étrangetés du récit :

le fait qu’un verset ait été mis à telle place au lieu d’une autre qui aurait été plus logique indique que la Torah désire nous transmettre quelque chose qui est au delà du simple sens littéral.

Le rav Mordechaï Yossef d’Izbicy (1801-1859), dans son livre "Mé hashiloach", apporte une remarque intéressante sur les premiers versets de la Parasha  . Celle-ci s’ouvre sur la décision de Dieu de ne pas mener les Hébreux directement d’Egypte en Canaan par la route directe, celle de la côte, mais de les diriger vers le désert (exode 17-18). Puis le verset suivant change brutalement de sujet, et nous raconte comment Moïse a pris avec lui, au moment de la sortie d’Egypte, les ossements de Joseph afin d’accomplir la promesse qui avait été faite à l’ancêtre de ramener son corps en terre d’Israël.

Le "mé hashiloach" s’étonne de la juxtaposition de ces deux sujets. Il est vrai que la place logique de ce verset sur les ossements de Joseph aurait été plutôt vers la fin de la parasha   de la semaine dernière, où l’on nous décrit la sortie d’Egypte elle-même, et non ici, alors que cette sortie s’est déjà accomplie. Pour le Rav Mordechaï Yossef, cette juxtaposition a un sens et il faut l’expliquer.

Pour ce faire, le commentateur cite un passage des Pirké Avot (le traité des pères) où il est dit : "tout celui qui fait passer la crainte de la faute avant sa sagesse, sa sagesse se réalisera" (3, 11). Mais il fait de ce dire une lecture inhabituelle, renversant presque le sens premier : lorsque l’on ne peut appliquer sa sagesse, que l’on n’arrive pas à comprendre les actes de Dieu, alors il faut se consacrer à l’accomplissement des commandements les plus simples.

C’est se qui s’est passé après la sortie d’Egypte. Moïse et les Hébreux n’ont pas pu comprendre cette décision de Dieu de ne pas les amener directement en terre d’Israël. Avaient-ils accomplis quelque chose de mal, leur manquaient-ils une qualité particulière pour ne pas mériter de monter immédiatement vers la terre des ancêtres ?

Face à cette inquiétude, l’attitude Moïse n’est pas de forcer à tout prix les mystères de Dieu, mais de s’occuper de remplir les commandements essentiels. Prendre les ossements de Joseph, c’est agir avec une grande piété, puisqu’il s’agit de remplir l’engagement promis vis-à-vis de quelqu’un qui n’est plus là pour le faire respecter.

Au-delà de cette leçon de piété et d’humilité proposée par le Mé hahiloach, celui-ci nous oblige également à regarder le récit d’une autre manière : lorsque nous lisons le début de la parasha  , nous nous évertuons à comprendre et commenter la décision de Dieu de faire passer les Hébreux par le désert.

Mais nous oublions de nous interroger sur la manière dont ceux-ci ont vécu cette décision.

Car lire la Torah, ce n’est pas seulement se poser des questions théologiques, c’est également nous plonger dans une aventure humaine, celle de nos ancêtres, et tenter de mieux comprendre quelles ont été leurs réactions, eux qui, contrairement à nous, ne connaissaient pas la fin de l’histoire.

Ce faisant, peut-être pourront-nous mieux comprendre nos propres réactions face à notre propre présent parfois si difficile à interpréter.

Rabbin   Alain Michel – Rabbin   Massorti   à Jérusalem et historien

copyright Jerusalem Post

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