Je sais qu’idéalement, il ne faudrait faire que lait ou que viande, mais si on ne salit pas assez de vaisselle, peut-on, pour des raisons écologiques et économiques, faire tourner le lave-vaisselle avec les vaisselles de viande et de lait mélangées pour le remplir ?
Réponse
Se servir de la même machine, mais en alternant selon lait ou viande.
Je comprends la motivation tout à fait noble de vouloir économiser l’eau (et l’électricité), mais elle ne suffit pas à briser l’interdit de mélange des vaisselles.
A chaud dans le lave vaisselle, Halavi et bassari seraient en contact, comme si on lavait à la main dans une même bassine... C’est un gros problème et autant alors n’avoir qu’une seule vaisselle... C’est pourquoi il faut continuer à séparer lait et viande pour laver à la machine.
Plusieurs décisionnaires se sont penchés sur la question proposant différentes solutions (avoir deux systèmes de panier, faire tourner une fois à vide entre les deux catégories de vaisselles..., se servir de la même machine et mêmes paniers en alternant seulement...)
Nous optons pour la solution la plus simple et la plus écologique : alterner les vaisselles dans la même machine sans faire tourner à vide, si utilisation de produit à vaisselle puissant à chaque fois. Il faut par contre vérifier qu’il n’y a pas de dépôts, notamment dans le filtre.
Le raisonnement se base sur le principe de "taam lefgam" - le goût est détruit par le produit de lessive et donc même si une particule était en contact, elle n’aurait pas de conséquence car ayant perdu son "goût" du fait du lavage précédent.
(Pour Pessah, faire tourner une fois à vide le lave vaisselle après nettoyage et vérification du filtre et des paniers.)
Nous adoptons ici le point de vue du rabbin Ovadia Yossef , qui nous semble tout à fait pertinent (séfarades ou pas) (Yabia Omer, vol.10, Yoré Dea n°4) et non celui de Moshé Feinstein .
Nous pensons que la question de l’origine de la personne, séfarade ou ashkénaze, n’a pas de pertinence par rapport à une telle question qui concerne des points techniques et non ethniques. (voir le forum ci-dessous).
Le mouvement Massorti cherche la réponse la plus logique et pratique et ne fait pas de fixation sur l’identité du possek. Mais vous devez savoir que la tendance ashkénaze est d’être plus stricte que celle des séfarades.
Tenir compte de l’environnement
La question doit être prise en compte et c’est dans l’esprit de la Halakha que de ne pas trop polluer et faire des économies.
Préférer un programme pas trop chaud et rapide si possible (le plus souvent cela suffit).
Faire parfois la vaisselle à la main pour des choses simples et n’utiliser le lave vaisselle que lorsque nécessaire.
Un lave vaisselle consomme de toute façon beaucoup moins d’eau que quelqu’un qui lave à la main robinet ouvert.
Programmation du lave vaisselle Shabbat
On peut envisager de programmer une machine pour shabbat. C’est le principe adopté dans le Talmud par Hillel qui dit que nos objets ne sont pas soumis au shabbat "shevitat kelim".
Il est donc envisageable de programmer la machine qui fonctionnera durant la nuit de shabbat préalablement chargée de la vaisselle du vendredi soir. Il est évident que c’est une excellente solution pour les familles nombreuses... et communautés.
Cependant il peut se poser des problèmes techniques. Le fait de fermer le couvercle va-t-il ou pas déclencher le processus de mise en route ?
Prendre de telles habitudes ne va-t-il pas pousser, le jour où on a oublié de programmer à le faire quand même ?
Si une programmation est envisageable, il faut bien tenir compte de toutes les données du problème.
Yeshaya Dalsace
Messages
Il faut savoir que pour les Séfaradim il n’y a aucun problème de cacheroute s’agissant du lave-vaisselle. Effectivement, celui-ci est utilisé automatiquement avec du détergent, et ce détergent est par excellence un noten taam lifgam comme le stipule clairement le Choulh’an Arouh’. Ce faisant, on a le droit même léh’atéh’ila d’utiliser le même lave-vaisselle pour le lait et la viande, et ce même en même temps !!!
Pour les Achkénazim c’est différent : Il faut cachériser le lave-vaisselle en le faisant chômer 24 heures, puis en le faisant fonctionner une fois à vide, sans ustensile à l’intérieur.
Vous trouverez les téchouvot à ce propos dans Yabia-Omer et Igrot Moshé.
Rav Imanouel Mergui
Cher Immanuel,
Quelle bonne surprise de vous voir intervenir sur ce site, soyez le bienvenu !
Votre précision est tout à fait juste, merci. Mais comme précisé dans l’article (mais peut-être pas assez clairement et je vais compléter), la vision du mouvement Massorti va au-delà du clivage devenu très artificiel et de plus en plus anachronique ashkénaze / séfarade.
Par rapport à une question technique, dans le mouvement Massorti , nous chercherons la réponse qui nous semble la plus pertinente sur le plan de la logique halakhique en évitant les étiquettes ethniques.
En l’occurrence, c’est celle d’Ovadia Yossef qui nous semble plus proche de nos préoccupations et de celle de la question (respect de la kashrout liée au souci écologique de ne pas faire tourner une machine pour rien) et non celle de Moshe Feinstein .
Le respect des traditions locales nous semble pertinent pour des plats culinaires, des airs, un noussah de tefila… et encore, tous les plats sont bons à manger et bien qu’ashkénaze j’adore la bkaila tunisienne (dur à digérer !), certains airs séfarades et même pour le noussah j’adopte la coutume séfarade du seder de Rosh Hashana, ou celle de dire un psaume spécifique à chaque fête…
Inversement, je tiens à certaines spécificités de mes racines, comme celle de mettre les tefilines à hol hamoed ou encore de dire le kiddoush après netilat yadayim… (coutumes de la vallée du Rhin). Dans les communautés où j’ai servi comme rabbin , j’ai toujours eut soucis de varier les coutumes et de chercher à retenir le meilleur de chacun.
Sur des questions plus profondes, comme celle des femmes et des mitsvot, je pense que les ashkénazim (plus évolués que les sefardim sur ce point, mais pour de seules raisons d’environnement culturel et donc de mentalité) ont raison et qu’une femme quelle que soit son origine doit secouer le Loulav avec Brakha et autre mitsvot liées au temps…
Par contre nous trouvons absurde de laver la vaisselle différemment sous prétexte qu’on est originaire de Pologne ou du Maroc… Chacun peut vouloir jouer les mah’mirim (les strictes) à la façon ashkénaze ou inversement, mais cela tient plus au caractère individuel qu’à l’origine familiale…
Voici donc les raisons pour lesquelles la réponse en matière de machine à laver va selon O.Yossef en ne tenant nullement compte du nom de famille de la cuisinière…
Meilleur souvenir des quelques lectures talmudiques avec vous.
Yeshaya Dalsace