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Hommage à Willy Ronis

Hommage à Willy Ronis

Photographe et humaniste -

Son père, la musique, sa judaité, sa proximité avec le PCF, et puis les autres photographes et les images… C’était en 1994. Willy Ronis “le lointain”, grand humaniste disparu à l’automne 2009, se confiait longuement à Révolution. Il était alors âgé de 84 ans.

Willy Ronis :

Je suis né à Paris en 1910 et suis issu de la petite-bourgeoisie besogneuse. Ma mère était lituanienne, mon père originaire d’Odessa. Juifs tous les deux. Ma mère était musicienne, elle donnait des leçons de piano. Mon père travaillait déjà comme photographe en Ukraine. Arrivé à Paris, il a trouvé une place de retoucheur de clichés chez un photographe mondain. En ce temps-là, les plaques et les émulsions n’étaient pas panchromatiques mais orthochromatiques, avec une faiblesse dans les bleus et les rouges qui faisait qui les défauts de la peau, les rides, étaient beaucoup plus visibles que maintenant. Les retoucheurs travaillaient sur les négatifs pour atténuer ces défauts… Mon père finit par ouvrir son propre magasin, boulevard Voltaire. Il avait un employé qui faisait le laboratoire, lui s’occupait de l’accueil de la clientèle et de la prise de vues. Il s’est littéralement tué au labeur…

Avez-vous reçu une éducation religieuse ?

Oui, mais je n’étais pas croyant. Ma mère était croyante mais n’en faisait pas montre excessive. Mon père était agnostique. Par tradition, nous assistions aux trois grandes fêtes juives de l’année, à la grande Synagogue, rue de la Victoire. J’ai fait ma première communion, la barmitsva, comme des tas d’autres copains du quartier. Mais je n’ai jamais eu de crise mystique.

Vos parents vous ont-ils parlé des pogroms ?

Ma mère ne s’en souvenait pas. Elle a quitté la Lituanie à l’âge de 4 ans. Jeune homme, mon père a quitté l’Ukraine à cause de ça. Mais il en parlait très peu. Je crois qu’à partir du moment où il s’est trouvé en France, terre de liberté, il avait envie d’oublier. C’est pourquoi je sais assez peu de choses. Enfant, je ne savais pas. Je voyais mon père… Je me rendais compte qu’il avait un accent. Parce qu’il n’était pas né là… Mais c’est vraiment tout ce que je percevais. Pourtant, tout gosse, dans les classes d’histoire, je me sentais vraiment comme une personne déplacée. On nous parlait de Clovis, Charlemagne, Jeanne d’Arc… Je me rendais compte que ça n’était pas du tout mon univers. On croit que les enfants écoutent les cours d’histoire de France comme ils écoutent des légendes ou des histoires que l’on raconte le soir à la veillée. Pas du tout ! Et j’en ai beaucoup souffert. Il m’a fallu du temps pour que mon appartenance comme Français à part entière se concrétise par un confort de vivre égal à celui de mes camarades.

Quelles ont été vos premières émotions artistiques ?

La musique ! La musique classique, puis le jazz. Ma mère m’a emmené aux concerts symphoniques très tôt. Elle m’a raconté qu’une fois, après un concert, elle a dû me coucher avec de la fièvre. Jusque-là, je n’avais entendu que de la musique classique du XVIIIe et XIXe siècles et, tout d’un coup, voilà que j’entendais Jeux, de Debussy. Et ça, ça m’a complètement déstabilisé. Un véritable traumatisme mental. Comme si on m’avait plongé dans une forêt et qu’on m’y avait abandonné… On m’a fait apprendre le violon dès l’âge de 7 ans. J’ai joué jusqu’à 25 ans. Adolescent, je voulais devenir compositeur. J’ai suivi pour cela pendant un an et demi les cours privés d’harmonie d’André Bloch, professeur au Conservatoire. J’ai abandonné la musique lorsque je suis devenu photographe professionnel. Tout mon temps était requis pour gagner ma vie. J’ai néanmoins continué à aller aux concerts symphoniques au moins une fois par semaine…

Depuis l’âge de 15 ans, je suis aussi un fan de jazz. Nous avions un ami qui travaillait à La Voix de son maître. Il me procurait des disques pour presque rien. Je me souviens être allé entendre, salle Pleyel, deux concerts de Duke Ellington à l’occasion de sa première visite à Paris, en 1932. C’est un souvenir impérissable. J’écoutais aussi beaucoup Armstrong. Bien plus tard, Vincent, mon fils, 18 ans, m’a apporté à la maison un disque de Miles Davis. C’était Miles’ ahead, arrangé par Gil Evans. Là, j’ai découvert une harmonisation des thèmes que je n’avais jamais entendue, une individualisation extraordinaire de l’arrangement musical. C’était pour moi un univers tout à fait nouveau. Aujourd’hui je ne fréquente plus les concerts, mais au labo, j’écoute la radio. Je découvre des musiques que je n’aurais pas eu l’idée d’aller entendre en concert.

Abandonner la musique vous a-t-il laissé un sentiment d’amertume, de frustration ?

Oui et non. Oui parce que le rêve de jeunesse s’évanouissait. Mais non parce que, peu à peu, j’avais compris que je n’aurais pas été un bon compositeur. J’ai senti, à la manière dont j’acceptais cet abandon, qu’en fait je n’avais pas la véritable conviction, nécessaire lorsqu’on a une vocation profondément ancrée en soi. En fait, j’ai remercié le destin de m’avoir fait photographe. Il aurait pu me faire autre chose… Cela m’a probablement préservé de souffrances intolérables, si j’avais eu le doigt pointé sur ma médiocrité de compositeur. Ça, je l’aurais vécu avec une souffrance que je n’ose pas imaginer.


Vous ne songiez pas à devenir photographe professionnel ?

J’aimais la photo, mais je n’avais nullement l’intention de devenir photographe. A mon retour du service militaire, mon père m’a demandé de l’aider. J’avais 22 ans. Il était très malade. Avec la crise économique, il n’aurait pas pu embaucher un ouvrier supplémentaire. Les photographies d’identité, les photos de baptême, de fiançailles, de groupes de noces… je détestais tout ça. Mais il n’était pas question pour moi de refuser. Je suis entré en photographie par amour filial. J’aimais énormément mon père. La mort dans l’âme, j’ai travaillé dans son studio de 1932 à 1936, année de sa mort. A ce moment, j’ai fui le magasin. Nous étions criblés de dettes. Mon père, voyant très bien que j’étais rentré à contrecoeur dans son atelier, avait fait des frais inconsidérés pour améliorer le studio et s’était lancé dans une aventure catastrophique du point de vue financier. Tout a été laissé aux créanciers. Je me suis retrouvé avec mon frère et ma mère à charge, et la nécessité de placer mes photos pour en vivre. Sans aucun matériel, juste deux ou trois cuvettes et un appareil d’amateur. Je me suis fabriqué un agrandisseur avec un vieil appareil 9-12, un condenseur trouvé aux puces de Clignancourt et les vestiges d’un Meccano.


Etiez-vous intéressé par la photo d’art ?

Alors que j’étais encore dans l’atelier de mon père, j’ai commencé à faire de la recherche photographique, c’est-à-dire des photos pour moi, en fonction d’une certaine photographie que j’avais découverte à travers l’exposition annuelle de la Société française de la photographie, une exposition internationale de très bon niveau. Il y avait aussi quelques expos dans des librairies d’avant-garde… C’est ainsi que j’ai participé, en 1935, à l’exposition « La photographie qui accuse », rue Navarin, organisée par l’AEAR (Association des écrivains et artistes révolutionnaires). J’avais donné quelques photos séparées et un photomontage. Mais je n’ai pas vraiment de souvenirs, juste quelques flashs : René Crevel, illuminé, exhortant le public, Louis Aragon déclamant à la tribune un poème antimilitariste…

Avez-vous sympathisé avec d’autres photographes ?

A l’AEAR, je me suis lié avec Tuerrert, Eli Lotar, Marie-Claude Vaillant-Couturier… Peu après, j’ai fait la connaissance de Chim (David Seymour). Il vivait à l’hôtel et, comme moi, il était plutôt fauché. Je lui ai proposé de venir glacer ses photos dans l’atelier de mon père. Un jour, au Flore, le rendez-vous des photographes étrangers, il m’a présenté Capa. Nous étions très différents mais, immédiatement, nous sommes devenus très amis. Capa, c’était le genre de type qui claquait le fric, jouait aux courses, courait les filles, dépensait plus qu’il ne gagnait. J’étais fasciné par la voie photographique que Chim et lui avaient embrassé : le grand reportage, l’Espagne. Moi, après la mort de mon père, j’avais des problèmes quotidiens de survie puisque je me retrouvais chargé de famille. Eux, ils étaient libres comme l’air, sans attache familiale, s’ils ne bouffaient pas un jour, ça n’était pas grave. En 38, j’ai eu l’occasion de partir quinze jours au pair comme photographe sur une croisière qui faisait la Yougoslavie, l’Albanie et la Grèce. Quand, en 1939, la tension a monté dans les Balkans, Capa a décidé de rentabiliser tout ça. Il a écrit un article qu’il a envoyé avec mes photos dans cinq grandes capitales européennes : « Retour d’un récent voyage dans les Balkans de notre reporter Willy Ronis. » Il me disait : « Je veux faire du cinéma, je vais fréter un bateau, on va faire le tour du monde, je ferai le film, toi la photo. J’assurerai l’existence de ta mère pendant notre voyage, à valoir sur tes droits. » La guerre est arrivée. Nous n’avons pas fait le tour du monde.

Comment avez-vous vécu l’avènement du pétainisme en France et l’antisémitisme ?

Enfant, à l’école, je n’avais pas vécu l’antisémitisme sauf, parfois, sous la forme d’une plaisanterie de mauvais goût. En 1941, on a apposé la mention « Juif » sur mon passeport… Beaucoup d’entre nous croyaient qu’il ne pourrait rien nous arriver. Après tout, nous étions français… En juin 1941, j’ai décidé de passer clandestinement en zone Sud. J’ai été accueilli chez des amis à Bergerac. Des bourgeois plutôt réacs, mais très généreux et pas antisémites. Ils m’ont aidé à obtenir des papiers à mon nom mais sans la mention « Juif ». De Toulon à Marseille, j’ai fait différents métiers, j’ai rencontré celle qui, plus tard, allait devenir ma femme. Ma mère a refusé de quitter Paris. Elle a passé toute cette période en totale inconscience : avec l’étoile jaune. En fait, elle sortait très peu. Elle cachait son étoile et, par bonheur, elle était protégée dans son immeuble. Ni les locataires ni la concierge, qui était une personne que je n’aimais pas mais qui a probablement été une brave femme, ne l’ont dénoncée. J’ai perdu mon oncle paternel, beaucoup d’amis, de voisins. J’ai perdu mon ami d’enfance, Jacques. Il habitait notre immeuble. Nous allions au lycée ensemble. Il était juif de parents Russes, comme moi. Il militant aux Jeunesses communistes.

Cet ami disparu vous a-t-il influencé dans votre choix politique ?

Très certainement. Chez moi, on ne parlait pas politique. Jacques me parlait du Parti, de l’URSS… Avec lui j’ai participé à de nombreuses manifestations. Au début, je suis quand même resté assez distant : je ne me sentais pas prêt. J’avais un certain scepticisme, même si je sentais que tout me poussait dans ce sens-là. Peu à peu, ce scepticisme s’est effrité…

Avez-vous adhéré au PCF ?

J’ai pris ma carte après-guerre. Mais je n’étais pas un militant très actif. D’ailleurs, je ne pouvais pas à cause de mon métier : je n’avais jamais la certitude d’être disponible. J’ai quand même distribué des tracts à 5 heures du matin à l’entrée des boîtes, fait des collages d’affiches la nuit, vendu l’Huma à la criée le dimanche matin… Bref, j’ai fait des tas de trucs que font les militants de base. Mais enfin, je ne l’ai pas fait comme certains camarades qui ont un travail régulier, font leurs 40 heures et qui savent que le samedi et le dimanche, ils sont libres. Moi, souvent, je travaillais le week-end et le soir, je faisais du labo. Mais je n’étais pas à mon aise. Parce que, précisément, je ne pouvais pas suffisamment m’impliquer dans le travail politique. Je me sentais un peu en dehors… J’avais des convictions mais je ne comprenais pas toujours. En fait, je n’ai pas très bien vécu mon appartenance. Je n’ai pas repris ma carte en 1965. Mais ça n’a rien changé à mes convictions profondes et, en ce moment, j’ai les mêmes. En fait, je n’étais pas fait pour être un militant. Je n’ai jamais milité heureux. Je n’avais pas la tête politique.

Etiez-vous fasciné par le monde ouvrier ?

Ce n’était pas mon milieu mais j’étais très attiré par cet univers-là. Je me souviens que, lorsque j’avais 13-14 ans, dans le métro, un soir, un groupe d’ouvriers est entré dans mon wagon. A cette époque, la différence de classe était parfaitement marquée dans l’habillement. Entre bourgeois, petit-bourgeois et ouvriers, il y avait une distinction à l’œil immédiate. Le visage très grave, ils se sont mis à chanter L’Internationale, La Jeune Garde… j’ai été complètement bouleversé parce que, tout d’un coup, je me retrouvais dans un univers totalement exotique. Je voyais un groupe animé par une foi. Plus tard, lorsque je couvrais des grèves en tant que photographe, j’ai retrouvé cette gravité, cette force.


Pour quelles publications couvriez-vous ces grèves ?

Avant et après-guerre, j’ai effectué pas mal de sujets pour Regards. Fin 47, j’ai commencé à faire des sujets sociaux pour Life. A cette époque, il y avait de très nombreuses grèves et ils savaient que je voulais entrer dans des lieux où leurs photographes, avec leur accent américain, auraient été foutus dehors. Mais ce qui intéressait la rédaction américaine, c’était uniquement de dénoncer la mainmise du PCF sur le mouvement revendicatif. C’était la guerre froide. J’ai quitté Life en 49. Je ne pouvais pas avoir la maîtrise de mes légendes et je n’avais pas du tout confiance en eux. Ils ont été très francs avec moi : « Mais si on te laisse écrire tes légendes, de toute façon, elles seront réécrites à New York ». A partir de là, ils n’ont plus jamais fait appel à moi. De 46 à 55, j’ai également effectué de nombreux sujets sociaux pour Rapho.

Vous avez quitté Rapho à la suite d’un conflit politique ?

Non, pas du tout. Simplement je ne voulais pas que mes photos apparaissent dans certaines publications. Et je ne pouvais pas exiger de Rapho qu’ils tiennent compte de cela. Etant donné que mes photos étaient dans les archives de l’agence, si telle publication sortait un de mes clichés, c’était difficile d’attendre de Rapho qu’ils disent : « Ah non ! Ronis ne veut pas travailler avec vous ». Il y avait par exemple une publication avec laquelle Rapho travaillait beaucoup, c’était France-Etats-Unis, un journal issu du plan Marshall, et c’était totalement exclu pour moi de travailler chez eux. Je vous donne là l’exemple le plus caricatural… Il y avait d’autres revues mais je ne me souviens pas de leurs titres. Comme je ne voulais pas causer de problèmes à Rapho, je leur ai dit : « Bon, on arrête ».

Ça devait être pour vous un choix difficile à faire.

Très dur. Et je l’ai payé très cher. Au point de vue financier, j’ai tiré la langue pendant un long moment. Un certain nombre de publications croyaient que j’avais quitté le métier. J’ai dû reprendre mes photos, me faire un album et faire le tour des rédactions pour leur montrer que j’étais toujours dans la profession… Il m’a fallu quelques années pour me remettre dans le circuit. Vers 56-58, j’ai travaillé sous contrat pour Vogue, avec Edmonde Charles-Roux comme directrice. Photographe de mode, ça m’a beaucoup amusé. J’ai aussi fait pas mal de photographie industrielle… C’est un genre qui présente des contraintes mais j’ai réussi à imposer une certaine vision dans mes reportages : ne pas montrer seulement les installations mais aussi les gens au travail. Mais… toutes ces années ont été difficiles. En 1972, ma femme et moi avons décidé de quitter Paris pour nous installer dans le Midi. Nous étions fatigués de cette vie, de Paris. Mais il fallait continuer à gagner sa vie. J’ai fait des reportages couleur pour des éditeurs parisiens, j’ai exploité mes archives à travers Rapho avec qui j’avais renoué avant de partir. Et puis j’ai exercé une activité pédagogique à temps partiel, aux Beaux-Arts d’Avignon, à la fac des Lettres d’Aix-en-Provence, à la fac des Sciences Saint-Charles à Marseille. Notre désir de vivre à la campagne assouvi, nous sommes revenus en 1983. Paris nous manquait, et puis, lorsqu’on travaille pour la presse, c’est ici que tout se passe.

Que ressentez-vous au moment du déclic ?

Il y a toujours l’appréhension. Lorsqu’on travaille sur le vivant, il y a toujours une fugacité génératrice d’angoisse. « Est-ce que j’ai pris le bon moment ? ». Cette angoisse m’a toujours tenaillé avant. Au moment où je quitte la maison pour aller faire des photos. Le trac. Le trac qui fait que quelquefois, dans le bus ou la voiture, il m’est arrivé de me dire : « Si mon appareil tombait en panne, je n’aurais pas ce problème à régler aujourd’hui ! ».

Et lorsque vous développez ?

Quand je développe, il y a naturellement la grande inconnue : « Est-ce que j’ai appuyé au bon moment ? N’ai-je pas négligé quelque chose qui, dans le fond, casse complètement l’intérêt de mon image ? Quelque chose qui prend une importance que je n’avais pas prévue au moment où j’ai appuyé ? ». Physiologiquement, l’œil n’est pas construit pour embrasser tout le champ visuel avec la même capacité d’analyse. L’œil est un toucher à distance. Et on ne touche qu’un seul objet à la fois. L’œil est incapable de capter en photographie une vision globale : le principal et l’accessoire. Il y a toujours le danger que l’accessoire tue le principal. L’exemple le plus simple, c’est le jeune homme qui photographie sa petite amie dans un jardin et ne fait pas attention qu’elle a un arbre qui lui sort de la tête. L’arbre est à trois mètres derrière mais il regarde la fille, pas ce qu’il y a derrière elle ! Ça, c’est une chose à laquelle il faut toujours avoir l’esprit : que se passe-t-il derrière et sur les côtés ? C’est pourquoi j’aime tant les marchés. À mon avis, on touche là la plus haute difficulté photographique. On voit quelque chose d’intéressant mais quelque chose à côté peut tuer complètement ce que l’on voit : ou bien c’est un grand trou – et alors ça casse la composition – ou bien ça n’est pas bon et ça rentre en contradiction avec ce que l’on a voulu exprimer. Il faut avoir l’œil partout.

La photo parfaite pour vous, c’est quoi ?

C’est celle où j’aurais pu communiquer à celui qui la regarde l’émotion qui m’a déterminé au moment du déclic. Je veux faire participer. Je veux montrer quelque chose qui m’a ému et je voudrais que ce soit parfait. Donc, les questions formelles sont extrêmement importantes. Je suis un fou de la forme. Pour moi, il ne peut pas y avoir de contenu exprimé s’il n’y a pas une forme complètement châtiée dans tous ses détails. Ou alors… c’est un cas très spécial. Par exemple lorsqu’il n’y a qu’un seul personnage avec un fond inexistant ? A ce moment-là, c’est la simple expression du personnage qui compte. Mais la composition est ce qui requiert mon attention la plus vive.

Propos recueillis par Erwan et Tangui Perron

Article paru dans Révolution, n°764, 20 octobre 1994.

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